Consolidation hypothécaire: attention terrain glissant
Par Priscilla Franken Mise en ligne : 06 décembre 2010

La consolidation hypothécaire est souvent très efficace pour régler des problèmes d'endettement. Mais le remède n'en contient pas moins de nombreux risques d'effets secondaires indésirables.
L’objectif: diminuer rapidement le montant de ses mensualités. La méthode: regrouper plusieurs dettes en une seule, garantie sur la valeur de sa maison. La consolidation hypothécaire n’est donc rien de moins qu’un nouvel emprunt, qui englobe différentes dettes à taux élevé (cartes de crédit, prêt auto, etc.) et le solde de son hypothèque.
On se retrouve avec un seul paiement moins important, assorti d’un taux d’intérêt plus bas que ceux que demandent ses différents créanciers. «En fait, on se sert de ce qu’on appelle communément “l’équité” [valeur nette] acquise sur sa propriété, soit la différence entre sa valeur marchande et le solde de l’hypothèque, pour payer ses dettes», explique Nathalie Lapointe, courtier immobilier hypothécaire à Saint-Jean-sur-Richelieu. Avant de faire le grand saut, voici ce qu'il faut savoir.
Une opération coûteuse à long terme
Pour en bénéficier, il faut pouvoir se prévaloir d’une valeur nette minimale de 10 % sur sa maison. De plus, la santé financière du demandeur ne doit pas être catastrophique, au risque de voir sa demande rejetée. «C’est à la discrétion de chaque établissement, mais bien souvent, la consolidation hypothécaire n’est pas accordée si les conditions de crédit sont trop détériorées», souligne Nicolas Fréchette, chef de produit Financement hypothécaire chez Desjardins.
Des critères restrictifs qui n’empêchent pas Nathalie Lapointe d’observer une nette augmentation des demandes depuis un an et demi. «C’est l’un des impacts de la crise. Beaucoup de gens ont perdu leur emploi et éprouvent des difficultés à honorer leurs engagements. Le fait que les taux des prêts hypothécaires soient actuellement très bas – on parle de 3,5 % fixe fermé sur cinq ans – est un incitatif supplémentaire», explique-t-elle.
Sauf que… les inconvénients de la méthode sont à la mesure de ses avantages. Comme chacun sait, il n’existe pas de recette miracle en matière d’insolvabilité. Et surtout personne qui vous fera de cadeau. «Cette solution demeure assez coûteuse puisque l’emprunteur paiera sa dette à un plus petit taux, mais sur une période beaucoup plus longue», souligne Nicolas Fréchette.
Précisément là où le bât blesse, puisque la plupart des gens, en situation de détresse et focalisés sur leurs paiements mensuels, ne pensent pas au coût total de l’opération. Dommage. Ils pourraient se rendre compte qu’ils paient leurs achats extrêmement cher. Si, par exemple, on inclut un solde de carte de crédit de 30 000 $ dans une consolidation hypothécaire assortie d’un taux de 5 % et d’une période d’amortissement de 25 ans, on paiera 22 611 $ d’intérêt au total!
«Les gens ne réfléchissent qu’en termes de mensualités de nos jours. Ce n’est pas un hasard si tant de publicités mettent l’accent sur des tarifs mensuels et non sur un prix total… Mais à un moment donné, il faut s’asseoir et prendre sa calculatrice», estime Pierre Fortin, vice-président du syndic de faillite Jean Fortin & associés. Il invite à se poser la question: parfois ne vaut-il pas mieux faire des efforts supplémentaires pour se libérer de ses dettes plus vite, plutôt que payer longtemps ses petits péchés?
Exemple de consolidation hypothécaire | |
Maison: 116 000 $ | 790 $/mois |
Prêt personnel: 12 000 $ | 267 $/mois |
Cartes de crédit: 10 000 $ | 300 $/mois |
Paiement total | 1 357 $/mois |
Avec une consolidation hypothécaire, on peut obtenir:
- Un seul solde de 138 000 $ (116 000 $ + 12 000 $ + 10 000 $) à un taux de 3,5 % sur 25 ans
- Paiement total = 689 $/mois
- Économie mensuelle: 668 $
Une solution «trop facile»?
Autre danger, celui de la récidive: on a le sentiment que tout va bien, qu’on peut recommencer à dépenser… et on retombe dans le piège de l’endettement. Pour Raymond Lepage, directeur général de SOS Dettes, il s’agit là d’un phénomène très répandu: «La grande majorité des personnes que je rencontre au sujet d’une consolidation hypothécaire en sont à leur seconde édition!» À ses yeux, c’est parce que les gens n’identifient pas la source véritable de leurs problèmes. «Ils se contentent de réduire leurs mensualités, mais ne cherchent pas à comprendre pourquoi et comment ils en sont arrivés là. On calme les symptômes, mais on ne soigne pas le mal», déplore-t-il.
Selon lui, la consolidation hypothécaire est une solution trop facile et ses bénéficiaires ne retirent rien de l’expérience. Sans compter que, en cas de défaut de paiement, c’est leur maison qu’ils peuvent perdre. Il recommande donc de considérer cette option comme ressort ultime.
Un avis que partage Nicolas Fréchette: «C’est une solution de dernier recours. Il faut bien comprendre qu’étaler ses dettes sur une longue période n’est pas gratuit. Se donner un peu d’air, d’accord, mais dès que possible, on doit augmenter ses mensualités.»
Un conseil que Nathalie Lapointe donne systématiquement à ses clients. Mais qui reste, elle le concède, lettre morte dans la plupart des cas: ce qui ne devait être qu’un soulagement temporaire se transforme vite en habitude confortable, et risquée. Le consommateur averti évitera donc de s’endormir sur ses lauriers et fera son maximum pour accélérer ses remboursements au plus tôt.
Vérifiez que le taux qu’on vous propose est raisonnable
Il doit être comparable à ceux du marché, soit autour de 3,5 % au moment de mettre sous presse. Problème, plus le dossier de l’emprunteur est risqué, plus le taux proposé sera élevé. Donc, selon le degré de vos difficultés, un taux supérieur à la tendance peut quand même vous être favorable. L’essentiel reste d’améliorer votre situation et de pouvoir effectuer vos paiements. Mais il y a des limites. Certains prêteurs peu scrupuleux n’hésitent pas à demander plus de 10 %, parfois 20, voire 30 %… Fuyez!
Évaluez tous les coûts de l’opération
La consolidation hypothécaire peut entraîner différents coûts (pénalité pour remboursement anticipé, honoraires du notaire, évaluation de la maison et prime d’assurance notamment). En règle générale, ces montants sont inclus dans le prêt de consolidation. Posez-vous la question: combien vais-je économiser avec le nouveau taux par rapport à ce que l’opération va me coûter en bout de ligne? Ne changez pas pour changer!
Voyez plus loin que le mois prochain
Évaluez le montant total que vous allez débourser; budgétez les années à venir et fixez-vous des objectifs qui permettront d’accélérer les remboursements dès que possible.
À qui s'adresser?
On conseille généralement de contacter son institution financière en premier lieu, car votre conseiller est la personne qui connaît le mieux votre dossier. Vous pouvez aussi vous tourner vers d’autres prêteurs, comme un syndic de faillite, un conseiller financier indépendant ou un courtier hypothécaire. Pour vérifier le sérieux d’un prêteur non traditionnel, n’hésitez pas à vous renseigner auprès de l’Office de la protection du consommateur, ainsi que des ordres professionnels concernés.
Dans tous les cas, prenez plusieurs avis avant de signer quoi que ce soit, mais évitez de multiplier les demandes au bureau de crédit, car cela peut nuire à votre pointage. Vous pouvez enfin prendre conseil auprès de SOS Dettes, d’Option consommateurs et du réseau des Associations coopératives d’économie familiale (ACEF).
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