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«Instructions in English only»

Par Frédéric Perron Mise en ligne : 01 décembre 2007

 

«Les consommateurs de biens ou de services ont le droit d’être informés et servis en français», peut-on lire dans la Charte de la langue française. Après 30 ans d’existence, on pourrait croire que la fameuse «loi 101» est connue et respectée partout au Québec.

Or, ce n’est pas le cas; les infractions abondent dans le commerce de détail. Et quand on demande des explications, on a parfois l’impression de se faire jouer du violon...

Pour notre numéro de juin dernier, nous avons testé des sièges de vélo pour enfants. Les trois modèles les mieux cotés étaient accompagnés d’un manuel d’instructions en anglais seulement. D’après les distributeurs et les vendeurs, il s’agirait d’erreurs ou d’oublis. Rappelons que, selon l’article 51 de la Charte, «toute inscription sur un produit, sur son contenant ou sur son emballage, sur un document ou objet accompagnant ce produit, y compris le mode d’emploi et les certificats de garantie, doit être rédigée en français».

Quand nous avons testé les routeurs sans fil pour notre numéro de septembre, les instructions incluses sur les cédéroms d’installation étaient, encore une fois, en anglais seulement dans la plupart des cas. Les fabricants fautifs nous ont dit qu’ils apporteraient les correctifs nécessaires... À l’occasion d’une visite dans un magasin de jouets de Montréal en août dernier, nous avons trouvé plusieurs jouets dont l’emballage était en anglais seulement.

«Quand on n’a pas l’équivalent en français, c’est difficile de faire autrement, explique Georges Rumley, copropriétaire du commerce. On peut faire pression sur le distributeur pour obtenir des emballages qui comportent du français, mais on n’a pas beaucoup de poids en tant que boutique.» Des lecteurs nous ont aussi signalé des problèmes semblables. Par exemple, Laurent Asselin a acheté un lave-vaisselle Frigidaire dont les instructions et le panneau de commande sont exclusivement en anglais. Selon M. Asselin, cela démontre que la clientèle de langue française a peu d’importance pour cette compagnie.

 

Selon nos tests, le siège de vélo CoPilot Limo est un excellent produit. Malheureusement, le seul manuel d’instructions que nous ayons trouvé dans la boîte était en anglais...

 

Chaque mois, en collaboration avec nos lecteurs, nous mettons la main sur des instructions ou des emballages mal traduits.

Dans ce cas-ci, mieux vaut se fier à l’anglais!

Photos: Réjean Poudrette

La mondialisation de l'anglais
«Voilà 30 ans, l’affichage commercial représentait près de 80 % des plaintes, alors qu’aujourd’hui c’est autour de 10 à 15 %, dit Gérald Paquette, porte-parole de l’Office québécois de la langue française (OQLF).Aujourd’hui, ce sont surtout les produits de consommation qui posent problème. La mondialisation a amené ici beaucoup de produits sans inscription française ou encore dans un français tellement douteux que les gens doivent lire la version anglaise pour comprendre.» L’OQLF a pour mission d’assurer le respect de la Charte de la langue française. Il reçoit environ 3500 plaintes par année, dont la moitié porte sur la langue des produits (étiquetage, modes d’emploi et certificats de garantie) et celle des dépliants, catalogues et annuaires commerciaux.

La grande majorité des problèmes sont réglés par des discussions avec les entreprises fautives. Dans certains cas, le dossier est transmis au Procureur général du Québec, qui peut intenter des poursuites. Par exemple, en 2006, Bureau en gros s’est vu imposer neuf amendes de 5000 $ (un montant réservé aux récidivistes) pour des infractions à l’article 51.

 

La pochette d’un DVD peut être écrite en anglais si le film est offert seulement dans cette langue. Si le film contient une bande sonore ou des sous-titres en français, la pochette doit comporter des inscriptions en français.

Or, en quelques minutes, on peut trouver plusieurs produits non conformes chez un détaillant de DVD.

Jusqu’en septembre dernier, le fabricant de jouets américain Melissa & Doug distribuait ses jouets dans un emballage en anglais seulement.

Depuis, la plupart de ses produits sont présentés en français au Québec. «C’était dans nos plans, avec ou sans loi. Si on veut que nos jouets se vendent bien ici, mieux vaut les offrir en français», affirme Andrei Mannheim, responsable des ventes pour la compagnie au Québec

Le cas des électroménagers
Dans certains secteurs, dont les électroménagers, l’Office québécois de la langue française intervient auprès des distributeurs et des fabricants plutôt que des détaillants. Sur plusieurs appareils électroménagers, on trouve des panneaux de commande en anglais seulement, ce qui contrevient à la loi. Selon l’OQLF, de 75 à 80 % des électroménagers en vente au Québec en 1977 portaient des inscriptions en français, alors que ce pourcentage ne dépasse pas 25 % aujourd’hui.

La fermeture de nombreuses usines québécoises où on fabriquait des électroménagers expliquerait cette situation. «Quand l’entreprise est à l’extérieur du Québec, c’est plus difficile de la convaincre de franciser ses produits, constate Gérald Paquette. Si elle arrive à bien vendre ses produits en anglais, elle ne voit pas la nécessité de le faire.»

La compagnie Whirlpool, qui fabrique aussi les appareils de marque Maytag, Amana, KitchenAid et Jenn-Air, risque d’être difficile à convaincre car, à son avis, elle respecte la loi. Selon M. Paquette, l’entreprise fait en effet appel à une exception du règlement à propos des inscriptions gravées sur les produits. «Mais selon nous, il s’agit tout simplement d’imprimerie sur une pellicule plastique, dit-il. Nous avons réussi à convaincre certaines entreprises que ces inscriptions n’étaient pas gravées et qu’elles pouvaient être modifiées.»

 

Les inscriptions sur les panneaux de commande des électroménagers sont souvent écrites exclusivement en anglais, ce qui contrevient à la loi québécoise, selon l'Office québécois de la langue française.

Et les jeux vidéo?
L’OQLF a aussi visé le secteur du jeu vidéo ces dernières années. Selon la loi, tout logiciel qui existe en français doit être offert dans cette langue. Or, jusqu’à tout récemment, bien des jeux vidéo étaient vendus en français en France, mais seulement en anglais au Québec. En septembre dernier, l’OQLF a conclu une entente avec l’Association canadienne du logiciel de divertissement. Ainsi, tous les jeux d’ordinateur qui existent en français devraient maintenant être vendus dans cette langue. Pour ce qui est des jeux de console, les éditeurs ont jusqu’au 1er avril 2009 pour se conformer à la loi.

 

La pochette de ce jeu vidéo étant bilingue, on pense qu’il inclut une version française. Or, le texte qui apparaît à l’écran est exclusivement en anglais.

Vous devrez donc – du moins jusqu’en avril 2009, date butoir pour que les éditeurs de jeux vidéo se conforment à la loi – traduire mot à mot l’aventure à votre bambin.

Pour porter plainte
L’Office québécois de la langue française
 intervient surtout à la suite de plaintes. Votre participation est donc importante si vous voulez continuer à être servi et informé en français. Pour en savoir plus sur vos droits et sur la démarche à suivre pour porter plainte, communiquez avec l’OQLF: 1-888-873-6202 ou [email protected]