Comment choisir son comptable
Produire vos déclarations de revenus vous donne le tournis? Demander les services d’un comptable professionnel agréé (CPA) peut vous soulager de cette corvée, en plus d’être un gage de protection. Or est-ce toujours nécessaire pour les impôts? Par ailleurs, quels autres services ce professionnel est-il en mesure d’offrir? Voici des pistes pour vous aider à choisir un comptable en fonction de vos besoins.
Faire ses impôts peut se révéler une tâche fastidieuse, surtout quand les sources de revenus, les crédits d’impôt ou encore les déductions s’accumulent. « La fiscalité au Canada et au Québec, on ne se le cachera pas, c’est complexe », confirme Pierre-Etienne Pilote, professeur adjoint au Département des sciences comptables de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG UQAM). C’est pour cette raison que de nombreuses personnes confient cette besogne à un comptable.
Or le titre de « comptable » n’est pas protégé par la loi. Ainsi, n’importe qui peut se prétendre comptable et proposer ses services, que cette personne ait les compétences liées à l’emploi ou non. En revanche, le titre de comptable professionnel agréé (CPA) est réservé aux membres de l’Ordre des CPA du Québec.
Pourquoi faire affaire avec un comptable professionnel agréé ?
Difficile – voire impossible – pour le commun des mortels d’évaluer les réelles compétences d’un individu en matière de fiscalité et de planification financière, comme le souligne Pierre-Etienne Pilote. Comment savoir si cette personne a bel et bien maximisé les bénéfices auxquels vous avez droit? C’est là une raison suffisante pour faire appel à un membre d’un ordre professionnel, dont la pratique est encadrée, selon le professeur.
Avant de pouvoir porter le titre de CPA, un tel expert doit avoir obtenu un baccalauréat (ou un cumul de certificats) reconnu en administration des affaires ou en sciences comptables, puis suivi un programme de deuxième cycle donné par l’Ordre ou par une université accréditée; effectué un stage de 24 mois; et, enfin, réussi un examen commun à tous les parcours.
Par ailleurs, pour conserver leur titre, les CPA sont tenus notamment de respecter un code de déontologie et de maintenir leurs connaissances à jour avec de la formation continue. Surtout, ils détiennent une assurance de responsabilité professionnelle.
« Vous pourrez avoir recours à l’Ordre si jamais votre comptable professionnel agréé fait une erreur ou arrête de vous répondre, si vous suspectez une fraude ou autre », illustre Geneviève Mottard, présidente et cheffe de la direction de l’Ordre des CPA du Québec.
En tant que contribuable, sachez que vous êtes toujours responsable de vos déclarations de revenus auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC) et de Revenu Québec. Néanmoins, si vous jugez que vous avez subi des dommages pécuniaires à la suite d’une faute professionnelle, il vous est possible de présenter une demande de réclamation au Fonds d’assurance de la responsabilité professionnelle des CPA du Québec.
Par contre, l’Ordre n’a aucun pouvoir en situation d’erreur, de négligence ou de fraude commise par une personne qui se dit comptable, mais qui n’est pas CPA. En cas d’ennuis avec un tel individu, il vous faudra vous tourner vers les tribunaux. « On en a entendu, des histoires crève-cœur! » affirme Geneviève Mottard. Elle ajoute que « si la personne se prétend CPA, ça, c’est autre chose; on peut poursuivre des gens pour pratique illégale. »
Enfin, pensez-y à deux fois avant de remettre vos déclarations de revenus entre les mains de n’importe qui trouvé sur Google, aussi professionnel semble-t-il. « Vous confiez tous vos renseignements personnels à quelqu’un : votre numéro d’assurance sociale, votre revenu, votre employeur, votre date de naissance, votre adresse... », rappelle Geneviève Mottard. Ainsi, vous vous exposez à des risques de vol d’identité si la personne est mal intentionnée ou simplement négligente avec ces données critiques.
Vérifiez le titre professionnel
Pour vérifier si une personne porte bel et bien le titre de CPA, consultez le tableau de l’Ordre des CPA du Québec.
Si vous souhaitez aller plus loin, sachez que les décisions du conseil de discipline de l’Ordre sont accessibles au grand public, de même que les décisions juridiques plus largement. Voici deux plateformes pour les consulter :
- Société québécoise d’information juridique (SOQUIJ)
- Institut canadien d’information juridique (CanLII)
En avez-vous vraiment besoin?
De l’avis de Pierre-Etienne Pilote, se tourner vers un CPA est toujours un bon choix, notamment quand vient le temps de remplir ses déclarations de revenus. Cependant, est-ce tout le monde qui a besoin de le faire? Il ne le croit pas nécessairement. Selon lui, de nombreux contribuables aux situations fiscales simples peuvent se charger eux-mêmes de remplir leurs déclarations, même s’ils n’ont a priori pas de compétences particulières en comptabilité; avec l’aide d’un logiciel d’impôt, préférablement.
Même s’il demande à ses étudiants de faire des déclarations à la main, afin qu’ils en comprennent bien toutes les subtilités, le professeur ne recommande pas pour autant aux contribuables de s’adonner à un tel exercice, pour la simple et bonne raison que « les logiciels, dans l’ensemble, sont bien faits; ils se sont améliorés au fil du temps et continuent d’évoluer ». Le spécialiste se réjouit notamment d’y voir de plus en plus d’explications pour guider les utilisateurs. « Est-ce qu’il faut valider les informations et s’assurer que tout est en ordre? Oui. Il faut prendre le temps de bien lire, aussi », nuance-t-il toutefois.
Bien entendu, vous informer sur les sites web de l’ARC et de Revenu Québec en parallèle, entre autres à propos des déductions et des crédits d’impôt qui concernent votre cas, est idéal. L’Ordre des CPA du Québec publie aussi un guide numérique à ce sujet, vendu au coût de 25 $.
Les salariés qui reçoivent un T4 ainsi qu’un relevé 1 et qui possèdent quelques véhicules d’épargne et produits de placements simples sont de bons candidats à l’emploi d’un logiciel, selon Pierre-Etienne Pilote. Le défi se complexifie pour ceux qui ont des enfants, en raison notamment des allocations familiales, mais l’objectif est encore « atteignable », d’après le professeur. À l’autre bout du spectre, une petite ou moyenne entreprise (PME) devrait toujours se tourner vers un CPA.
Et qu’en est-il des travailleurs autonomes? « Si votre situation n’est pas trop complexe, il y a quand même moyen de bien faire », estime l’expert. Cela est encore plus réaliste si vous prenez soin de vous informer des diverses spécificités de votre secteur d’activité. Pensez aussi aux dépenses admissibles que vous pouvez amortir sur plusieurs années. Certains logiciels, dont ImpôtExpert (de l’entreprise canadienne Thomson Reuters) et TurboImpôt (de l’américaine Intuit) – les « meilleurs choix » année après année de Protégez-Vous –, conviennent aux travailleurs autonomes.
De son côté, Geneviève Mottard recommande l’aide d’un CPA, en particulier aux travailleurs autonomes, mais plus largement à tous les contribuables. « Un logiciel, c’est un outil qui peut être bon, mais ça ne va jamais remplacer le jugement d’un professionnel, fait-elle valoir. Vous ne pouvez pas vous attendre à ce que les logiciels maximisent votre fiscalité. »
Pierre-Etienne Pilote croit qu’il s’agit également d’une question de paix d’esprit pour plusieurs, qu’ils aient ou non des compétences en matière d’impôt : « Si ça vous décharge d’un fardeau ou que ça vous rassure de confier vos déclarations à un professionnel, tant mieux! »
Au-delà des impôts
Le travail du CPA ne se limite cependant pas à l’impôt. Ce professionnel est aussi en mesure de vous aider dans de multiples situations qui concernent les finances personnelles et la fiscalité, par exemple quand vient le temps de dresser un plan de décaissement à votre retraite; de gérer vos placements; de faire un budget ou vos prévisions financières; d’évaluer la pertinence d’acquérir des biens immobiliers; d’optimiser vos revenus locatifs… Il peut également vous accompagner lors d’un redressement financier ou agir comme médiateur aux petites créances.
« On a des gens qui sont experts en fiscalité, en audit ou en planification financière », précise Geneviève Mottard. Pour trouver un CPA qui saura répondre à vos besoins précis, tournez-vous vers le bottin de l’Ordre. Il vous est possible de filtrer votre recherche en fonction de la région et du type de clientèle desservie dans un premier temps, puis de l’expertise recherchée dans un second temps.
En matière de planification financière, Pierre-Etienne Pilote mentionne aussi l’existence du titre protégé de planificateur financier (Pl. Fin.). Un diplôme spécifique de l’Institut de planification financière est nécessaire pour s’en servir. Certains CPA possèdent également ce titre, puisque la formation de base reconnue peut être la même.
Quel est le prix moyen d’un comptable?
Engager un CPA a un coût qui varie en fonction de votre région, du professionnel ou du cabinet mandaté et, bien sûr, de votre situation; plus cette dernière est complexe, plus la facture gonfle. Taux horaires, montants forfaitaires ou par feuillet fiscal dans le cas de l’impôt : toutes les configurations existent, mais ces tarifs ne sont encadrés ni par la loi ni par l’Ordre, comme l’explique Geneviève Mottard.
D’après un CPA travaillant dans le cabinet d’une firme comptable de Montréal qui a préféré nous parler sous le couvert de l’anonymat, les tarifs d’un tel professionnel varient habituellement entre 80 et 300 $ de l’heure. Si votre cas demande une spécialisation en fiscalité ou en planification financière, prévoyez alors minimalement un taux horaire de 100 à 150 $, selon lui.
Et pour les impôts, quel montant faut-il envisager? Pour les déclarations de revenus d’un salarié, le tarif de base tourne habituellement autour de 225 à 250 $. Malgré cela, certains pourraient demander moins cher, par exemple 100 $ ou 125 $, comme c’est le cas d’un CPA en Montérégie qui a accepté de nous fournir ses tarifs. Un CPA de Québec qui a quatre employés nous a quant à lui signalé qu’il facturait 165 $ pour ce service. À supposer qu’il s’agisse d’un travailleur autonome – pensons ici à un pigiste dont la tenue de livres est faite (factures et dépenses compilées) –, 90 $ s’ajoutent alors, pour un total de 255 $. Si le CPA en Montérégie demande plutôt de 180 à 225 $ dans un pareil scénario, le montant de la facture oscille généralement entre 300 et 400 $ en moyenne, de l’avis de celui de Montréal.
Toutefois, attention : ce dernier tient à préciser que ces tarifs varient énormément en fonction d’une foule de détails, et que vous pourriez débourser bien plus.
« Vous avez le droit de demander une estimation gratuite des coûts par écrit pour les services dont vous avez besoin, spécifie Geneviève Mottard. Et plus vous allez donner d’informations sur votre situation, mieux le CPA va être en mesure de vous indiquer le coût de ses services. » Bref, n’hésitez pas à en contacter plusieurs avant de faire votre choix.
En comparaison, la firme Raymond Chabot Grant Thornton nous a dirigés vers le service simplifié de déclarations de revenus en ligne qui lui est affilié, Impo. Or, bien qu’ils aient reçu une formation, les « pros de l’impôt » qui y remplissent les déclarations et accompagnent les contribuables ne sont ni CPA ni chapeautés par l’un d’eux, comme le rapporte Marie Pierristil, directrice du Centre relation client. Autrement dit, ce service entre plutôt dans la catégorie des préparateurs d’impôt (H&R Block, par exemple).
« On s’assure toujours que les déclarations sont faites selon les règles de l’art, indique Marie Pierristil. Par contre, si, pour une raison X, on a fait une erreur de notre côté dans un dossier et que, par exemple, il y a des pénalités ou des frais d’intérêt du côté du client, on va assumer les frais. » Cela dit, elle rappelle que le contribuable est responsable de fournir les bonnes informations, d’être transparent, de répondre adéquatement aux questions posées et de vérifier sa déclaration. « C’est un travail d’équipe », résume-t-elle.
À titre indicatif, voici un tableau qui compare les tarifs approximatifs des CPA aux tarifs et coûts d’autres solutions, soit le préparateur d’impôt Impo et deux logiciels reconnus.
Comparaison des coûts et tarifs de services pour les impôts (déclarations de revenus de base)
Logiciel d’impôt* | Préparateur d’impôt** | CPA*** | |
Salarié | De 21 à 40 $ | 130 $ | De 100 à 250 $ |
Travailleur autonome (tenue de livres faite) | De 21 à 60 $ | 195 $ | De 180 à 400 $ |
Famille de deux salariés avec deux enfants de moins de 18 ans qui n’ont pas payé d’impôt | De 54 à 80 $ | 245 $ | De 200 à 500 $ |
Famille composée d’un salarié et un travailleur autonome, et deux enfants qui n’ont pas payé d’impôt | De 54 à 100 $ | 320 $ | De 300 à 650 $ |
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