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Des aînés en résidences font de la résistance

Par Rémi Leroux
des-aines-en-residences-font-de-la-resistance Shutterstock.com

La pandémie a entraîné la suspension de nombreux services et activités dans les résidences pour aînés, mais, dans plusieurs d’entre elles, les frais pour ceux-ci ont été maintenus. Les locataires d’une quinzaine d’établissements, dont ceux de la résidence L’Avantage, à Brossard, demandent aujourd’hui à être remboursés pour ces services non rendus.

Au Québec, la COVID-19 a provoqué un séisme dans les lieux de vie pour aînés. Dans les CHSLD, bien sûr, mais également dans les 137 603 unités de résidences pour aînés (RPA) dans lesquelles vivent des dizaines de milliers de Québécois.

Le gouvernement a demandé aux directions de RPA de fermer les aires communes et de suspendre les activités sociales dès le début de la pandémie, en mars 2020, afin de protéger les résidents. Avant de progressivement les réautoriser, puis de les suspendre à nouveau, au gré des confinements et déconfinements.

Le problème, «c’est que de nombreuses directions de RPA ont continué à facturer les services et activités aux résidents alors qu’ils n’y avaient plus accès», déplore Raoul Charbonneau, président de l’Association des comités de résidents officielle du Québec (ACROQ).

Cinéma, piscine, salle de quilles: fermés!

C’est le cas, par exemple, à la résidence L’Avantage, à Brossard, une RPA de 244 unités appartenant au Groupe Maurice, dans laquelle le cinéma, la grande salle à manger, le salon d’hiver, la salle de quilles, la salle de soins personnels, ainsi que de nombreux autres services ont été suspendus dès le 23 mars 2020.

Malgré ces fermetures, le montant des loyers est toujours demeuré le même, soit «entre 1 500 et 3 300 $, selon la taille du logement (studio, 3 ½, 4 ½, 5 ½)», explique Lucille Théroux, l’une des résidentes, et ce, peu importe que le service ou l’activité ait été offert ou non. «Nous ne savons même pas quelle portion du loyer correspond au coût de ces services», précise-t-elle. Lorsqu’elle a cherché à obtenir l’information, elle affirme que la direction générale de la résidence lui a répondu qu’il s’agissait d’un coût global et qu'elle ne pouvait pas donner de façon spécifique le montant des différents services et activités.

Procédure devant le Tribunal administratif du logement

Pour dénoncer cette situation et réclamer le remboursement des sommes perçues, Lucille Théroux et un groupe de résidents ont déposé une demande conjointe au Tribunal administratif du logement (TAL) en juillet 2021. Cette procédure permet à deux locataires ou plus d’une même RPA «d’obtenir une diminution de loyer fondée sur le défaut de la résidence de fournir un ou plusieurs services inclus au bail», selon les informations disponibles sur le site internet du TAL.

«Nous remercions le Groupe Maurice et la résidence L’Avantage d’avoir fermé les aires collectives pour nous protéger, mais ce n’est pas pour cette raison que nous les poursuivons, insiste Mme Théroux. C’est bien pour demander le remboursement des montants que nous avons payés pour des services non rendus.»

Le groupe de résidents évalue à environ 400 $ le montant mensuel consacré aux services et activités de la résidence. Sur cette somme et compte tenu des fermetures et réouvertures, les locataires demandent un remboursement de 225 $ par mois, par résident, pour la période s’échelonnant entre le 23 mars 2020 et l’été 2021, selon les services.

Leur demande conjointe est désormais entre les mains du juge Marc Landry au Tribunal administratif du logement. La firme d’avocats Fasken, mandatée par le Groupe Maurice pour le défendre dans ce dossier, a fait savoir à Protégez-Vous qu’il était «impossible [pour elle] de commenter un dossier qui se trouve devant les tribunaux».

Également sollicité, le Groupe Maurice ne commente pas non plus l’action en cours. Rita Kataroyan, vice-présidente marketing et communications, rappelle cependant qu’il est «important de comprendre que la situation vécue pendant la pandémie était hors de notre contrôle. Le Groupe Maurice s’est plié aux exigences décrétées par les autorités gouvernementales dans l’unique souci de protéger les résidents.»

À la justice de trancher…

Le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA), par la voix de son PDG Marc Fortin, a déjà pris position sur ces demandes conjointes de remboursement dans divers médias. Une quinzaine de procédures identiques à celle de la RPA L’Avantage ont été initiées dans les RPA de la province ces derniers mois. Le RQRA a fait ses calculs: si toutes les demandes aboutissaient, il en coûterait plus de 200 millions de dollars aux exploitants de résidences. Pas question, donc, de rembourser.

D’autant plus que le regroupement affirme que les directions de RPA bénéficient d’une immunité légale contre d’éventuelles poursuites au titre de l’article 123 de la Loi sur la santé publique. L’article en question détaille les mesures qu’un gouvernement ou un ministre peut prendre dans un contexte d’urgence sanitaire et précise que «le gouvernement, le ministre ou toute autre personne ne peut être poursuivi en justice pour un acte accompli de bonne foi».

Mais cet enjeu de l’immunité des exploitants n’a pas encore été tranché par un tribunal. Or, sur ce plan, les analyses juridiques divergent. Me Hélène Guay, avocate spécialiste du droit des aînés et de la santé, a produit un avis contraire à ce qu’avance le RQRA. Avis dans lequel elle conclut que «persister à invoquer que la loi ne s’applique pas à eux [les exploitants de RPA] ou qu’ils disposent d’une immunité légale fait preuve d’une mauvaise volonté à respecter lois et obligations contractuelles, ce qui est immoral et intolérable. Les exploitants des RPA sont légalement tenus de rembourser les résidents pour les services non rendus sous peine d’enrichissement injustifié.»

>> À lire aussi: Éviction, hausse de loyer ou reprise de logement... qui peut vous aider? et Les aînés auront de l’aide pour négocier leur bail

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