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Séparation: quelle incidence sur vos finances?

Par Perrine Gruson
Séparation: quelle incidence sur vos finances? Seahorse Vector/Shutterstock.com

Votre couple bat de l’aile, et vous vous demandez comment éviter certains pièges financiers et réussir le partage des avoirs? Voici des pistes pour vous guider quant aux pensions alimentaire et compensatoire, aux répercussions fiscales de la rupture ainsi qu’à ce qu’il y a à faire avec vos marges et cartes de crédit communes.

Si l’argent ne fait pas le bonheur, on dit néanmoins que les bons comptes font les bons amis… Lorsqu’une rupture se profile à l’horizon, penser au coût de la séparation et à ses conséquences sur les finances personnelles est un passage obligé.

Pierre-Anne a vécu une relation marquée par l’avarice et le manque de transparence financière, qui ont finalement mené à une rupture. Elle connaît donc les pièges financiers dans lesquels elle ne veut pas retomber et elle parle ouvertement d’argent avec son nouveau conjoint. Les deux partenaires savent le salaire de l’autre et font des projets en commun, contrairement à ce qui se passait dans son ancienne union.

Ne pas parler d’argent est l’un des pièges connus au sein des couples, et le fait d’effectuer des dépenses en cachette est un symptôme à ne pas négliger ici. Avoir des visions diamétralement opposées sur la façon de dépenser l’argent ou d’épargner peut aussi relever de l’incompatibilité financière.

Pour éviter de reproduire les erreurs du passé, notamment l’omission d’une planification financière, Pierre-Anne et son partenaire ont fait notarier leur patrimoine ainsi que leur situation, et ils ont mis sur papier le partage prévu en cas de séparation. Ils font partie de ces rares couples à le faire.

En effet, un sondage CROP réalisé en 2022 pour le compte de la Chambre de la sécurité financière auprès de 1 000 personnes révèle que si 90 % des personnes interrogées se disent à l’aise de parler d’argent dans le couple, la moitié des répondants n’ont jamais pensé aux conséquences d’une séparation. Comment donc se préparer financièrement à une rupture? Voici les principaux aspects auxquels il est essentiel de penser pour composer au mieux avec la situation.

Oui, se séparer coûte cher!

« Le coût financier d’une séparation est très important; tout finit par être en double [meubles, chambres, jouets, vêtements, etc.]. Si le couple a eu des enfants avant de se séparer, les logements doivent ensuite être assez grands, ce qui coûte cher. Il arrive souvent que les enfants n’aient pas le même niveau de vie chez le père que chez la mère », illustre Hélène Belleau, professeure titulaire au Centre Urbanisation Culture Société de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et auteure de plusieurs études sur le couple et l’argent.

À ses yeux, il est clair qu’avec l’augmentation du coût de la vie, de plus en plus de couples restent ensemble, alors qu’ils se seraient séparés si les partenaires avaient eu une plus grande marge de manœuvre financière. Parmi les dépenses à prévoir au moment d’une rupture, il y a bien sûr le logement, le mobilier et des factures à payer en solo. Il faut aussi repenser aux produits d’assurance et aux bénéficiaires, si l’ex en faisait partie. Les testaments, les comptes conjoints et le partage des biens sont également à revoir.

Vous envisagez de vous séparer, mais les conséquences financières de cette démarche vous semblent insurmontables? À une personne qui hésite à le faire par peur de la précarité, la conférencière en finances personnelles Véronique Joanis conseille de procéder à une autoévaluation de sa santé financière.

« Il faut vous demander quelle sera l’incidence de votre stress financier sur la famille, si vous en avez les moyens. Si jamais vous voyez que vous êtes incapable de gérer financièrement une séparation, vous devez vous mettre en mode solutions », explique celle qui est aussi enseignante au Cégep de Saint-Jérôme, dans le programme Techniques en travail social. Un exemple parmi tant d’autres : envisager une cohabitation temporaire avec l’ex-conjoint, le temps de trouver un scénario adapté, comme un emploi mieux rémunéré. Échanger avec des personnes qui ont vécu une séparation est également recommandé.

Le partage des biens et le patrimoine familial

Évidemment, à partir du moment où vous envisagez la séparation, le partage du patrimoine familial se retrouve au cœur des préoccupations. Comment les avoirs seront-ils divisés? Si vous étiez en union de fait, il n’y a pas de règle qui s’applique sur ce qui revient à l’un ou à l’autre; il faudra vous entendre à l’amiable, sauf, bien sûr, si vous avez signé un contrat de vie commune.

À supposer que vous soyez mariés ou unis civilement, c’est alors la règle du partage du patrimoine familial qui s’applique. La loi dresse une liste de biens inclus dans le partage familial, comme la maison, le mobilier et la voiture. Ceux-ci seront répartis équitablement entre les deux personnes au moment du divorce. Les avoirs qui ne figurent pas sur cette liste – pensons ici aux comptes bancaires, aux actions en bourse ou aux immeubles commerciaux – seront divisés en fonction du régime matrimonial inscrit sur le contrat de mariage.

Il existe trois régimes matrimoniaux au Québec : celui de la communauté de biens, la société d’acquêts ou encore la séparation de biens. Par exemple, dans le cas d’une séparation de biens, chaque conjoint conserve la valeur de ses biens et de ses dettes. La société d’acquêts permet également de posséder des biens propres, par exemple ceux acquis avant le mariage.

Il se pourrait aussi que ni l’un ni l’autre de ces régimes matrimoniaux ne vous concerne, si vous avez prévu d'autres dispositions dans votre contrat de mariage; il importe donc que vous vous référiez à ce dernier.

Les répercussions fiscales de la séparation

Ça y est, vous avez franchi le pas; votre union est derrière vous. La première étape consiste à aviser le gouvernement fédéral le mois suivant le changement d’état civil, puis le gouvernement provincial 90 jours après la séparation, et ce, que vous ayez été marié ou en union de fait. De nombreux crédits et allocations, calculés en fonction du revenu familial, sont ajustés au moment de la déclaration de revenus annuelle.

Si le couple est dissous, en informer les instances administratives permettra d’optimiser les calculs sur le revenu individuel, ce qui se révélera souvent plus avantageux. Les allocations familiales, en particulier, seront ajustées à la hausse.

« Il y a des incidences fiscales lors d’une séparation; elles sont différentes si vous êtes est marié ou conjoint de fait », nuance Sarah Phaneuf, comptable professionnelle agréée (CPA) et associée en fiscalité chez Raymond Chabot Grant Thornton. Il n’est pas toujours indispensable de voir un fiscaliste, mais à partir du moment où il y a des placements en commun, des immeubles locatifs, plusieurs propriétés ou des actions en jeu, une consultation avec ce professionnel peut aider à optimiser les répercussions financières de la rupture.

Sarah Phaneuf rappelle quelques ajustements à considérer selon la situation. D’abord, les parents séparés peuvent demander le crédit d’impôt pour personne à charge pour l’un des enfants, s’il y en a plusieurs. À souligner que, dans le cas où les ex-conjoints auraient un seul enfant, ils doivent s’entendre sur qui demandera le crédit, car le gouvernement ne l’accorde qu’à l’un des deux.

Pour ce qui est du partage du patrimoine familial, qu’il y ait mariage ou contrat de vie commune, dans ces deux cas, les règles fiscales seront les mêmes. « En revanche, pour des conjoints sans convention, il faudra faire une entente, et il y aura des complexités légales. Cela peut se faire à l’amiable, à l’aide d’un médiateur, ou encore en cour, mais tout dépend de ce qui est convenu entre les ex-conjoints », précise la CPA.

Cette dernière recommande d’ailleurs de conserver, si cela est possible, le même comptable pour les impôts de l’année de la séparation, en faisant des déclarations séparées. Le but : faciliter les demandes de crédits d’impôt, entre autres.

L’entente avec votre ex

Vous êtes au début du processus de séparation? Le ministère de la Justice propose des séances gratuites avec un médiateur pour résoudre les conflits sans avoir à passer devant les tribunaux. Des séances d’information sur la parentalité après la rupture sont aussi offertes.

Par ailleurs, aurez-vous à payer une pension alimentaire pour les enfants à l’autre parent? Le conjoint qui n’a pas la garde des enfants est tenu d’en verser une à son ex-conjoint, et ce, même si ce dernier a un revenu supérieur au sien. De plus, dans le cas d’une garde partagée, il se peut qu’un parent doive également contribuer financièrement en versant une pension alimentaire à l’autre parent. Le gouvernement du Québec propose à cet effet un outil servant à calculer le montant de la pension.

« L’élément à garder en tête est que les pensions alimentaires pour les enfants ne sont pas imposables pour la personne qui les reçoit », souligne Sarah Phaneuf, de Raymond Chabot Grant Thornton. En revanche, il se pourrait aussi que vous ayez à débourser une pension alimentaire pour maintenir le niveau de vie de votre ex-conjoint, une somme qui est imposable.

Sinon, il est possible que vous deviez engager des frais juridiques postrupture. Certains de ces frais sont déductibles d’impôts. Par exemple, ceux qui sont liés à la pension alimentaire – pour l’obtenir, ou encore pour demander une augmentation ou contester le montant – sont déductibles auprès du gouvernement du Québec. Quant à eux, les frais en lien avec le jugement de divorce ou la garde des enfants ne le sont pas.

Si vous avez été marié, sachez qu’il existe une prestation compensatoire, qui permet à un conjoint d’obtenir une compensation en argent ou en droit sur des biens, pour avoir contribué à enrichir – en biens ou en services – le patrimoine de son conjoint. Si elle est demandée, cette prestation est évaluée par le juge au moment du jugement de divorce. Dans le cas des conjoints de fait, une indemnité pour enrichissement injustifié peut parfois être accordée par un juge.

Tous ces programmes dépendent de votre profil; le site web gouvernemental JuridiQC pourra vous aiguiller à la lumière de votre situation.

Protéger vos intérêts

Une fois que vous êtes séparé de votre partenaire, vous devez aussi réviser les termes de vos contrats de cartes de crédit. Étiez-vous tous deux coemprunteurs de la carte, ou l’un de vous en était-il plutôt le titulaire principal et l’autre, un utilisateur autorisé?

Dans le premier cas, les deux conjoints sont responsables des dépenses réglées avec cette carte, tandis que dans le second cas, c’est le conjoint titulaire de la carte qui doit assumer le paiement du solde de la carte, et ce, « même s’il n’a jamais utilisé la carte et que les achats ont été effectués par l’utilisateur autorisé », rappelle JuridiQC.

Vous avez une marge de crédit commune? Les deux conjoints sont alors responsables des achats portés sur cette marge. Signifiez sans tarder à votre institution financière – et à votre ex-conjoint, par courrier recommandé – que vous ne l’utiliserez plus à l’avenir. Vous aurez toutefois à rembourser la portion de la dette accumulée avant la séparation (la même consigne s’applique à vos cartes de crédit communes).

À ne pas oublier


Le ministère de la Justice du Québec publie une foule d’informations au sujet de la gestion financière pour les couples mariés ou en union libre, notamment en cas de rupture. Voici neuf éléments auxquels il faut penser au moment d’une séparation.


1. Faire votre bilan financier et votre budget

2. Revoir vos engagements financiers communs

3. Changer vos mots de passe

4. Revoir vos procurations

5. Rediriger vos prélèvements automatiques et dépôts directs

6. Faire vos changements d’adresse

7. Communiquer avec vos assureurs

8. Mettre à jour votre testament

9. Aviser les agences du revenu

Famille recomposée : quelle incidence?

Peut-être envisagez-vous de partager votre vie avec un autre parent célibataire. Financièrement parlant, le choix de vivre en couple avec des enfants mérite une réflexion sérieuse. Une étude publiée en 2023 par la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke nous apprend en effet que les familles recomposées sont fiscalement les plus désavantagées. 

« La taxe à la recomposition familiale n’est pas un mythe. Lorsqu’on se remet en ménage avec quelqu’un et qu’on a des enfants, toutes les allocations vont être coupées, puisque c’est le nouveau revenu familial qui sera pris en compte dans le calcul, après un an de vie commune », explique Hélène Belleau. 

Un nouveau conjoint ne paiera pas forcément pour le service de garde d’enfants qui ne sont pas à lui. Il y a toujours la possibilité que le conjoint sans enfant offre une compensation financière à celui qui en a. De son côté, la chercheuse remet en question la responsabilité individuelle et suggère de repenser la fiscalité pour mieux considérer les réalités des familles recomposées : « On ne peut pas faire comme si les ménages recomposés sont une famille où les enfants sont communs aux deux conjoints », avance-t-elle. 

Dans le cas où vous pourriez former une nouvelle famille recomposée, Véronique Joanis conseille quant à elle de regarder chaque poste budgétaire et de choisir ensuite comment les diviser. « Il faut parler de gestion financière dès le début d’une relation, même avant de cohabiter. Vous aurez probablement des vacances, vous ferez des sorties communes; comment diviserez-vous les dépenses? Il faudra faire des compromis et lâcher prise. Tout dépend aussi du niveau d’engagement dans cette nouvelle relation », résume la conférencière et enseignante. 

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