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Nouveau Code de services Internet: décevant pour les consommateurs!

Par Stéphanie Perron
CRTC-code-internet-2019 Shutterstock.com

Puisque le nouveau Code du CRTC est de juridiction fédérale, l'organisme considère qu'il aura préséance sur les lois québécoises. Il fera donc perdre aux Québécois certaines protections acquises grâce à la Loi sur la protection du consommateur.

Le nouveau Code sur les services Internet du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) entrera en vigueur le 31 janvier 2020 et tous les grands fournisseurs devront s’y conformer, c’est-à-dire Vidéotron, Bell, Rogers, Cogeco, Xplornet, Telus, Shaw, Eastlink, SaskTel et Norouestel. Environ 87 % des Canadiens abonnés à un service Internet font affaire avec l’une de ces compagnies.

Selon Ian Scott, président et premier dirigeant du CRTC, le Code «donnera plus de pouvoir aux clients et leur permettra de profiter plus facilement d’offres concurrentielles». Anaïs Beaulieu-Laporte, analyste en télécommunications à l’Union des consommateurs, croit plutôt que les nouvelles règles comportent de grandes lacunes, notamment parce qu’elles ajoutent très peu de protection — voire même moins — par rapport à ce qui était déjà prévu par la Loi sur la protection du consommateur (LPC).

Selon elle, le Code se limite à exiger des fournisseurs qu’ils informent adéquatement les consommateurs sans toutefois obliger les entreprises à offrir des conditions d’utilisation équitables. Par exemple, le Code n’aborde pas la question des allégations trompeuses concernant la vitesse du service Internet ni les frais d’utilisation excédentaires que certains fournisseurs facturent jusqu’à 4 $ par Go additionnel.

Par ailleurs, une porte-parole du CRTC a affirmé à Protégez-Vous que les règles du CRTC auraient préséance sur la LPC (une loi québécoise) car le Code s’appliquera à l'ensemble du Canada «sans égard à toute loi provinciale ou territoriale sur la protection des consommateurs». Le Code fera donc perdre aux Québécois certaines protections qu’ils avaient acquises grâce à la LPC, notamment en ce qui concerne les pénalités liées à la résiliation anticipée des contrats. Rappelons que dans un mémoire publié en 2018 (PDF), l’Office de la protection du consommateur avait souligné que le Code pourrait constituer «un inquiétant outil de désinformation quant aux droits et recours dont bénéficie véritablement le consommateur québécois».

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Voici un résumé des principales règles du nouveau Code:

Pas de plafond pour les frais de résiliation anticipée

Le Code impose un plafond pour les frais en cas de rupture de contrat, en autant que ceux-ci ne dépassent pas le rabais offert à l'achat d'un modem ou d'un routeur. Le problème, c'est les consommateurs utilisent bien souvent un appareil qu’ils avaient déjà ou un appareil prêté par l’entreprise. «Le CRTC laisse donc le champ libre aux fournisseurs d’imposer des frais de résiliation au montant de leur choix en l’absence d’appareil subventionné dans le cadre d’un contrat à durée déterminée, pourvu que ces frais [diminuent progressivement] pour atteindre 0 $ après deux ans», fait remarquer Madame Beaulieu-Laporte. Les Québécois y perdent ici un point clé car tout porte à croire que le Code aura préséance sur la LPC qui prévoyait que lorsque le client ne reçoit aucun rabais sur un appareil, le commerçant peut réclamer seulement 50 $ ou 10 % de la valeur des services qui restent à payer, explique Me Julien Valois-Francoeur, avocat spécialisé en télécommunications. «Il y a fort à parier que des fournisseurs comme Vidéotron et Bell reviendront avec des pénalités de bris de contrat, ce qui sera un net recul pour les consommateurs québécois», dit-il.

Indication des prix

Le code mentionne que les prix indiqués dans les offres et les contrats devront être «clairs», y compris pour les promotions, les offres à durée limitée et les offres de services groupés. Une disposition que Madame Beaulieu-Laporte considère trop vague, étant donné que les consommateurs sont souvent soumis à des promotions trompeuses dont les modalités sont délibérément incomplètes, par exemple dans le cas des publicités qui omettent de préciser que le prix affiché n’inclut pas la location obligatoire d’un modem. D’ailleurs, l’analyste se désole que la divulgation des détails essentiels des contrats ne soit obligatoire qu’au moment de s’engager avec l’entreprise plutôt qu’à l’étape du magasinage.

Frais excédentaires illimités

Tandis que le Code sur les services sans fil applicable aux services de téléphonie cellulaire prévoit un plafond aux frais d'utilisation excédentaire, ça ne sera pas la même chose pour Internet puisque le CRTC exigera seulement du fournisseur qu’il avise son client lorsqu’il atteint 75 %, 90 % et 100 % de sa limite d’utilisation mensuelle. Bien que la plupart des entreprises envoyaient déjà ce type d’avis, le fait de le rendre obligatoire contribuera à diminuer le risque de factures-surprises, concède Madame Beaulieu-Laporte.

Rien sur la vitesse de la connexion

Le Code n’aborde pas la question de la vitesse annoncée dans les publicités, faisant en sorte que les fournisseurs pourront continuer de mettre de l’avant la vitesse théorique maximale, plutôt que la vitesse de connexion à laquelle les consommateurs ont réellement accès.

Accès aux mécanismes de plaintes

Si le consommateur n’arrive pas à s’entendre avec le fournisseur en cas de litige, il pourra porter plainte auprès de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision. L’organisme pourra obliger l’entreprise à corriger une erreur de facturation, à rembourser le client ou à payer un dédommagement pouvant atteindre 5 000 $. L’accès à ce mécanisme de plainte était tout à fait souhaitable, dit Madame Beaulieu-Laporte. «Si seulement les protections que les consommateurs pourront faire valoir auprès de l’organisme étaient meilleures…», déplore-t-elle.

Pas pour les entreprises

Alors que le Code sur les services sans fil englobe les PME, ça ne sera pas le cas pour Internet puisque le nouveau Code se limite aux particuliers. «C’est une aberration puisqu’au Québec, le problème le plus fréquent concerne les PME qui se font engager dans des contrats à long terme sans possibilité de s’en sortir sans pénalités onéreuses», dit Me Valois-Francoeur. L'avocat croit que le Code aurait dû s'appliquer aux entreprises car le type de connexion utilisé pour les services Internet commerciaux est le même que pour les services résidentiels.

Petits fournisseurs exclus

Les petits fournisseurs ne sont pas tenus de respecter le Code, mais cela ne sera pas nécessairement à leur avantage, croit Madame Beaulieu-Laporte. «Les grands fournisseurs pourraient affirmer publiquement que, contrairement à leurs concurrents indépendants, ils ont l’obligation d’appliquer de meilleures mesures de protection en faveur de leur clientèle», dit-elle.

Renouvèlement automatique interdit sur le long terme

Le Code reprend un principe de la LPC qui prévoit qu’un contrat à long terme ne peut être renouvelé automatiquement que pour un terme mensuel, dit Me Valois-Francoeur. «C’est un gain pour le reste du Canada… mais au Québec ce problème avait été réglé en 2010», fait-il remarquer.

>> Pour consulter le Code sur les services Internet et la Politique réglementaire de télécom (voir paragraphes 67 et 68)

À noter: cet article a été mis à jour le 1er août 2019 à 16h01.

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