Montres connectées : pas si efficaces que ça
Une étude publiée récemment suggère que recourir à une montre connectée de type Fitbit améliore la forme physique et réduit le chiffre affiché sur le pèse-personne. Des résultats qui se dégonflent, lorsqu’ils sont mis en perspective.
«Utiliser une montre connectée améliore la santé, ce n’est pas juste un slogan commercial», affirme par voie de communiqué Mickaël Ringeval, étudiant au doctorat en administration de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal. Le chercheur fonde son analyse sur les résultats d’une étude publiée récemment dans la revue scientifique Journal of Medical Internet Research et dont il est l’auteur principal.
L’étude en question, une méta-analyse, a permis de mesurer l’effet global d’interventions impliquant l’utilisation d’un bracelet Fitbit. En tout, 37 essais cliniques réalisés aux quatre coins du globe et publiés entre 2014 et 2019 ont été pris en compte. Plus de 3800 personnes de tous âges ont participé à ces interventions qui, en moyenne, duraient moins de cinq mois. La majorité des études ont été menées auprès de personnes en mauvaise santé (maladies cardiovasculaires, maladie pulmonaire obstructive chronique, etc.).
Au final, l’utilisation d’une montre connectée Fitbit permet d’augmenter le nombre de pas effectués chaque jour de 950 en moyenne sur la durée étudiée. Ce résultat est significatif sur le plan statistique, tout comme la hausse de 6 min par semaine du niveau d’activité physique d’intensité modérée à intense ainsi que la perte de poids de 1,5 kg (sur une durée moyenne de cinq mois). Les auteurs font également état d’une baisse non significative du temps consacré à des activités sédentaires de l’ordre de 10 min par jour. «Notre étude a démontré quelque chose de suffisamment solide», se réjouit Mickaël Ringeval.
Pas une foi en soi
Marie-Ève Mathieu, professeure de kinésiologie à l’Université de Montréal et chercheuse au CHU Sainte-Justine, se fait plus circonspecte. «Ces résultats témoignent certes de l’utilité de la montre connectée pour améliorer les habitudes de vie. L’impact est toutefois assez modeste et limité dans le temps», nuance-t-elle. Ainsi, l’augmentation quotidienne de pas rapportée dans l’étude correspond à moins de 10 % de l’objectif journalier de 10 000 pas recommandé par la santé publique. Il en va de même pour les autres progrès constatés par les chercheurs.
Aussi, il est impossible d’isoler l’effet spécifique de la variable Fitbit dans les études recensées, car celles-ci avaient trait à des interventions sur les saines habitudes de vie. «La montre connectée est souvent utilisée dans une approche complète, qui comprend par exemple de l’accompagnement. Il faut la voir comme faisant partie d’un tout, pas comme une fin en soi», analyse Jean-Philippe Chaput, professeur à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa et chercheur au sein du Groupe de recherche sur les saines habitudes de vie et l’obésité.
Les deux spécialistes soulignent par ailleurs que l’autoquantification de soi n’est pas un passage obligé dans une démarche de remise en forme et de perte de poids. «La montre connectée peut être bénéfique à court et moyen terme chez les personnes attirées par les technologies. Chez les autres, pas mal moins; on ne s’achète pas de la motivation en se procurant une Fitbit», tranche Jean-Philippe Chaput. «Si tel devait être le cas, l’épidémie mondiale d’obésité se serait résorbée depuis belle lurette, notamment avec l’apparition de simples podomètres», fait remarquer Marie-Ève Mathieu.
Or, ce n’est manifestement pas le cas. Selon Statistique Canada, en 2018, plus d’un Canadien sur quatre (26,8 %) était obèse et plus du tiers (36,3 %) était en surpoids. Des chiffres en augmentation depuis 2015.
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