Action collective: cinq chaînes d’ameublement paieront 1,45 million
Les détaillants de meubles Léon, Brick, Brault et Martineau, Ameublements Tanguay et ÉconoMax verseront 1,45 million de dollars pour des publicités illégales sur le crédit en magasin à la suite d’une entente à l’amiable intervenue avec Option consommateurs.
Vous êtes client de l’une de ces enseignes? Ne criez pas victoire trop vite: l’amende sera versée à une fondation.
L’entente approuvée par la Cour supérieure le 27 janvier dernier met un terme à une demande d’action collective déposée en février 2020 par Option consommateurs. La requête, pilotée par le cabinet Belleau Lapointe, reprochait à Léon, Brick, Brault et Martineau, Ameublements Tanguay et ÉconoMax de proposer des programmes de financement incitant leur clientèle à «acheter maintenant et payer plus tard», en contravention de la loi
Deux infractions
Selon Option consommateurs, cette pratique contrevient à l’article 244 de la Loi sur la protection du consommateur. Ce dernier prévoit que «nul ne peut, dans un message publicitaire concernant un bien ou un service, informer le consommateur sur le crédit qu’on lui offre, sauf pour mentionner la disponibilité du crédit de la manière prévue par le règlement».
Les publicités dénoncées auraient aussi transgressé l’article 80 du Règlement d’application de cette même loi. Cet article encadre sévèrement les moyens dont peut user un vendeur pour annoncer la disponibilité du crédit.
«Le problème, ce n’est pas le crédit en soi, mais plutôt le fait qu’on attire en magasin des gens qui n’ont pas forcément les moyens d’acheter et qui risquent le surendettement», résume l’avocate Sylvie De Bellefeuille, conseillère budgétaire et juridique chez Option consommateurs.
Une amende de 1,45 million de dollars
Son organisation réclamait, au nom des clients lésés, le paiement de dommages-intérêts punitifs de 85 $ sur toute transaction effectuée entre le 27 février 2017 et le 31 décembre 2020 en vertu d’un programme de type «achetez maintenant, payez plus tard».
Soucieuses d’éviter un procès, les parties concernées ont conclu le 24 septembre dernier une entente à l’amiable qui vient d’être approuvée par la Cour.
L’accord prévoit que les chaînes verseront une somme de 1,45 million de dollars (moins les frais judiciaires de 25 %) à la Fondation pour les consommateurs, un organisme sans but lucratif qui soutient financièrement les associations faisant de l’éducation financière et la promotion des droits des consommateurs. Ce règlement ne constitue toutefois pas une «admission de responsabilité, de faute ou d’un acte répréhensible» de la part des détaillants.
Option consommateurs et l’Union des consommateurs ne toucheront rien, insiste Me De Bellefeuille: «Ce sont surtout les ACEF qui vont bénéficier de cet argent.»
Rien pour les clients lésés
Pourquoi n’avoir prévu aucune indemnité pour les consommateurs s’estimant lésés? «S’il avait fallu indemniser chaque client, ça aurait donné des montants dérisoires variant entre 1,60 et 2 $ par personne. C’était illogique!, indique Me De Bellefeuille. De toute façon, ce qui était important pour nous, c’était le changement de pratique. C’était une condition sine qua non à toute négociation en vue d’une entente à l’amiable.»
Une fois l’accord conclu, confirme-t-elle, Léon, Brick, Brault et Martineau, Ameublements Tanguay et ÉconoMax ont cessé de diffuser toute publicité fondée sur le paiement différé dans les médias papier et en ligne, dans les circulaires et sur leurs sites web respectifs.
D’autres poursuites du genre pourraient-elles être engagées dans un proche avenir? «Nous avons récemment envoyé une mise en demeure à un autre grand détaillant en ameublement pour les mêmes motifs», indique Me De Bellefeuille, sans toutefois révéler le nom de la chaîne.
La pratique dénoncée par l’action collective existait depuis longtemps, et Léon est en quelque sorte un «récidiviste»: l’entreprise avait déjà été reconnue coupable en 2017 d’avoir violé la Loi sur la protection du consommateur en fondant son modèle d’affaires sur la promotion du paiement différé.
Il avait notamment été démontré que plus de la moitié des achats effectués chez Léon faisaient l’objet d’un programme de crédit prolongé.
La Cour d’appel du Québec avait confirmé l’essentiel du jugement en janvier 2020, mais réduit le montant des dommages-intérêts et des dommages-intérêts punitifs à payer. En octobre suivant, la Cour suprême avait refusé d’entendre les requêtes en appel soumises respectivement par Léon et par Option consommateurs, dont l’action collective avait été déposée en 2009.
Liés par l’entente
Si vous avez acheté un bien ou un service entre le 17 février 2017 et le 31 décembre 2020 auprès de l’un ou l’autre des marchands cités par l’action collective, en vous prévalant d’un programme de paiement en différé, vous êtes, par défaut, lié par cette entente et ne pourrez intenter de procédure judiciaire individuelle.
Du reste, il est maintenant impossible de vous soustraire à cette action collective puisque toute demande d’exclusion devait être déposée à la Cour supérieure au plus tard le 25 octobre 2021.
>> À lire aussi: Les actions collectives, comment ça fonctionne? et Vaut-il la peine d’étaler ses paiements quand on achète en ligne?
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