Boissons énergisantes: des dangers insoupçonnés

« Red Bull vous donne des ailes », « Libérez la bête » : qui n’a pas entendu ces slogans de Red Bull et de Monster, les deux compagnies de boissons énergisantes qui dominent le marché québécois ? 

Dans leurs publicités, ces multinationales laissent entendre que leurs produits accroissent le niveau d’énergie et la vivacité d’esprit, et améliorent les performances sportives, entre autres. « Pourtant, les boissons énergisantes ne sont pas formulées pour répondre [aux besoins liés] à la pratique d’activité physique, à cause notamment de la caféine », explique la nutritionniste et docteure en nutrition Karine Gravel. 

Déjà bien visibles sur les étagères des dépanneurs et des supermarchés, ces boissons énergisantes sont plus que jamais promues sur les réseaux sociaux. Les fabricants s’associent à des évènements sportifs et à des athlètes pour faire rayonner leur marque.

Le marketing de ces produits auprès des jeunes est puissant, et cela fonctionne, constate Karine Gravel. Près de quatre jeunes sur cinq ont déjà consommé des boissons énergisantes, et plus de la moitié d’entre eux en prennent plusieurs fois par année, selon un sondage Léger mené pour le compte de l’Association pour la santé publique du Québec et repris par le Collectif Vital. Le sondage a été effectué auprès de 1 005 Québécois de 15 à 24 ans.

La consommation croissante de ces boissons énergisantes par les jeunes préoccupe la nutritionniste. Et ce qui l’inquiète plus encore que le marketing (le contenant), c’est le contenu des canettes. 

Des taux élevés de caféine

Une canette de boisson énergisante peut contenir jusqu’à 100 mg de caféine, soit près de la limite quotidienne à ne pas dépasser selon les recommandations. En effet, Santé Canada conseille de limiter la consommation des adolescents à 2,5 mg par kilogramme de poids corporel. Ainsi, un jeune de 13 ans pesant 45 kg devrait prendre un maximum de 112 mg de caféine. 

Une limite souvent atteinte par les boissons énergisantes et largement dépassée dans les grands formats. 

« La quantité recommandée peut rapidement être dépassée si l’on considère que l’adolescent peut consommer du thé, du café, du chocolat, des boissons gazeuses ou même des médicaments en vente libre qui contiennent aussi de la caféine », explique Karine Gravel. Ou encore, s’il boit plus d’une canette dans la même journée.

Et même s’il consomme moins de caféine que la limite recommandée, l’adolescent peut avoir des maux de tête, des palpitations, de la nervosité, des tremblements et des troubles gastro-intestinaux, entre autres. Quand la limite est dépassée, les symptômes peuvent aller des nausées jusqu’aux problèmes cardiaques. 

C’est sans compter les autres ingrédients des boissons dont les effets stimulants sont similaires à ceux de la caféine, comme l’extrait de guarana, la taurine, le ginseng et le glucuronolactone.

Des rappels pour surplus de caféine

L’an dernier, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a émis plusieurs rappels de boissons énergisantes dont la teneur en caféine dépassait la limite autorisée de 180 mg par canette – une quantité qui peut déjà être excessive pour la santé de jeunes ados ! 

En 2024, elle a effectué un autre rappel, qui touchait cette fois 45 marques, en raison d’une quantité excessive de caféine ou d’un étiquetage inapproprié. Toutes les saveurs des gammes Juice, Energy, Nitro, Reserve et Rehab de Monster ont été visées par ce rappel, qui touchait aussi des marques comme Bang, C4, Fast Twitch, Prime, Bucked Up et bien d’autres.

Santé Canada limite également la quantité d’autres ingrédients ajoutés, comme la taurine, la vitamine B et les minéraux. 

En principe, les boissons qui font l’objet d’un rappel ne devraient plus être consommées, servies ou même vendues sur les tablettes des épiceries ou dans les dépanneurs, à moins que leur formule ou leur étiquetage aient été revus. Si des boissons retirées du marché sont encore en vente, il est toujours possible de le signaler à l’Agence canadienne d’inspection des aliments.

Boissons alcoolisées et cocktails

La nutritionniste et docteure en nutrition Karine Gravel déconseille aussi fortement la consommation de boissons énergisantes alcoolisées, qui produisent un effet à la fois stimulant et antidépresseur, à cause de l’alcool qu’elles contiennent.

« Des études ont démontré que la caféine qui est contenue dans les boissons énergisantes pourrait réduire la sensation d’ébriété. Ainsi, elles neutralisent les effets ressentis de l’alcool, et le consommateur ne s’en rend pas compte », explique-t-elle.

Après avoir analysé durant un an ces produits et leurs effets, la Food and Drug Administration a conclu que la combinaison de l’alcool et de la caféine peut conduire à un état « d’ivresse éveillée ». Cela peut mener à des comportements risqués, surtout chez des jeunes dont le cerveau encore en développement n’a pas atteint un certain stade de maturité. 

Où puiser de l’énergie en buvant?

Plusieurs produits caféinés – dont le café et le thé – pourraient produire un effet similaire, mais peuvent également entrainer des effets indésirables et vous empêcher de dormir si vous en consommez en trop grande quantité. 

Selon Karine Gravel, il faut agir en prévention et nous questionner plutôt sur notre besoin de recourir à ces boissons énergisantes. « Il y a deux principales raisons pour en consommer : se tenir éveillé et obtenir un regain d’énergie. Mais si nous avons besoin d’énergie, c’est parce que nous devons nous reposer. Ainsi, pour une personne qui a besoin de dormir, la consommation de caféine n’est pas une bonne idée. »

D’après elle, les jeunes devraient plutôt s’abstenir de consommer des boissons énergisantes. Boire un verre d’eau suffit pour s’hydrater, rappelle-t-elle, tout en admettant que ce n’est pas la boisson la plus attirante... Du citron ou des oranges peuvent y être ajoutés afin de lui donner un meilleur gout.

Et si vous recherchez un regain ponctuel d’énergie, vous pouvez vous tourner vers des frappés, des jus maison ou des boissons pour sportifs.