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Tribunal admistratif du logement : comment faire appel?

Par Mathieu Ste-Marie
THICHA SATAPITANON/Shutterstock.com

Le Tribunal administratif du logement (TAL) a rendu une décision et vous souhaitez la contester ? Vous pouvez porter le jugement en appel à la Cour du Québec. Mais faites preuve de patience.

D’entrée de jeu, il faut savoir que certaines décisions rendues par le Tribunal administratif du logement (TAL) ne peuvent être portées en appel. C’est le cas d’une décision dont l’objet est la fixation ou la révision du loyer ou bien la modification d’une autre condition du bail. De plus, si votre demande vise le recouvrement d’une petite créance de 15 000 $ et moins, votre appel sera refusé.

« Une grande partie des appels concernent plutôt la résiliation du bail, la reprise du logement ou le paiement des arriérés de loyer », observe Elias Paillon, avocat et conseiller juridique à la Société québécoise d’information juridique (SOQUIJ), un organisme qui diffuse les décisions des tribunaux judiciaires et administratifs.

Par exemple, des locataires qui ont des retards de paiement fréquents ou un retard de plus de trois semaines dans le paiement des loyers ou qui prétendent avoir été victimes de « réno-éviction » vont vouloir porter leur cause en appel pour éviter l’expulsion de leur logement.

Dans l'article qu'il a publié sur le blogue de la SOQUIJ, Elias Paillon indique que deux tiers des demandes présentées devant le TAL en 2019-2020 venaient des propriétaires. « De plus en plus de locataires consacrent une part colossale de leurs revenus aux dépenses locatives ou bien acceptent des logements insalubres ou de taille insuffisante, écrit-il. Cette insécurité locative est également source d’anxiété, de dépression et d’insécurité alimentaire. »

C’est dans ce contexte, explique l'auteur, que l’appel des décisions du TAL à la Cour du Québec revêt une importance capitale puisqu’il constitue souvent le dernier recours avant une expulsion.

À lire aussi : Clause abusive ou déraisonnable : les locataires sont protégés par la loi

Un délai de 30 jours

Qu'il s'agisse du propriétaire ou du locataire qui veuille contester la décision du TAL, l’appelant doit faire vite puisque la demande pour permission d’appeler doit être signifiée à la partie adverse et produite au greffe de la Cour du Québec dans les 30 jours suivant la décision du TAL.

Cette demande doit préciser les conclusions recherchées, être accompagnée d’une copie de la décision du TAL et des pièces de la contestation.

À noter que le locataire peut également demander à la Cour du Québec de suspendre l’exécution de la décision du TAL, en démontrant qu’autrement, il en résulterait pour lui un préjudice grave.

Une erreur manifeste et dominante

L’appel va être entendu par la Cour du Québec seulement s’il est démontré qu’il y a eu une erreur manifeste et dominante par le juge administratif du TAL.

Dans une décision rendue en cours d’appel l’an dernier, la juge Nathalie Chalifour, en s’appuyant sur un autre jugement, a qualifié ce type d’erreur : « Il doit s’agir d’une erreur qui ne fait pas que tirer sur les feuilles et les branches en laissant l’arbre debout, mais qui fait tomber l’arbre tout entier », a-t-elle mentionné.

Elias Paillon précise : « C’est le cas si le juge n’a pas respecté les règles d’équité procédurale. Par exemple, il a refusé l’administration d’une preuve ou a refusé d’entendre un des témoins. La plainte peut aussi être accueillie s’il y a une application ou une interprétation erronées des règlements, et ce de manière manifeste et déraisonnable. »

Dans d’autres cas, l’appel peut être entendu si le juge a rendu une décision au-delà de sa compétence ou a abusé de son autorité.

 « Toute erreur de droit ne suffit pas »

Toutefois, une erreur de droit en l’absence d’une question sérieuse ou d’intérêt général ne suffit pas pour autoriser l’appel.

L’an dernier, un locataire a demandé la permission d’en appeler après que son locateur eut voulu reprendre possession de son logement pour y loger son fils.

Le locataire prétendait que le juge du TAL avait commis une erreur de droit. La juge de la Cour du Québec a refusé sa demande d’appel, s’appuyant sur la jurisprudence qui stipule que « toute erreur de droit ne suffit pas en elle-même pour autoriser l’appel si la question n’en est pas une d’intérêt général ».

En plus d’être d’intérêt général, la question doit être sérieuse, nouvelle, controversée ou mettre en cause les intérêts supérieurs de la justice.

Par ailleurs, l’appel d’une décision du TAL ne doit pas être l’occasion de donner une seconde chance au locataire ou au locateur qui espère un meilleur résultat, précisent les tribunaux. En cas d’appel abusif ou dilatoire, le juge de la Cour du Québec peut même condamner l’appelant à des dommages-intérêts. 

À lire aussi : Locataires et propriétaires : quoi faire quand ça tourne mal ?

Un processus long et incertain

Avant de contester le jugement du TAL, sachez que le parcours vers une décision en appel peut être complexe, long et souvent coûteux.

« Une fois la permission d’appeler autorisée, l’appel peut être fixé dans les neuf mois. Parfois, la décision de la Cour du Québec peut être rendue séance tenante, mais il peut y avoir un autre délai. Les délais ont allongé depuis la pandémie », note Me Paillon.

Si l’autorisation d’appel peut prendre quelques mois, il est loin d’être certain que les démarches aboutiront à une réponse favorable, indique l'avocat. Plusieurs locataires, par exemples, vont se présenter seuls pour éviter les frais d’avocat, mais ne sont pas familiers avec les subtilités juridiques qui pourraient leur permettre d’être entendus en cour d’appel.

Au terme de ce long processus, le juge de la Cour du Québec aura deux choix. « Il peut rendre la décision que le juge du TAL aurait dû prendre ou renvoyer le dossier au TAL », souligne Me Paillon.

À lire aussi : Bien se préparer avant d’aller aux petites créances

La version originale (6 juin 2023) de cet article a été légèrement retouchée le 14 juin 2022.

 

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  • Par Sylvain Dubreuil
    11 juin 2023

    Je suis abonné à Protégez-Vous depuis de nombreuses années et propriétaire d'un duplex. Je suis désolé de constater que cet article relate seulement les droits des locataires et non ceux des propriétaires qui ont aussi un droit de faire appel. Vous savez, les propriétaires sont aussi des consommateurs et font partie de vos abonnés !

    journalist
    Par Céline Montpetit de Protégez-Vous
    14 juin 2023

    Bonjour Monsieur Dubreuil,
    Merci d’avoir pris le temps de nous écrire. Nous avons modifié l’article pour indiquer que les propriétaires peuvent aussi faire appel. Dans la pratique, indique l'article de la SOQUIJ mis en référence dans le texte, ce sont surtout les locataires qui entrent dans cette démarche, d’où l’angle de ce texte.