Survivre au stress d’un sinistre
Qu’il s’agisse de pluies diluviennes, d’inondations, de canicules, de verglas, de feux de forêt, de glissements de terrain ou même de tornades, les forces de la nature provoquent leur lot de dommages matériels, mais aussi humains. Comment surmonter l’épreuve que représente un sinistre ?
La Dre Mélissa Généreux, médecin spécialiste en santé publique et professeure agrégée à l’Université de Sherbrooke, rappelle qu’on peut être affecté par les désastres sans avoir subi d’importantes pertes matérielles.
« Le caractère soudain, imprévisible et incontrôlable d’un évènement de météo extrême touche notre milieu de vie et peut engendrer du stress, voire une peur pour notre vie et notre sécurité, ou celles de nos proches ou de nos animaux », explique-t-elle.
Selon l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), on observe une augmentation des problèmes de santé cardiovasculaire après des inondations. Des personnes souffrant de maladies chroniques voient leur état empirer après un sinistre. La fatigue, les troubles du sommeil, une perte d’appétit, des tensions musculaires font aussi partie des réactions physiques observées.
Des dommages collatéraux
Les graves intempéries ont des effets psychosociaux qui touchent de plus en plus de personnes. Selon l’INSPQ, elles peuvent notamment :
- Détériorer le milieu de vie
- Perturber la vie sociale
- Accroitre l’incertitude financière
- Créer des tensions interpersonnelles
Tout cela en plus de parfois devoir vivre chez des proches, dans un refuge ou un hôtel le temps de pouvoir rentrer chez soi.
Les récentes pluies torrentielles font écho au déluge du Saguenay qui, en 1996, a fait vivre des difficultés majeures d’adaptation, un « grand état de fatigue et d’isolement », et des « expériences psychoémotionnelles difficiles » aux victimes, relève une enquête de l’Université du Québec à Chicoutimi datant de 2000.
L’INSPQ indique également que l’exposition à de tels phénomènes peut accroitre la consommation de drogues, d’alcool ou de médicaments, et « diminuerait le sentiment de sécurité et d’appartenance au milieu ».
Les personnes sinistrées sont aussi plus susceptibles de présenter des symptômes de stress post-traumatique, de dépression et d’anxiété, et ce, aussi bien à court qu’à long terme.
Des séquelles durables après un sinistre
Une étude réalisée par l’INSPQ dans six régions du Québec un an après les inondations majeures de 2019 a révélé que 44 % des sinistrés présentaient des symptômes de stress post-traumatique, que 21 % démontraient des signes de troubles anxieux et que 20 % souffraient d’un trouble de l’humeur. Les effets psychologiques vécus par les personnes sondées étaient proportionnels à l’ampleur des dégâts subis, mais aussi au niveau de l’eau ayant inondé leur domicile.
« Deux ans plus tard, il y avait une persistance des problèmes de santé mentale chez les personnes sinistrées, et une différence marquée [entre elles et celles] qui n’avaient pas subi de dommages ou qui en avaient peu subi », ajoute la Dre Généreux, qui a piloté l’enquête.
Le stress des « bébés verglas »
Les effets à long terme du stress lié à un sinistre ou à une catastrophe peuvent aussi se transmettre à autrui.
Vingt années après l’épisode de verglas de 1998, l’INSPQ a sondé 178 femmes qui étaient enceintes pendant cette période ou qui le sont devenues dans les trois mois qui ont suivi. Si leurs enfants sont aujourd’hui en bonne santé, ceux dont la mère avait été plus stressée durant la grossesse étaient plus susceptibles de présenter un indice de masse corporel plus élevé, d’avoir un quotient intellectuel jusqu’à 10 points inférieurs à celui des autres et de consommer davantage de cannabis.
La Croix-Rouge souligne que les jeunes enfants ayant vécu un stress intense peuvent l’exprimer par différents comportements, notamment une anxiété de séparation accrue, de l’agressivité, ou le repli vers des comportements de leur tendre enfance, comme sucer leur pouce ou faire pipi au lit.
Même nos animaux de compagnie peuvent être affectés par un sinistre. Si pitou ou minou deviennent soudainement craintifs ou agressifs, ou qu’ils adoptent des comportements inhabituels, c’est peut-être signe qu’ils ont eux aussi subi un stress.
Que faire pour vous apaiser après un sinistre ?
Quand un désastre survient, le cerveau passe en mode survie, et les réactions sont souvent provoquées par l’adrénaline. C’est généralement quand celle-ci retombe qu’on commence à ressentir les effets physiques et psychologiques des évènements.
« On ne ressentira pas tous l’épuisement de la même façon ; on va tenter de le combattre, observe la Dre Généreux. Souvent, quand on vit un drame, celui-ci prend toute la place, et on oublie de répondre à ses besoins de base comme bien s’alimenter et se reposer. Pourtant, la santé, c’est prendre soin de soi. »
La Croix-Rouge recommande de s’offrir un temps d’arrêt pour bien vivre le deuil et la tristesse associés au sinistre ; ainsi, les émotions ne seront pas refoulées. Elle conseille également de reprendre sa routine dès que possible et d’y intégrer des activités appréciées pour se changer les idées.
Pour mitiger les effets indésirables d’un sinistre, la Dre Généreux suggère de bien s’entourer, si possible, et de ne jamais hésiter à demander de l’aide si on se sent submergé par le stress. L’idée, « ce n’est pas nécessairement de demander à quelqu’un de venir faire des travaux. Ça pourrait être de nous offrir quelques plats cuisinés ou de nous écouter. »
Évidemment, lorsque la situation est intenable, il est toujours recommandé de consulter un professionnel de la santé pour obtenir le soutien approprié.

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