Litige avec un concessionnaire : 7 histoires qui se sont retrouvées en cour
Moteur qui brise, tactiques de vente illégales, publicité trompeuse, financement trop cher, garantie non respectée... Voici les mésaventures de sept propriétaires de véhicules qui se sont retrouvés aux petites créances. Certains ont gagné sur toute la ligne; d’autres, en partie seulement.
Frais illégaux
Rétention d’information
Financement plus cher que prévu
Publicité trompeuse
Garantie insuffisante
Situation stressante
Garantie pas réellement expirée
4 conseils pour tirer votre épingle du jeu
Qu’il s’agisse d’une auto neuve ou d’occasion, achetée ou louée à long terme, certains concessionnaires ont le don de tirer sur l’élastique. Si vous êtes empêtré dans un litige, la première chose à faire est d’entamer le dialogue avec le commerçant. Si cela ne fonctionne pas et que vous avez épuisé vos recours (apprenez-en plus au pv.ca/litige-auto), vous devrez soumettre le démêlé à un juge.
Pour vous donner une idée du déroulement et de l’issue de ce genre de cause aux petites créances, nous avons sélectionné pour vous sept jugements rendus entre 2020 et 2023. Ces exemples sont susceptibles de vous aider dans vos démarches. Pour aller plus loin, voyez aussi les précautions à prendre à l’achat d’une auto neuve et consultez notre palmarès des meilleurs concessionnaires automobiles.
Frais illégaux
En 2019, un consommateur achète un GMC Terrain usagé auprès de St-Jérôme Chevrolet Buick GMC. Selon lui, des frais non justifiés ont été ajoutés au prix de 16 995 $ inscrit sur l’étiquette du véhicule utilitaire sport (VUS). Il soutient aussi qu’on lui avait promis de payer le solde dû sur sa Camaro qu’il échangerait au moment de la transaction, alors que cela n’a pas été fait.
Devant la cour, le concessionnaire explique qu’il a plutôt dit que le prix du GMC serait déterminé en fonction de la valeur de reprise de la Camaro et du solde dû sur celle-ci. Contrat en main, le juge constate que le commerçant dit vrai et que certains suppléments mentionnés par le client ont été ajoutés avec son plein consentement.
Il remarque toutefois que les frais de consultation de l’historique du véhicule (CarProof) ainsi que les frais d’administration du concessionnaire et de la banque – 1 518 $ au total – auraient dû être inclus. La loi est claire à ce sujet : le prix affiché du véhicule doit inclure tous les frais, à l’exception de la taxe sur les produits et services (TPS), la taxe de vente du Québec (TVQ) et le droit sur les pneus.
Selon le juge, la preuve montre que les documents ont été signés « en vitesse et sans explications ». Verdict? Le concessionnaire doit rembourser les frais illégaux (1 518 $) et payer des dommages punitifs de 500 $. (Jugement 700-32-035467-206 rendu en 2022.)
Rétention d’information
Aux petites créances, le tribunal tranche selon ce qui est le plus probable, même si le fait n’est pas démontré hors de tout doute. Une présomption doit toutefois « être suffisamment grave, précise et concordante », comme l’énonce le juge dans l’histoire de cet homme qui achète en 2019 un Hyundai Kona électrique EV Ultimate à 52 000 $ à Seray Hyundai Chambly.
Une semaine avant, le gouvernement annonce un incitatif de 5 000 $ applicable aux véhicules électriques vendus à moins de 45 000 $ et mentionne que des précisions suivront. Le client veut donc différer son achat au cas où les modalités rendraient son modèle admissible à ce programme. Réaction du concessionnaire : aucune chance que cela arrive!
Le client l’achète donc, mais un mois plus tard, surprise! Hyundai Canada réduit le prix du Kona EV de base pour le rendre admissible, et les modalités du programme font en sorte que l’ensemble de la gamme le devient aussi, y compris l’Ultimate. Outré, le client soutient que le vendeur savait ce qui allait arriver, mais qu’il lui a caché l’information dans le but de conclure la vente.
Selon le juge, rien ne prouve cette affirmation. Le tribunal croit toutefois qu’en raison de la faible différence (à peine 600 $) entre le prix du modèle de base et le seuil d’admissibilité, le concessionnaire savait pertinemment que cela pouvait arriver. Il est donc condamné à payer 5 000 $. (Jugement 505-32-037578-193 rendu en 2022.)
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Financement plus cher que prévu
Un client poursuit Mazda Pointe-aux-Trembles après l’achat, en 2019, d’une Mazda3 GX neuve. Raison du litige : le contrat de financement indique un taux de 3,81 % pendant 84 mois, alors que le client avait plutôt demandé 1,9 % sur 72 mois. À la fin du terme, cela représente un écart de 5 701 $.
Le concessionnaire admet son erreur, mais comme il ne réussit pas à faire modifier le contrat par la banque, il offre de payer l’écart. Le client refuse, arguant que l’offre n’inclut pas les frais de justice [note : le jugement laisse supposer qu’il s’agit des frais encourus pour officialiser la poursuite aux petites créances, et que le concessionnaire a fait son offre entre le début des procédures judiciaires et le jour de l’audience].
Devant la cour, le client demande notamment le remboursement du montant lié à l’erreur de financement ainsi que 6 400 $ en dommages moraux (inconvénients subis) et punitifs (pour dissuader d’autres gens d’agir ainsi). Ces dommages sont-ils justifiés? Oui, selon le juge. Même si l’erreur est de bonne foi, le client y a droit. Le montant demandé est toutefois jugé exagéré; le tribunal le fixe plutôt à 1 000 $. S’ajoutent à cela 5 701 $ pour l’erreur de financement, 98 $ pour divers frais et 500 $ pour avoir dit au client que l’auto était admissible au rabais du constructeur, alors que ce n’était pas le cas. (Jugement 400-32-701630-209 rendu en 2022.)
Publicité trompeuse
Séduite en 2018 par la publicité d’une Jetta Sedan TSI Trendline aperçue sur le site web de Joliette Volkswagen, une femme se rend sur place et constate que, contrairement à ce que dit l’annonce, l’auto n’a pas de système de télédéverrouillage ni de climatiseur. On lui assure que la publicité ne mentionne pas cela; la consommatrice signe donc le contrat, convaincue qu’elle s’est trompée.
Sur le chemin du retour, elle réalise que la Jetta n’a pas non plus de rétroviseurs électriques, alors que la publicité mentionnait qu’ils étaient inclus. Stupéfaite, elle relit l’annonce et constate qu’elle avait raison sur toute la ligne. Le concessionnaire retire la publicité, mais il refuse de dédommager sa cliente.
Certes, cette femme a signé en sachant qu'il n’y avait pas de système de télédéverrouillage ni de climatiseur. Or, le juge estime que son processus décisionnel était déjà engagé au moment où elle l’a appris, et ce, sur la base de fausses informations. Le jugement mentionne qu’insister pour amener un client à céder est une pratique normale. « La situation diffère lorsque le consommateur est attiré par une publicité fausse ou trompeuse, et ce, même si le commerçant “corrige” l’information [dans les instants précédant] la conclusion du contrat », indique-t-il. Pour avoir commis une faute intentionnelle, Volkswagen Joliette est donc condamné à payer 1 000 $. (Jugement 705-32-016727-197 rendu en 2021.)
Garantie insuffisante
Lorsqu’un bris prématuré survient, on doit vous dédommager, même si la garantie est échue. Un consommateur s’est prévalu de ce droit après avoir acheté, en 2018, une camionnette Dodge Ram 2015 auprès de Blainville Chrysler Jeep Dodge. Un an plus tard, le moteur brise et doit être remplacé. La garantie du constructeur est échue et le coût des réparations (18 333 $) dépasse le plafond prévu par la garantie supplémentaire.
Jugeant qu’il s’agit d’un bris prématuré, le client exige du concessionnaire qu’il assume la différence. Ce dernier admet que le kilométrage n’est pas excessif et que le bris est inhabituel, mais il considère que l’acheteur aurait dû choisir une garantie supplémentaire adéquate. Le commerçant ajoute que les entretiens n’ont pas tous été faits, sans toutefois dire lesquels.
Le juge est formel : la garantie légale de qualité prévue par la Loi sur la protection du consommateur (LPC) prévaut, peu importe ce que dit la garantie du constructeur. La LPC prévoit en effet qu’un bien acheté doit servir pendant une durée raisonnable, ce qui n’a pas été le cas avec cette Dodge Ram. Le concessionnaire doit donc payer les 11 492 $ non couverts par la garantie supplémentaire. (Jugement 700-32-703266-195 rendu en 2023.)
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Situation stressante
En 2019, une cliente de Kia Sherbrooke demande au mécanicien du concessionnaire d’installer les pneus d’été sur son véhicule neuf, dont le contrat de location à long terme a été signé sur place quelques mois auparavant. L’employé l’informe alors qu’ils ont un défaut de fabrication et qu’ils sont donc dangereux. Ne voulant pas acheter de nouveaux pneus sans d’abord signaler officiellement le problème au concessionnaire et au constructeur, la consommatrice insiste pour qu’ils soient installés.
Deux mois plus tard, l’un d’eux éclate sur l’autoroute. Résultat : elle en achète de nouveaux et réclame au concessionnaire 700 $. Celui-ci refuse, alléguant que le véhicule a certainement roulé dans des nids-de-poule. Irritée, la cliente augmente sa réclamation à 5 000 $. Pour régler l’histoire, le concessionnaire lui propose 700 $ en précisant qu’il s’agit d’un acte de bonne volonté et non d’une admission de responsabilité. La femme refuse et s’adresse à la cour, où elle réclame 15 000 $ pour préjudice moral et perte financière.
Selon le juge, le stress vécu par la cliente résulte de ses propres choix. Parce qu’elle aurait pu, par exemple, continuer d'utiliser temporairement ses pneus d’hiver, la demande liée au préjudice moral est rejetée. Quant à l’aspect financier, le tribunal constate que l’offre du concessionnaire dépasse le prix des pneus (593 $), de sorte qu’il la considère comme suffisante. Il le condamne donc à payer 700 $, mais contrairement à tous les cas cités dans le présent article, il n’impose pas les intérêts ni les frais de justice – toujours autour de 110 $ ou 220 $ –, car le concessionnaire avait fait son offre avant que le litige ne se rende en cour. (Jugement 750-32-013292-191 rendu en 2021.)
Garantie pas réellement expirée
L’histoire se déroule en 2020, lorsque le consommateur se rend à Saguenay Volkswagen parce qu’un composant du moteur turbo de son auto est défectueux. Coût de la réparation : 3 441 $. Comble de malchance, on dit à ce client que la garantie est expirée depuis un mois et qu’il doit donc assumer 50 % du coût des réparations (1 721 $), ce qu’il fait. Or l’acheteur apprend par la suite dans les médias que, pour ce problème, certains propriétaires paient plutôt 25 % du prix. Il réclame donc le montant qu’il considère avoir payé en trop, soit 860 $.
Selon le juge, il est clair que le bris ne découle ni d’une mauvaise utilisation ni d’un défaut d’entretien. Il souligne par ailleurs qu’au moment où le client s’est plaint, la garantie était encore valide. Le fait que le constructeur ait été avisé du problème un mois après la date limite n’y change absolument rien. En principe, la garantie conventionnelle devrait donc couvrir la totalité du montant de réparation, mais puisque le consommateur a initialement réclamé 860 $, c’est ce montant que le concessionnaire et le constructeur sont condamnés à rembourser.
À noter : une demande d’autorisation d’action collective a été déposée au nom des propriétaires de Volkswagen ou d’Audi 2015-2020 avec moteur turbo; apprenez-en plus au adamsavocat.com. (Jugement 150-32-701349-207 rendu en 2022.)
La plupart des jugements mentionnés dans cet article ont été rendus en vertu des articles 37, 38, 41, de 219 à 237 (particulièrement l’article 224c), 253 et 272 de la Loi sur la protection du consommateur (LPC). Consultez le site web de l’Office de la protection du consommateur (OPC) pour voir des exemples de jugements concernant des véhicules neufs et des véhicules d’occasion.
4 conseils pour tirer votre épingle du jeu
• Si on vous fait des promesses verbales avant ou après l’achat, envoyez au commerçant un courriel qui résume ce qu’il a promis et demandez-lui de confirmer l’information.
• Réfutez les allégations de négligence qu’on pourrait tenter de vous attribuer en gardant vos preuves d’entretien, vos rapports mécaniques, vos factures détaillées des visites au garage, etc.
• En cas de bris, gardez des écrits qui prouvent que le problème a débuté avant la fin de la garantie.
• Déjouez les tactiques de vente en lisant nos conseils pour déjouer les tactiques des concessionnaires. Si vous constatez après coup qu’on vous a passé un sapin, évaluez vos recours grâce à notre article sur les litiges dans le monde de l'automobile et notre guide Comment se préparer pour la Cour des petites créances.
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