Montres intelligentes et appareils cardiaques : la prudence s’impose

La revue scientifique Heart Rhythm publie dans son édition de février 2023 les résultats d’une recherche mettant en garde les utilisateurs d’appareils intelligents sur les risques d’interférences avec un stimulateur cardiaque ou un défibrillateur.

« Il existe deux grandes catégories d’appareils cardiaques », explique le D^r Peter Guerra, chef du département de médecine spécialisée et de cardiologie de l’Institut de Cardiologie de Montréal (ICM) :

• Le stimulateur cardiaque (pacemaker), qui envoie une petite impulsion électrique au cœur lorsque celui-ci est trop lent, voire lorsque les battements de cœur sont totalement absents. Il fait donc se contracter le muscle cardiaque.
• Le défibrillateur, qui donne un choc électrique pour rétablir le cœur à la normale lorsqu’une personne fait un arrêt cardiaque causé par un rythme cardiaque très élevé. Ce dispositif a aussi la fonction de pacemaker et peut donc réanimer et faire battre le cœur.

« N’importe quel appareil qui émet un courant électrique ou un champ magnétique peut causer une interférence avec les appareils cardiaques. On parle des téléphones intelligents, mais aussi des plaques à induction ou des montres intelligentes », mentionne le D^r Guerra.

Comment se produisent ces interférences ?

N’importe quel « bruit » externe (un champ magnétique ou électrique) peut être interprété par le pacemaker et le défibrillateur, et avoir des conséquences sur la santé.

Le risque pour le porteur d’un pacemaker, c’est que, lorsque l’appareil détecte une activité électrique, il ne stimule pas le cœur puisqu’il « pense » que ce dernier est actif, en raison de l’activité détectée. Et s’il ne fonctionne plus, la vie de la personne peut être en danger.

Le risque pour le porteur d’un défibrillateur, c’est que, si l’appareil détecte une activité magnétique ou électrique, il « pense » que le cœur fait un arrêt ; il envoie alors un choc électrique fort qui n’est pas approprié puisque la personne n’en a pas besoin. Le champ magnétique peut même arrêter la fonction du défibrillateur, puisqu’il agit comme un aimant.

Deux éléments déterminent le niveau de risque : l’intensité du champ électrique ou du champ magnétique ; puis la distance entre ce champ et l’appareil, qui est généralement implanté en dessous de la clavicule gauche du patient.

Gardez vos distances

Pour éviter les interférences, il est important que le dispositif cardiaque soit suffisamment éloigné de l’appareil qui peut interférer avec lui. « Pour une plaque à induction, on suggère de rester à une distance de deux pieds. Pour un téléphone intelligent, on recommande aux gens de ne pas mettre leur téléphone dans la poche de chemise ou de veston sur le côté gauche, là où se trouve le pacemaker, et de s’en servir du côté droit (main et oreille) », poursuit le D^r Guerra. Si le rapprochement est bref, le danger est moindre.

Le cardiologue donne deux conseils :

• Si vous voulez être super prudent, ne portez pas de montre intelligente. Le conseil s’applique même pour les sportifs : les données que fournit la montre sont peut-être plaisantes, mais elles ne sont pas utiles pour le médecin. En effet, l’appareil cardiaque est déjà doté d’une mémoire qui enregistre toutes sortes d’informations de manière beaucoup plus détaillée qu’un téléphone intelligent. Si votre médecin a besoin de données, ce sont celles-ci qu’il va regarder.
• Validez l’utilisation de n’importe quel appareil, dont la montre intelligente, auprès du personnel de la clinique qui fait votre suivi de pacemaker ou de défibrillateur. Ce sont les plus à même d’évaluer les risques et de vous conseiller.

Le spécialiste ajoute que des études approfondies sont nécessaires pour bien saisir les risques que représentent ces interférences ; il précise que les appareils évoluent sans cesse, ce qui demande un suivi permanent.