Cas vécu : transmission défectueuse sur un Ford E250
Cleveland Kennedy n’a pu faire que 270 km avant que la fourgonnette achetée d’occasion ne fasse défaut. Après plusieurs évaluations du véhicule, il obtient gain de cause contre Auto Karetta devant la Cour des petites créances.
Cleveland Kennedy est un travailleur autonome. En décembre 2017, il se procure une fourgonnette Ford Econoline 250 de 2010 avec 161 206 km au compteur, auprès du marchand Auto Karetta, à Laval.
Peu après, le véhicule tombe en panne.
Deux inspections
M. Kennedy fait inspecter son véhicule par un expert recommandé par l’Association pour la protection des automobilistes (APA), Delroy Webley, au garage DW Auto de Montréal. L’expert confirme que la transmission fait défaut.
Selon le vendeur d’Auto Karetta, cette inspection est insuffisante pour prendre en charge la réparation. Il tient à ce qu’une vérification soit faite par un concessionnaire Ford, aux frais du client. Il est rare qu’un marchand d’autos fasse affaire avec un concessionnaire pour réparer une transmission, car il peut obtenir la réparation moins chère ailleurs ; promener un consommateur pour avoir des estimations à ses frais est parfois une stratégie pour l’essouffler.
En février 2018, Cleveland Kennedy fait donc remorquer la fourgonnette à ses frais chez le concessionnaire Desjardins Ford, à Saint-Laurent (Montréal). Le véhicule a parcouru seulement 270 km depuis l’achat. Le concessionnaire constate que la transmission fait effectivement défaut et il fournit une estimation de 5 213 $ pour la remplacer.
Quand M. Kennedy communique le résultat à Auto Karetta, le vendeur l’informe qu’il aurait dû aller chez un autre concessionnaire Ford ; son client n’étant pas allé chez le bon, Auto Karetta ne peut se fier au diagnostic. On l’envoie à un garage indépendant, à Laval, pour une inspection à la demande du commerçant. Rendu sur les lieux, M. Kennedy constate qu’il s’agit d’un atelier spécialisé dans le remplacement de silencieux. Personne ne semble au courant de son cas, et le garage n’a pas reçu de mandat du commerçant pour procéder à la vérification de son véhicule défectueux aux frais du marchand.
M. Kennedy envoie une mise en demeure à Auto Karetta. Il retourne chez l’expert recommandé par l’APA, DW Auto, en autorisant la réparation avec une transmission d’occasion pour 3 334 $. Il dépose également sa plainte à la Cour des petites créances et réclame 7 631 $.
Auto Karetta demande que l’action en justice soit rejetée. Le greffe avertit le consommateur que sa poursuite pourrait être rejetée s’il n’identifie pas correctement l’entreprise qu’il poursuit. À la suite de quoi, Cleveland Kennedy et sa conseillère à l’APA se présentent au greffe du palais de justice afin de faire inclure toutes les compagnies apparentées au marchand.
Un usage abusif en 270 km ?
À l’audition, le propriétaire d’Auto Karetta affirme que l’inspection visuelle de la fourgonnette avant l’achat par le commerçant démontrait que la transmission ne comportait pas de défaut. Le juge conclut que ce type d’inspection visuelle n’inclut pas le démontage de pièces pour déceler un problème de transmission.
Le propriétaire prétend que l’acheteur a fait un usage abusif de la transmission. Selon le juge, il est plus probable que la transmission a été défectueuse dès le départ, étant donné le court laps de temps et le faible kilométrage parcouru avant que le défaut n’apparaisse.
En résumé, le tribunal estime que la fourgonnette n’a pas offert la fiabilité à laquelle on peut s’attendre d’une fourgonnette payée 10 600 $, ayant sept ans et ayant parcouru 161 475 km. Dans ce contexte, un consommateur peut raisonnablement espérer rouler beaucoup plus que 270 km avant de devoir changer la transmission.
Les frais payés pour le remorquage, l’inspection et les réparations sont une conséquence directe et indemnisable du défaut, et figurent dans le calcul du montant à rembourser par le vendeur.
La réclamation de l’acheteur pour perte de revenus pendant qu’il n’a pas pu se servir de la fourgonnette pour son travail n’est pas retenue. Selon le tribunal, « elle n’est pas détaillée ni justifiée par aucune pièce ; par conséquent, elle n’est pas accordée. »
La division des petites créances de la Cour du Québec condamne donc Auto Karetta (9251-6913 Québec inc.) à payer le montant de 3 783,04 $ à Cleveland Kennedy, plus les intérêts à compter de mars 2020.
Comment recevoir son argent ?
La loi oblige Auto Karetta à procéder au paiement dans les 30 jours. Or, en date du 9 mai 2023 (soit deux mois après le jugement), Cleveland Kennedy n’avait toujours pas reçu son dû, et ce, malgré l’intervention de l’Association des marchands de véhicules d’occasion du Québec (AMVOQ), dont l’entreprise est membre. À la Cour des petites créances, quand la partie condamnée s’entête à ne pas payer, c’est malheureusement la partie qui a gagné qui doit courir après son argent, par exemple en faisant appel à un huissier.
Avant de recourir à l'huissier, une procédure qui entraine des frais non remboursables, il est tout de même préférable de s'entendre à l'amiable avec le commerçant en passant par l'aide offerte par l'AMVOQ : « Même avant un jugement, les consommateurs qui pensent avoir été lésés par un de nos membres peuvent nous écrire à [email protected]. Dans certains cas, si le propriétaire n’est pas en mesure de faire exécuter ce jugement malgré des tentatives raisonnables, l’AMVOQ pourra intervenir auprès du marchand, à la demande de l’Office de la protection du consommateur (OPC). »
Bon à savoir : en cas de litige, les membres de CAA-Québec peuvent bénéficier d’un programme de conciliation auquel participe l’AMVOQ, dans la mesure où la mésentente concerne un membre de l’Association.
Apprenez-en plus sur vos droits en cas de litige à la suite de l’achat d’une auto.
Jugement no 500-32-161692-209
Pour consulter le jugement rendu le 7 mars 2023, rendez-vous sur le site citoyens.soquij.qc.ca
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