Stratégie nationale de sécurité routière : Québec va serrer la vis
Le gouvernement du Québec vient de publier sa Stratégie nationale de sécurité routière 2023-2028. Au menu : une panoplie de mesures coercitives pour compliquer la vie des automobilistes délinquants.
La ministre des Transports et de la Mobilité durable et vice-première ministre Geneviève Guilbault a annoncé cette semaine la Stratégie nationale de sécurité routière, dotée d'un budget de 186 millions de dollars. Il s’agit d’une série de mesures qui vont dicter les politiques et les dépenses du gouvernement liées au transport d’ici 2028.
L’objectif est simple : à travers cette stratégie nationale, le gouvernement du Québec veut mieux protéger les usagers les plus vulnérables du réseau routier, les piétons et les cyclistes (surtout les plus jeunes et les plus âgés) ainsi que les motocyclistes.
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Le modèle « Vision Zéro »
Québec dit vouloir s’inspirer du modèle Vision Zéro adopté en premier par la Suède en 1997 et dont on peut résumer simplement le contenu : le seul nombre acceptable de décès sur les routes est… zéro.
Dans un contexte où la route est partagée par une variété grandissante de modes de transport, c’est tout un défi. D’autant que cette stratégie nationale est annoncée alors que, depuis trois ans, on assiste au Québec à une hausse des graves accidents de la route.
La province n’est pas la seule aux prises avec ce problème. La même chose survient actuellement aux États-Unis.
« Certains conducteurs ne respectent pas les règles du Code de la sécurité routière, constate le gouvernement du Québec, comme les limites de vitesse ou la signalisation, ce qui met en danger les piétons, et en particulier les enfants. » Les manœuvres dangereuses, le non-respect des passages pour piétons et le stationnement illicite contribuent à l’insécurité routière, tout particulièrement là où se trouvent des écoles, des commerces ou des lieux visités par des piétons.
Québec estime aussi que les conducteurs de camions commerciaux ont besoin d’une meilleure formation avant de prendre le volant. En 2022, ils sont impliqués dans un décès sur quatre sur les routes du Québec, soit 95 accidents mortels sur un total de 392.
Bref, on a identifié des problèmes clairs. Et les solutions envisagées sont essentiellement contraignantes et pénalisantes.
L’approche, qui est surtout une stratégie «bâton », repose sur trois champs d’action :
- le réaménagement des infrastructures routières ;
- le comportement des conducteurs imprudents, maladroits ou délinquants ;
- la sécurité des véhicules eux-mêmes.
Réaménager les infrastructures routières
Dans les zones urbaines plus denses, Québec propose de rétrécir les voies pour ralentir la circulation automobile. La limite de vitesse dans les zones scolaires est de 30 km/h, mais elle est rarement respectée. On installera davantage de dos d’âne. De plus, on compte aussi surélever les intersections achalandées pour forcer les véhicules à ralentir. On élargira également les trottoirs et les pistes cyclables.
Ça ne fera pas l’affaire de tous. Les voies rétrécies réduisent en effet la disponibilité des espaces de stationnement sur rue. Bien des résidents qui vivent à proximité d’un dos d’âne ou d’une voie surélevée déplorent la hausse du bruit provoqué par les véhicules qui ralentissent avant de franchir l’obstacle.
Québec compte par ailleurs construire davantage de ponts et de passerelles pour séparer les différents modes de transport là où c’est jugé plus sécuritaire.
Sur certaines routes secondaires, on envisage d’installer une barrière centrale à glissière composée de câbles à haute tension. Un essai concluant a été fait sur l’autoroute 50 dans l’ouest de la province ces dernières années. En Suède, des glissières ont été installées sur 4000 km, ce qui a réduit considérablement le nombre de décès et de blessés graves sur les routes.
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Pénaliser les comportements inadaptés
Les conducteurs qui ne respectent pas le code de la route seront punis plus sévèrement. Les amendes seront majorées. On attribuera davantage de points d’inaptitude dans le cas d’infractions qui surviennent dans des lieux plus sensibles, comme près des écoles ou dans les quartiers résidentiels.
Un défi colossal attend les agents de la sécurité routière : ils héritent du mandat d’imposer des sanctions aux automobilistes qui ne se montreront pas assez prudents à l’approche d’un passage pour piétons (où ceux-ci ont la priorité, ce qui est rarement respecté par les automobilistes québécois), ou qui dépassent des cyclistes en les serrant de trop près.
Les chantiers ont droit à une attention toute particulière, mais les mesures proposées semblent surtout se concentrer sur une meilleure sensibilisation des automobilistes, pour qu’ils soient plus prudents à l’approche des chantiers, afin de mieux protéger les travailleurs présents sur place.
Le gouvernement veut aussi adopter plus de radars photo, et de différents types. Il compte adopter des appareils mobiles pouvant être actionnés à distance dans le but de faire respecter les limites de vitesse en zone scolaire, près des chantiers et ailleurs sur le réseau routier.
Québec aimerait également installer des radars photo capables de s’ajuster quand la limite de vitesse varie sur une route donnée. C’est souvent le cas dans les zones scolaires, où la vitesse permise passe de 50 km/h à 30 km/h à certaines heures durant les journées d’école.
Concernant les autoroutes, la Stratégie nationale de sécurité routière mentionne la présence de radars photo capables d’estimer la vitesse moyenne des véhicules sur une longue distance. Ces radars éviteraient que les automobilistes ralentissent subitement à l’approche d’un radar photo avant d’accélérer ensuite à une vitesse supérieure à la limite légale.
Québec ne dit pas si les forces policières seront elles aussi moins tolérantes par rapport à la vitesse moyenne sur l’autoroute, où la plupart des véhicules circulent au-delà des 100 km/h normalement permis.
Améliorer la sécurité des véhicules
Québec veut rendre les véhicules plus sûrs et plus intelligents. Une mesure simple avancée est de faire un usage plus régulier de l’affichage variable, comme ces énormes panneaux électroniques installés à différents endroits stratégiques sur les autoroutes de la province et qui avertissent des conditions routières à venir.
Le ministère des Transports et de la Mobilité durable compte également sur l’apparition de technologies de communication entre les infrastructures routières et les véhicules connectés pour rendre les déplacements plus sécuritaires. On espère mener des projets pilotes et des bancs d’essai afin de stimuler l’innovation à ce chapitre.
Enfin, comme cela a déjà été annoncé, on portera une attention toute particulière aux nouveaux modes de transport personnel motorisés, par exemple les trottinettes électriques et les différents appareils gyroscopiques.
La stratégie nationale 2023-2028 est ambitieuse. Elle sera accompagnée d’une importante campagne de sensibilisation pour informer le public québécois des changements, qui seront apportés au réseau routier au cours des cinq prochaines années.
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