Restauration: un installateur de système antifraude reconnu coupable de fraude fiscale
Une entreprise autorisée à installer des dispositifs antifraude dans les restaurants modifiait leur système d’exploitation, ce qui permettait aux commerçants de camoufler certaines ventes.

Photo: Shutterstock
Depuis près de trois ans, les restaurants, traiteurs et autres commerces qui vendent des repas doivent utiliser une machine imposée par Revenu Québec pour compiler toutes leurs transactions. Ce module d’enregistrement des ventes (MEV) attribue également un code à barres universel aux factures. Voilà qui constitue une bonne façon de lutter contre l’évasion fiscale… sauf si l’entreprise autorisée à installer ce micro-ordinateur traficote son système d’exploitation, permettant ainsi aux commerçants de camoufler leurs transactions.
C’est le cas de l’entreprise Logicaisse, qui se verra retirer l’autorisation d’installer ces dispositifs dès le 9 août prochain, car Revenu Québec estime que «le lien de confiance avec cette entreprise est maintenant brisé».
Le 22 avril dernier, l’entreprise lavalloise a été condamnée à payer 350 000 $ d’amende après avoir été reconnue coupable d’avoir modifié, installé ou amélioré une fonction d’un programme informatique afin de permettre à des restaurateurs de camoufler des ventes. Et cette amende n’est pas la première. En 2008, Logicaisse avait dû débourser 140 000 $ après avoir plaidé coupable à des accusations du même type.
Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de lui retirer l’autorisation d’installer les appareils? Revenu Québec refuse de répondre à cette question, «compte tenu des procédures en cours».
Les installateurs révoqués sont rares
«Les modules d’enregistrement des ventes attestés installés par Logicaisse continueront de fonctionner», assure Geneviève Laurier, porte-parole de Revenu Québec. Par contre, la compagnie ne pourra plus offrir de soutien technique à ses clients actuels. Madame Laurier précise que les restaurateurs qui possèdent des contrats d’entretien avec l’entreprise «pourraient avoir à conclure de nouvelles ententes avec d’autres installateurs».
Ceux-ci ne manquent pas: à ce jour, 273 installateurs autorisés sont inscrits aux registres de Revenu Québec. Selon Geneviève Laurier, «ce n’est assurément pas fréquent» qu’une entreprise qui a rempli les formalités administratives obligatoires se fasse retirer son autorisation d’installer des modules d’enregistrement des ventes dans les restaurants.
Factures obligatoires dans les bars en 2015
En date du 31 mars 2014, quelque 18 500 établissements utilisaient les modules d’enregistrement des ventes de Revenu Québec.
Même si Revenu Québec ne peut établir de comparatifs entre le nombre d’amendes pour fraude fiscale imposées avant et après l’implantation des appareils, le ministère estime que ceux-ci sont efficaces. Il prévoit d’ailleurs étendre ses mesures antifraude dans les bars et les restos-bars de la province en juin 2015. Actuellement, les pertes fiscales dans ce secteur sont estimées à 75 millions de dollars par année.
Consommateurs, vous pouvez prévenir la fraude
D’ici là, MEV ou pas, voici trois manières d’éviter que les taxes que vous payez ne se retrouvent dans les poches d’un commerçant.
• Exigez de recevoir une facture. Les restaurateurs ont l’obligation de vous la donner.
• Payez par carte de crédit, carte de débit ou chèque afin de laisser des traces de vos transactions.
• Dénoncez les commerçants qui ne respectent pas leurs obligations fiscales en appelant au 1 855 208-1131.
En chiffres: la lutte à la fraude dans les restos
• 27 772 inspections ont été effectuées dans des restaurants entre le 1er septembre 2010 et le 31 mars 2014.
• Dans 82 % des cas, aucun constat d’infraction n’a été rédigé.
• 60 % des 5 857 constats d’infraction émis entre 2010 et 2014 concernaient la remise d’une facture non conforme ou l’omission d’utiliser un registre géré par le MEV.
• Plus de 3 millions de dollars d’amendes ont été imposés aux commerçants fautifs depuis 2010.
• Depuis l’installation obligatoire des MEV en novembre 2011, les déclarations et les transmissions volontaires des sommes dues à l’État ont augmenté de 672 millions de dollars.
Source: Revenu Québec
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