Attention

Votre navigateur n'est plus à jour et il se peut que notre site ne s'affiche pas correctement sur celui-ci.

Pour une meilleure expérience web, nous vous invitons à mettre à jour votre navigateur.

Le Québec est-il prêt pour affronter la prochaine pandémie?

Par Catherine Crépeau
Le Québec est-il prêt pour affronter la prochaine pandémie? Summit Art Creations/Shutterstock.com

En mars 2020, moins d’un mois après la détection du premier cas de COVID-19 dans la province, la population était confinée, et un premier décès, rapporté. Avons-nous tiré des leçons de cette pandémie pour être mieux préparés à affronter un nouveau virus ?

Fermeture des lieux publics, des écoles et des garderies, distanciation sociale, désinfection des mains à l’entrée des commerces et des établissements de santé, port du masque obligatoire dans les lieux publics, confinement, interdiction des rassemblements à l’intérieur et à l’extérieur... Après que Québec a déclaré l’urgence sanitaire, le 13 mars 2020, les mesures pour protéger la population et limiter les décès se sont enchaînées.

En dépit de celles-ci, la COVID-19 a infecté 1,5 million de personnes et fait plus de 21 240 morts au Québec.

Cinq ans plus tard, le Plan national intégré de préparation à une pandémie de type viral se fait toujours attendre. Selon le directeur national de la santé publique, le Dr Luc Boileau, le Québec est prêt à affronter une nouvelle pandémie. Plusieurs médecins et gestionnaires qui étaient sur le terrain pendant la crise se montrent plus prudents, voire pessimistes : si des leçons ont été tirées de la COVID-19, un prochain virus pourrait nous surprendre et mettre le réseau sur les genoux.

Les leçons apprises de la pandémie de COVID-19

Disposer de données en temps réel

Au début de la pandémie, les autorités disposaient de peu d’informations sur la situation dans les urgences et les CHSLD. En mai 2022, le ministre de la Santé, Christian Dubé, a présenté le tableau de bord qui permet de suivre les données du réseau de la santé en temps réel. Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) et la population ont maintenant accès à une multitude d’informations permettant de surveiller en temps réel l’état du réseau de la santé provincial, notamment les infections à la COVID-19. Des améliorations doivent cependant être apportées quant au partage des données en temps réel avec les autres provinces canadiennes.

Sécuriser l’équipement de protection

Le MSSS soutient qu’il y aurait assez de gants, de masques, de blouses médicales et d’autre matériel de protection pour tout le personnel de la santé si une nouvelle pandémie survenait. De plus, des contrats ont été signés avec des fournisseurs locaux afin de sécuriser les approvisionnements et de réduire notre dépendance aux fournisseurs étrangers.

Québec n’a toujours pas mis en place un système informatique de gestion de l’équipement de protection individuelle (EPI) à l’échelle de la province, comme l’ont demandé en 2022 le Vérificateur général du Québec et la coroner Géhane Kamel, qui s’est penchée sur les décès survenus en CHSLD au printemps 2020.

En ce moment, le gouvernement sait combien d’EPI sont entreposés dans sa réserve centrale, mais il ignore l’état des stocks dans les différents centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) et centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS). « L’absence d’une information complète, fiable et à jour sur les stocks et la consommation d’EPI a nui à une prise de décision éclairée du MSSS quant à l’approvisionnement et à la distribution des EPI », a pourtant souligné le Vérificateur général.

Recruter et former davantage

Depuis mars 2020, le nombre d’infirmières en prévention et contrôle des infections (PCI) a augmenté dans le réseau. De plus, les hôpitaux et les CHSLD maîtrisent mieux les différentes techniques de PCI. Le personnel des établissements de santé a aussi appris à fermer des zones rapidement et avec efficacité. Reste à voir si les plans pour délimiter les zones rouges et vertes ont été conservés pour éviter qu’il faille refaire l’exercice dans la hâte à la prochaine crise, comme le mentionnait la Dre Amélie Boisclair, intensiviste à l’hôpital Pierre-Le Gardeur à Terrebonne, dans La Presse.

Dans les CHSLD, les infirmières et les préposés aux bénéficiaires sont plus nombreux qu’avant la crise. Mais le manque de personnel reste criant, indiquait la Dre Sophie Zhang, coprésidente de la Communauté de pratique des médecins en CHSLD, dans le Journal de Montréal. Et la menace de coupes budgétaires n’a rien pour rassurer.

Porter le masque en cas d’infection

Durant la pandémie, les Québécois ont suivi les consignes. Ils se sont lavé les mains en entrant dans les commerces, et ont gardé leurs distances et porté le masque en public. Ces gestes visant à éviter la propagation des virus ont poussé plusieurs personnes à adopter de nouvelles habitudes. Par exemple, lorsqu’elles sont malades, elles vont porter le masque ou rester à la maison pour éviter de contaminer leurs collègues de travail.

À lire aussi: COVID-19: les tests expirés sont-ils encore bons ?

Des progrès à faire afin d’être prêts pour affronter une pandémie

Avoir un plan de pandémie

Après la première vague de COVID-19, le Commissaire à la santé et au bien-être du Québec déplorait déjà l’absence d’un plan de pandémie à jour adapté à tous les types de milieux.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux assure disposer d’un tel plan. Sa publication, annoncée par le Protecteur du citoyen en 2023 et 2024, devrait finalement se faire sous peu. Le « Plan national intégré de préparation à une pandémie » de type virale couvre « les communications, le système de surveillance, l’approvisionnement et les pratiques de prévention et [de] contrôle des infections dans les milieux de soins […] », a détaillé le Dr Boileau aux journalistes de La Presse.

Dans le même reportage, des médecins ont cependant indiqué ne pas avoir eu connaissance de ce plan. D’ailleurs, plusieurs experts déploraient cette semaine dans les médias l’absence de véritable bilan de la pandémie, permettant d’évaluer l’efficacité des mesures comme le port du masque, le couvre-feu ou la vaccination contre le virus.

Dépolitiser la santé

Dans son rapport, la coroner Kamel recommandait de séparer le rôle de directeur national de santé publique de celui de sous-ministre adjoint pour assurer l’indépendance de la fonction et garantir des décisions libres de toute influence politique. À son avis, les deux rôles sont distincts et peut-être incompatibles. Pourtant, dans sa réforme du réseau, le ministre de la Santé a choisi de ne pas suivre la suggestion de la coroner et de laisser son double chapeau au Dr Luc Boileau.

Moderniser les CHSLD

Plusieurs bâtiments qui abritent les CHSLD sont vétustes et ne disposent pas de ventilation adéquate. Et beaucoup comptent toujours des chambres pour deux personnes ou plus, qui représentent un facteur de risque important lors d’une éclosion, indiquait la coroner Kamel dans son rapport. Ces types de chambres représentent en moyenne 16 % des lits disponibles, selon une compilation faite par Radio-Canada. Il reste donc du travail à accomplir pour répondre à la recommandation de la coroner que « les milieux d’hébergement puissent offrir des chambres individuelles aux résidents ».

Réduire notre dépendance aux vaccins et à l’équipement médical étrangers

Le vaccin contre la COVID-19 a été mis au point en un temps record grâce à la collaboration de chercheurs d’un peu partout dans le monde. Au Québec, on a décentralisé les laboratoires, généralisé l’accès aux tests et augmenté la capacité à produire ici des tests et des vaccins. Pour la Dre Mona Nemer, conseillère scientifique en chef du Canada, il est important de préserver les données amassées pendant la pandémie et de garder nos plateformes de recherche actives. Parce que le Québec reste dépendant d’autres États. Par exemple, près de 80 % des ingrédients actifs qui entrent dans la fabrication de nos médicaments viennent de la Chine ou de l’Inde.

Le Québec compte aussi beaucoup sur le matériel médical en provenance des États-Unis.

Contrer la fatigue vaccinale et la désinformation

Dans Le Devoir, le Dr Boileau disait remarquer une certaine fatigue en ce qui concerne le port du masque et la vaccination, notamment parce que la COVID-19 suscite moins de craintes au sein de la population. Cette lassitude se reflète aussi sur les taux de vaccination contre la rougeole dans les écoles, lesquels sont en baisse.

Il faut également compter avec la hausse de la désinformation. Une éventuelle campagne de vaccination pourrait souffrir de la montée du mouvement antivaccin et de la prolifération des fausses nouvelles sur le sujet. La prochaine pandémie représentera un défi de communication pour vaincre la résistance de la population et obtenir son adhésion aux consignes de la santé publique.

Se préparer, mais à quoi ?

Les experts sont unanimes : il y aura d’autres pandémies, dans un an, dans 10 ans ou dans 100 ans. Impossible, cependant, de prédire quand frappera le prochain virus et d’où il proviendra.

Le MSSS suit l’évolution des virus qui circulent dans le monde et des mutations qui pourraient mener à leur transmission des animaux à l’humain, afin de se préparer à les affronter. Parce que les leçons tirées de la COVID-19 pourraient ne pas s’appliquer devant un virus qui se propagerait autrement.

Les experts surveillent notamment un syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) en provenance de la Chine qui aurait été détecté chez des chauves-souris, ainsi que la grippe aviaire, qui circule aux États-Unis et sur laquelle peu de données sont compilées.

Faire face à l’effet Trump

Depuis l’arrivée de Donald Trump à la présidence des États-Unis et de Robert F. Kennedy au poste de secrétaire à la Santé, la prévention en a pris pour son rhume. Le budget des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), la principale agence fédérale américaine en matière de protection de la santé, a été réduit, et des restrictions quant au partage d’informations épidémiologiques, cliniques et scientifiques ont été imposées.

Autant de décisions nuisibles à la surveillance et à la prévention des infections chez nos voisins… et chez nous, puisqu’on sait que les virus n’ont pas de frontières.

Sans oublier le retrait des contributions américaines à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui nuira à la capacité de celle-ci à réagir à une nouvelle pandémie.

À lire aussi: Rhume, grippe, COVID-19... comment reconnaître les symptômes?

Le fil des événements (2020)

 

  • 27 février : Premier cas de COVID-19 déclaré au Québec
     
  • 11 mars : L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) déclare une pandémie mondiale
     
  • 13 mars : Québec déclare l’état d’urgence sanitaire
     
  • 14 mars : Interdiction de visites non essentielles dans les hôpitaux, CHSLD et centres pour personnes âgées
     
  • 16 mars : Fermeture des écoles et des garderies. 
     
  • 18 mars : Premier décès rapporté au Québec
     
  • 21 mars : Interdiction de tout rassemblement intérieur et extérieur
     
  • 22 mars : Fermeture des commerces
     
  • 23 mars : Confinement obligatoire dans les CHSLD et les résidences privées pour aînés (RPA)
     
  • 27 mars : Restriction des déplacements entre certaines régions
     
  • 18 juillet : Port du masque obligatoire partout dans les endroits publics fermés
     
  • 14 décembre : Administration des premiers vaccins au Québec
     
  • 1er juin 2022 : Québec met fin à l’état d’urgence sanitaire
  Ajouter un commentaire

L'envoi de commentaires est un privilège réservé à nos abonnés.

  • Par Denis Chabot
    14 mars 2025

    Ça a pris plusieurs mois pour convaincre les spécialistes de l’Organisation mondiale de la santé que le virus se maintenait dans l’air et ne tombait pas au sol à une distance de 5 pieds (1,5 M) de l’émetteur comme les autres grippes. D’où les modes de protection inadéquats et l’avalanche de contaminations mortelles. Aucun spécialiste ne comprenait ce nouveau mode de transmission. Les autorités sanitaires et surtout politiques improvisaient dans l’ignorance et on fait de leur « mieux « …Nous ignorons totalement quelle sera la forme de la prochaine pandémie et nous devrons faire de notre mieux, enrichis des leçons tirées.