Il y a quelques années, en avril, je suis allée au Parc d’environnement naturel de Sutton (PENS) avec une amie pour faire une randonnée. Mais une fois sur place, la personne à la vente aux billets nous a dit qu’il était « irresponsable » de marcher sur les sentiers puisque nous étions en période de dégel. C’est ainsi, « sur le tas », que nous avons appris qu’au-delà de la boue, ces semaines printanières sont sensibles pour les espaces naturels et l’état des sentiers.
N’empêche, il était possible d’acheter des billets puisque l’accès n’était pas formellement interdit. Mea culpa : nous avons choisi l’irresponsabilité avec de petits sourires gênés. L’heure de route pour arriver sur place n’était pas étrangère à cette décision. Nous avons toutefois retenu la leçon.
Questionnée à ce sujet, Patricia Lefèvre, directrice générale du PENS, me raconte que son équipe a expérimenté plusieurs stratégies au fil des années afin de sensibiliser les randonneurs et limiter les visites pendant cette période de l’année, tout en jonglant avec le peu de moyens dont elle dispose.
Qu’en est-il désormais ? Les sentiers ferment « pour vrai » pendant quelques semaines, assure-t-elle. Au moment d’écrire ces lignes, il restait toujours un sentier ouvert. « Nous pensons devoir le fermer le 4 avril, ainsi que tous les autres, pour une période de trois semaines à un mois, précise Patricia Lefèvre. Les ventes de billet en ligne seront évidemment suspendues durant cette période, et les billets achetés longtemps à l'avance seront remboursés, le cas échéant. »
Et si vous vous aventurez malgré tout, vous risquez de trouver sur la route deux blocs de béton liés par une chaîne vous empêchant d’aller vous stationner. Ce barrage, parfois même surveillé par un gardien, vise à rebuter ceux qui font fi des consignes. C’est un héritage des mesures sanitaires liées à la COVID-19 du printemps 2020 que l’équipe du PENS (avec l’aide de la ville) est bien heureuse de remettre en place pour la période de dégel.
Pas un cas unique : informez-vous !
Les dates exactes de fermeture peuvent varier d’une année à l’autre, alors que les impacts du dégel sur la faune, la flore et l’état des sentiers varient selon le type de sol, sa capacité de rétention d’eau, le type d’aménagement, les moyens des gestionnaires, etc. C’est pour ces raisons que certains endroits ferment, et d’autres non.
Dans les environs du PENS, Les sentiers de l’Estrie sont fermés depuis le 29 mars, alors que le Parc national du Mont-Orford, géré par la Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq), restreint l’accès à certains sentiers, selon les conditions. Dans les Laurentides, le Parc régional de Val-David-Val-Morin vous avertit que « le parc pourrait être fermé momentanément durant la période de dégel ».
Avant de planifier votre sortie plein air, prenez donc le temps de vous informer (site web du parc, page Facebook, etc.) pour savoir si l’accès aux sentiers est interdit ou non recommandé. L’organisme Rando Québec vous propose même d’exercer d’autres activités, comme le vélo ou la course à pied, pendant cette période.
L’alternative boueuse
Et pour les parcs où la randonnée printanière n’est pas contre-indiquée ? Retenez que vous marcherez dans la boue, dans l’eau et sans doute dans la neige. Un petit conseil : ne vous fiez jamais aux routes et trottoirs dégarnis, voire aux pelouses bien sèches, car la forêt réserve toujours des surprises.
Chaussez-vous en conséquence. Trop souvent, je croise des marcheurs portant des chaussures inadéquates, comme de jolies espadrilles à la mode, si ce n’est pas carrément blanches ! Vont-ils plonger à deux pieds dans la boue et marcher au milieu du sentier comme le recommandent les principes Sans trace ? Permettez-moi d’en douter.
Le constat est assez simple : une chaussure qui n’est pas boueuse au sommet, c’est signe que les sentiers ont été contournés, ce qui favorise l’érosion du sol, la détérioration prématurée de la végétation ainsi que l’élargissement des sentiers.
Personne n’est parfait et la confusion est possible sur les chemins. N’empêche, il faut se rappeler que nous ne sommes jamais seuls à vouloir éviter le plus gros de la boue et à faire quelques pas en dehors du sentier, puisque des milliers de personnes fréquentent les lieux de plein air. C’est ce cumul qui est le plus néfaste.
Soyons fiers d’affronter la boue… ou passons notre tour !