Par Marie-Eve Shaffer (journaliste) et Tiko Harena (chargé de projets)
Vous cherchez une RPA pour socialiser, obtenir des soins et vous sentir en sécurité. Nos conseils pour en trouver une à la hauteur de vos attentes.
Budgétez
Évaluez vos besoins
Trouvez la bonne RPA
Une visite s’impose
La signature du bail
Le Québec est la province canadienne où les personnes âgées de 75 ans et plus optent en plus grand nombre pour la vie en résidence privée pour aînés (RPA). Selon la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), 17 % d’entre elles avaient opté pour ce type d’habitation en 2021, alors qu’ailleurs au Canada, ce pourcentage se situait entre 5 et 10 %.
Pour ces aînés, quitter un domicile où ils ont vécu pendant plusieurs années, voire des décennies, peut s’avérer une expérience pénible. « C’est une étape phare parce qu’on réalise le temps qui passe », souligne la psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier. Ils réfléchissent ainsi au vieillissement, à la perte éventuelle de leur autonomie, et même à leur mort. Leur capacité d’adaptation est aussi mise à rude épreuve dans ce changement de maison. « C’est important qu’ils verbalisent ce qui est émotionnellement difficile », insiste la spécialiste.
Que vous envisagiez d’aller vivre dans une RPA ou que vous accompagniez un proche dans ce projet, gardez en tête que ce déménagement peut susciter un choc émotif, surtout s’il est effectué rapidement.
La décision est prise ? Vous avez intérêt à dresser d’abord un budget et à déterminer les besoins auxquels la RPA devra répondre. Après quoi, informez-vous sur les résidences et visitez-en quelques-unes. Selon les experts consultés, la RPA « parfaite » n’existe pas, mais il y a moyen d’en trouver une où vous ou votre proche pourrez couler des jours heureux.
Budgétez
La première étape consiste à faire un budget. Notez qu’en 2021, la SCHL évaluait qu’au Québec, le loyer mensuel moyen d’un logement sans services s’élevait à 1 922 $, alors que celui d’un appartement avec services atteignait 3 653 $.
Attention : des aînés commettent l’erreur de penser que leurs dépenses diminueront en déménageant dans une RPA puisqu’ils feront moins de sorties. « Il y a en effet un changement dans le mode de vie. Cependant, si on rajoute tous les services, selon les besoins de la personne, le prix a tendance à augmenter », signale Patricia Girard, conseillère principale chez Desjardins Gestion de patrimoine.
Passez d’abord en revue les sources de revenus. Par exemple, les montants mensuels qui viennent d’un régime de retraite, d’un Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) ou d’un Fonds de revenu viager (FRV).
À cela, il faut ajouter les allocations versées par les gouvernements du Québec et du Canada, telles que le Régime des rentes du Québec (RRQ), la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti.
Si l’aîné est propriétaire d’une maison et qu’il décide de la vendre avant de déménager dans une RPA, la liquidation de cet actif doit être considérée dans les calculs. « Une fois que la maison est vendue, cela augmente les possibilités », dit Patricia Girard.
En vivant dans une RPA, l’aîné a aussi droit à des crédits d’impôt du gouvernement du Québec. En voici deux incontournables :
- Crédit d’impôt pour maintien à domicile des aînés : Montant accordé aux personnes âgées de 70 ans et plus pour couvrir 36 % (en 2022) des frais admissibles (service de buanderie, préparation de repas, entretien ménager, soins infirmiers et assistance personnelle). Il dépend des revenus de la personne, si elle est autonome et si elle vit en couple ou non.
- Crédit d’impôt pour soutien aux aînés : Somme versée aux aînés de 70 ans et plus selon leurs revenus. En 2023, elle peut atteindre jusqu’à 2 000 $.
Pour avoir l’heure juste et pour profiter de tous les programmes et crédits d’impôt, vous pouvez faire appel à votre institution financière. Si la situation est plutôt complexe – par exemple s’il y a plusieurs actifs en jeu –, retenez les services d’un planificateur financier.
Évaluez vos besoins
Avant de rechercher une résidence, il faut déterminer les besoins à combler. Sachez que les RPA sont classées selon les services qu’elles donnent.
Catégorie | Services offerts |
1 | Organisme à but non lucratif qui offre au moins deux services de base (la préparation de repas, des mesures de sécurité, l’organisation d’activités de loisirs et une aide domestique). |
2 | Entreprise privée qui offre au moins deux services de base. |
3 | Résidence qui offre au moins un service de base, en plus des soins infirmiers ou d’un service d’assistance personnelle. |
4 | Résidence qui offre des soins infirmiers, un service d’assistance personnelle et au moins un service de base. |
Les RPA qui font partie des deux premières catégories accueillent des retraités en pleine possession de leurs moyens alors que celles qui sont classées en 3 et 4 prennent soin de ceux qui ont besoin d’assistance au quotidien. Une même résidence peut recevoir des personnes de différents degrés d’autonomie. Par exemple, elle peut comprendre des logements où vivent des aînés qui obtiennent peu ou pas de services, et une unité de soins, qui héberge des gens semi-autonomes. Les locataires peuvent ainsi rester dans leur RPA, même si progressivement ils ont besoin de davantage de services.
« C’est important de demander si la résidence est évolutive et si elle est capable de s’adapter aux besoins de l’aîné », note Nathalie Perrault, directrice générale du portail Résidences Québec.
Si un locataire perd peu à peu ses capacités et qu’il se trouve dans une RPA d’une catégorie qui ne correspond pas à ses besoins, il doit quitter la résidence, ce qui entraîne un autre déménagement et une nouvelle vague d’émotions. « Dès que la personne atteint 1,5 heure de soins par jour, elle doit aller dans un CHSLD ou une résidence intermédiaire. Les RPA ne sont pas équipées pour la garder », indique Marc Fortin, président-directeur général du Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA).
Des professionnels peuvent vous épauler pour déterminer dans quelle catégorie de RPA vous devez orienter vos recherches.
• Le travailleur social
Si votre proche parent est en perte d’autonomie, demandez l’aide d’un travailleur social. Vous pouvez en trouver un en contactant le guichet d’accès en soutien à domicile de votre région ou un CLSC.
Au cours d’une visite, le travailleur social évalue l’état de l’aîné à l’aide, notamment, du système de mesure de l’autonomie fonctionnelle. Ce questionnaire passe en revue les capacités de la personne dans ses activités quotidiennes (l’habillement, l’alimentation, l’hygiène personnelle, etc.) et ses habiletés à communiquer (la locution, la vue et l’ouïe). Il examine aussi ses facultés mentales (la compréhension, la mémoire, le jugement, etc.) et ses aptitudes à accomplir des tâches domestiques (préparer des repas, entretenir la maison, se déplacer, etc.).
• Le conseiller en hébergement
Que l’aîné soit en perte d’autonomie ou pas, un conseiller privé en hébergement peut aussi donner un coup de main. Son travail consiste à effectuer des recherches pour trouver une RPA qui correspond aux besoins, aux intérêts, aux préférences en matière de logement ainsi qu’aux moyens financiers de son client.
« Le but, c’est d’amener la personne dans un endroit où elle va rester le plus longtemps possible », explique Nathalie Perrault.
Le conseiller en hébergement peut-il vous suggérer une résidence qui présente des lacunes ? « S’il y a un problème avec l’un de nos clients, on va confronter la RPA. S’il n’y a pas de changement, on arrête de la recommander », indique Louis Sirois, président de l’Association des conseillers en hébergement du Québec (ACHQ). Il ajoute que ses membres partagent entre eux des informations sur les résidences problématiques.
Sachez que ce sont les RPA qui rémunèrent le conseiller en hébergement. « Dans nos ententes, elles ne peuvent pas ⦋refiler la note⦌ à l’aîné et celui-ci a droit à tous les escomptes et promotions en vigueur », insiste Louis Sirois.
Trouvez la bonne RPA
Cherchez-vous une RPA qui accueille quelques dizaines d’aînés ou un vaste complexe immobilier ? Les petites résidences offrent moins de services, mais l’ambiance est plus familiale et la proximité entre les locataires et le propriétaire, plus grande. Quant aux RPA qui abritent des centaines de personnes, elles s’apparentent à des villages, avec des commerces sur place et de nombreuses installations (piscine, bibliothèque, cinéma, salle de quilles, etc.).
Si le prix constitue un facteur important pour vous, cherchez du côté des RPA indépendantes, ou même des coopératives d’habitation et des organismes à but non lucratif qui reçoivent des aînés ayant des revenus modiques.
Avant de jeter votre dévolu sur une RPA, vérifiez si elle détient une certification de conformité, délivrée par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), en consultant le registre en ligne. Pour obtenir cette certification, les établissements doivent respecter plusieurs exigences, comme de disposer d’un système d’appel à l’aide et avoir élaboré un code d’éthique pour le personnel.
Une visite s’impose
Toutes ces recherches sont importantes, mais rien ne vaut une visite. Vous avez avantage à aller voir deux ou trois résidences pour comparer les prix et les services. Les experts interrogés vous conseillent de ne pas vous attarder à la belle décoration et aux fauteuils confortables : ils ne garantissent en rien la qualité des services.
Au cours de votre passage dans une RPA, vous pourrez faire le tour d’un logement, assister à des activités de loisirs et prendre un repas à la salle à manger. Posez toutes vos questions aux dirigeants que vous rencontrez et interrogez même les résidents que vous croisez à propos de leur satisfaction générale.
La signature du bail
Dans le cas où toutes les modalités vous conviennent, vous devez conclure un bail. Les dispositions doivent respecter les règles du Tribunal administratif du logement (TAL). Le futur résident, son tuteur ou un proche muni d’une procuration, doit signer :
- le formulaire de base, qui précise les coordonnées du locataire et du locateur ainsi que la description de l’appartement, le loyer et la durée du bail ;
- l’annexe 6, qui indique les services non personnels (chauffage, climatisation, loisirs, etc.) et les services personnels (préparation des repas, assistance personnelle, soins infirmiers, aide domestique, etc.) retenus ;
- les règlements de la résidence (bruit, utilisation des espaces communs, gestion des déchets, interdiction des animaux, etc.).
La RPA remplit généralement l’annexe 6, mis à part les sections qui concernent les repas, les soins infirmiers et l’assistance personnelle. Si vous retenez ces services dans le bail, ils vous seront offerts sur une base régulière, sans possibilité de remboursement en cas d’absence de votre part.
Sachez que vous pouvez également opter pour des services à la carte. Par exemple, si vous cuisinez vos repas tous les jours, mais qu’à l’occasion, vous dînez à la salle à manger, vous achetez alors des coupons, que vous utilisez à votre guise. Le coût des services est alors légèrement plus élevé.
Jetez un coup d’œil à la procédure de renouvellement du bail. Si sa durée atteint plus de 12 mois, vous recevrez un avis écrit au moins trois mois avant l’échéance, en cas de modification. Si le propriétaire veut majorer le loyer, vous pouvez accepter ou refuser, auquel cas la RPA pourra demander au TAL de trancher. Vous n’avez pas l’obligation de déménager si vous rejetez l’augmentation, à moins que la RPA soit ouverte depuis moins de cinq ans. La clause F du bail lui permet alors d’imposer des hausses comme bon lui semble.
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