Cas vécu: gain de cause pour des travaux de décontamination bâclés
Une consommatrice de Trois-Rivières a gagné sa cause contre Décontamination Optimum. L’entreprise devait éradiquer les moisissures dans son grenier.
Le 9 mai 2017, la trifluvienne Diane Lacombe reçoit la visite d’un vendeur de la compagnie Décontamination Optimum (9221-8569 Québec inc.) de Saint-Eustache, qui lui offre d’inspecter le grenier de sa maison. Elle et son conjoint n’étant pas physiquement en mesure de faire cette inspection, elle accepte.
Le vendeur prend alors des photos et effectue un prélèvement dans «l’entretoit». Sans attendre les résultats de l’analyse, il annonce à sa cliente avoir découvert des moisissures et insiste sur l’urgence de procéder à la décontamination compte tenu des dangers que posent les moisissures pour la santé et des risques de dépréciation de la valeur de la propriété.
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Le vendeur réussit à convaincre madame Lacombe de signer le contrat en faisant valoir qu’elle bénéficierait d’un rabais de 5 000 $ si elle acceptait de donner un avis favorable sur le site Web de l’entreprise, et ce, même si les travaux n’étaient pas encore effectués. Dès le lendemain, l’équipe de Décontamination Optimum était à l’œuvre dans son grenier.
Annulation du contrat
Quelques jours plus tard, le fils de Diane Lacombe, Éric, prend connaissance de la situation et décide de mener sa petite enquête. Un inspecteur en bâtiment et une firme spécialisée en décontamination confirment aussitôt ses doutes: les travaux ont été mal exécutés, leur coût est excessif et le contrat comporte plusieurs irrégularités.
Compte tenu du fait que l’entente a été conclue avec un vendeur itinérant (un individu qui fait du porte-à-porte), la Loi sur la protection du consommateur prévoit qu’on peut annuler le contrat dans un délai de 10 jours. Éric demande donc la résiliation du contrat et exige un remboursement pour les travaux mal exécutés, mais Décontamination Optimum refuse catégoriquement.
Éric lui envoie donc une mise en demeure par laquelle il réclame le remboursement du chèque de 4 600 $ versé à titre d’acompte par sa mère ainsi qu’un montant de 8 146 $ prélevé sur sa carte de crédit avant même le début des travaux.
Travaux mal exécutés
Non seulement les travaux ont coûté cher, mais une inspection effectuée par une firme spécialisée dans l’investigation et l’analyse de la qualité de l’air intérieur a par la suite révélé que la moisissure n’avait pas été éradiquée.
Celle-ci a constaté que la désinfection par cryogénie avait été effectuée seulement sur le quart de la surface à traiter (au lieu des 1 000 pieds carrés inscrits au contrat) et que Décontamination Optimum n’avait pas réglé la source du problème, à savoir l’infiltration d’humidité dans le grenier par le conduit du ventilateur de la salle de bain.
Incapable de conclure un règlement avec l’entreprise, Éric a décidé de porter la cause à la Cour des petites créances. Verdict du juge: Décontamination Optimum (9221-8569 Québec inc.) et son représentant, Michel Bougie, ont été solidairement condamnés à rembourser à madame Lacombe un total de 14 899 $.
Cette somme inclut le montant payé à Décontamination Optimum, les frais payés à la firme contactée à la suite de la visite de Décontamination Optimum, les frais de cour ainsi que des dommages et intérêts. L’entreprise n’a pas daigné se présenter en cour le jour de l’audience.
Le tribunal a été sans équivoque quant aux motifs justifiant sa décision:
- Les pressions indues du vendeur pour faire signer le contrat;
- Le coût exorbitant des travaux effectués par l’entreprise;
- Les pratiques commerciales douteuses quant à l’offre d’un rabais monétaire;
- Les résultats escomptés des travaux non obtenus;
- L’annulation du contrat dans les limites du délai prescrit par la loi;
- Les engagements contractuels du vendeur non respectés;
- Les troubles, dommages et inconvénients subis par la cliente.
Le jugement accorde à l’entreprise et à son représentant un délai de 30 jours pour payer Diane Lacombe. Si l’entreprise ne se conforme pas au jugement, la dame devra entreprendre elle-même des démarches pour obtenir son dû.
Fait intéressant: si l’entreprise disparaissait ou faisait faillite, madame Lacombe pourrait se tourner vers l’Office de la protection du consommateur (OPC) pour réclamer son dû. En effet, les entreprises qui font du porte-à-porte doivent payer une caution pour obtenir leur permis de vendeur itinérant, et ce montant peut servir à rembourser les clients floués.
Rien ne garantit toutefois que la dame pourrait récupérer la totalité du montant, car la caution pourrait aussi faire l’objet de réclamations par d’autres consommateurs dans la même situation.
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Avalanche de plaintes
La Régie du bâtiment du Québec (RBQ) vient pour sa part d’annuler la licence de l’entreprise 9221-8569 Québec inc., connue aussi au registre des entreprises du Québec sous le nom de Décontamination Optimum. Son enquête a révélé de nombreux manquements à la Loi sur le bâtiment et aux conditions d’obtention d’une licence d’entrepreneur, notamment en utilisant un prête-nom.
De plus, l’entreprise a fait l’objet de nombreuses plaintes auprès de l’OPC pour des pratiques commerciales abusives et trompeuses jugées contraires à l’intérêt public.
Au moment d’écrire des lignes*, nous n’avions pu savoir si l’entreprise détenait encore son permis de commerçant itinérant de l’OPC. Mais il est certain que la décision de la RBQ de retirer la licence de Décontamination Optimum pourra être considérée dans le cadre d’une analyse portant sur le maintien ou le renouvellement du permis du commerçant itinérant, surtout si l’entreprise est poursuivie par plusieurs créanciers. *MISE À JOUR 02/08/2018: l'entreprise est toujours titulaire du permis de commerçant itinérant.
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Que faire si vous pensez vous être fait avoir?
Lorsqu’un contrat est conclu avec un commerçant itinérant, les consommateurs disposent d’un délai de 10 jours pour annuler l’entente, et ce, même si les travaux ont été effectués. Ce délai peut même être porté à un an lorsque toutes les dispositions sur le commerce itinérant ne sont pas respectées.
Si une entreprise abuse de votre confiance ou si vous êtes victime de fraude, portez plainte à l’Office de protection du consommateur. Dans les cas extrêmes, l’Office peut engager des poursuites pénales contre l’entreprise afin de l’obliger à cesser ses activités. Vous pouvez aussi demander de l’aide auprès de plusieurs associations de consommateurs.
Si la situation dégénère, vous pouvez poursuivre le commerçant à la Cour des petites créances si le montant réclamé est de 15 000 $ ou moins. Les frais varient de 101 à 202 $ si vous êtes un simple citoyen, et entre 151 $ et 302 $ si vous êtes une personne morale (une entreprise, par exemple). Pour savoir comment vous y prendre, lisez notre article qui explique comment se préparer pour aller à la Cour des petites créances.
À noter: l’adoption de la loi 24 en novembre 2017 devrait permettre de serrer la vis aux commerçants itinérants qui abusent des consommateurs. Cela se fera par l’entrée en vigueur progressive de divers règlements visant à mieux encadrer ce secteur d’activités.
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