Un indice de réparabilité des biens pour contrer l’obsolescence programmée
À l’étranger, la règlementation évolue afin de contraindre les entreprises à être plus vertueuses et transparentes quant à la réparabilité de leurs produits. C’est le cas en France. Bientôt au tour du Québec?
En France, depuis le 1er janvier 2021, un indice de réparabilité a été déployé sur cinq catégories de produits électroménagers et électroniques. Cet outil est prévu dans la loi antigaspillage pour une économie circulaire du gouvernement français dont les objectifs sont clairs : sortir du plastique jetable, mieux informer les consommateurs, lutter contre le gaspillage et pour le réemploi solidaire, agir contre l’obsolescence programmée et mieux produire.
L’affichage de l’indice de réparabilité vise clairement à lutter contre l’obsolescence programmée, selon le législateur français. Concrètement, depuis le début de l’année, une note sur 10 est affichée sur cinq catégories de produits : lave-linge à hublot, téléphones cellulaires, ordinateurs portables, téléviseurs et tondeuses à gazon électriques.
Exemple d’indices de réparabilité apposés sur les 5 catégories de produits en France. Source : MTE
Cette information « sensibilise les consommateurs sur la possibilité d’allonger la durée de vie et d’utilisation de leurs appareils, notamment en orientant leurs comportements d’achat vers des produits plus facilement réparables et en les incitant à recourir davantage à la réparation en cas de panne ».
L’indice constitue par ailleurs « un outil de lutte contre l’obsolescence – programmée ou non – pour éviter la mise au rebut trop précoce des produits et préserver les ressources naturelles nécessaires à leur production », précise le ministère français de la Transition écologique sur son site internet. Enfin, le score vise « à inciter les fabricants à intégrer dès la conception de leurs produits des critères de réparabilité ».
Un indice bâti comme celui de Protégez-Vous
La méthode utilisée en France pour bâtir l’indice s’appuie sur des critères semblables à ceux que Protégez-Vous utilise pour établir sa propre cote de réparabilité, par exemple sur les barbecues.
4 critères principaux sont retenus :
- La documentation : reflète l’engagement du producteur à rendre disponibles gratuitement, en nombre d’années, des documents techniques auprès des réparateurs et des consommateurs ;
- La facilité de démontage du produit, le type d’outils nécessaires et les caractéristiques des fixations ;
- La disponibilité des pièces détachées : reflète l’engagement du producteur sur la durée de disponibilité des pièces détachées et sur leur délai de livraison ;
- Le rapport entre le prix de vente des pièces détachées et le prix du produit.
S’ajoutent à cela des sous-critères spécifiques aux différentes catégories de produits concernés.
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Le Québec emboîte le pas?
La règlementation évolue plus lentement au Québec. En 2019, le projet de loi 197 sur l’obsolescence programmée – préparé par 51 étudiants en droit de l’Université de Sherbrooke et présenté par le député indépendant Guy Ouellette – a eu le grand mérite de mettre sur la « map » politique la question de la durabilité des biens de consommation.
Depuis, le projet de loi a suivi son petit bonhomme de chemin et a fait l’objet d’une adoption de principe à l’assemblée nationale le 13 avril dernier, à l’unanimité des députés présents, y compris, donc, ceux de la CAQ.
Parallèlement, l’Office de la protection du consommateur a lancé en 2020 des consultations publiques sur la durabilité, la réparabilité et l’obsolescence des biens de consommation dans le but de formuler des recommandations pour un futur projet de loi.
Le gouvernement s’appuiera-t-il sur le projet de loi 197 pour faire entrer le principe de réparabilité des biens dans la législation québécoise ou déposera-t-il son propre projet de loi ? Le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, est encore en réflexion : « Quoique le principe du projet de loi 197 soit intéressant, le gouvernement voudra y apporter sa touche », a-t-il expliqué en commission parlementaire, le 27 avril dernier. Il a par ailleurs précisé que le fruit des consultations de l’OPC ne sera pas rendu public, l’Office ayant tenu des rendez-vous « dans un contexte privé ». Cependant, des auditions publiques seront organisées lorsque le projet de loi sera ramené en commission parlementaire.
Reste que la modernisation de la Loi sur la protection du consommateur devra être ambitieuse pour embrasser l’ensemble des enjeux liés à l’obsolescence et la durabilité des biens. Afin d’amener les entreprises à changer leurs pratiques au bénéfice des consommateurs.
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