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Un émoji « pouce levé » est similaire à la signature d’un contrat

Par Mathieu Ste-Marie
Un émoji « pouce levé » est similaire à la signature d’un contrat Cosmic_Design/Shutterstock.com

Envoyer un émoji de pouce vers le haut peut servir à accepter un contrat, c’est ce qu’a tranché un tribunal de la Saskatchewan. Selon un avocat du Québec, il est tout à fait possible qu’un jugement similaire soit rendu dans la province.

Le juge Timothy Keene a condamné un agriculteur à verser une somme supérieure à 82 000 $ pour ne pas avoir livré plusieurs tonnes de graines de lin à un acheteur, auquel il avait répondu avec le fameux émoji par texto.

L’agriculteur s’est défendu en disant avoir simplement voulu indiquer qu’il avait reçu le message de l’acheteur. Toutefois, le juge a statué que l’émoji d’un pouce levé manifestait l’approbation de la demande.

« Le tribunal reconnaît volontiers qu’un émoji est un moyen non traditionnel de signer un document, mais dans ces circonstances, il s’agit néanmoins d’un moyen valable de transmettre les objectifs d’une signature », a écrit le juge dans sa décision.

Celui-ci a fait valoir que l’agriculteur et l’acheteur avaient déjà scellé des contrats par message texte par le passé en utilisant des mots comme « ok » et « yup ».

Par ailleurs, le juge s’est appuyé sur la définition du dictionnaire en ligne Dictionary pour rendre sa décision. Selon ce dictionnaire anglais, l’émoji du pouce levé « est utilisé pour exprimer l’assentiment, l’approbation ou l’encouragement dans les communications numériques, en particulier dans les cultures occidentales ».

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Le consentement avant la forme

Vincent Gautrais, avocat spécialisé en droit du commerce électronique et enseignant à l’Université de Montréal, n’est pas surpris par cette décision.

« Depuis le droit romain, il y a toujours eu une certaine liberté pour manifester un consentement. En 1955, dans une décision, un juge indiquait que l’on peut très bien conclure un contrat avec des signes de fumée des deux côtés de la montagne », explique l’auteur d’un livre sur les enjeux légaux que les technologies présentent.

« On peut donc imaginer qu’un pouce dans les airs puisse être considéré comme une manifestation de consentement », ajoute-t-il.

« Plusieurs contrats liés à l’achat de biens de consommation ne sont pas associés à un formalisme très lourd », fait-il remarquer. Les contrats sont souvent de simples ententes verbales alors que d’autres doivent obligatoirement être écrits comme lorsque l’on contracte un prêt de véhicule. L’Office de la protection du consommateur (OPC) vous conseille de demander un contrat écrit au commerçant avec qui vous faites affaire.

En fait, le véritable enjeu est le consentement des deux parties plutôt que la forme du contrat. L’article 1385 du Code civil du Québec indique que le « contrat se forme par le seul échange de consentement entre des personnes capables de contracter, à moins que la loi n’exige, en outre, le respect d’une forme particulière comme condition nécessaire à sa formation, ou que les parties n’assujettissent la formation du contrat à une forme solennelle. »

Une décision possible au Québec

Cette décision, une première de ce genre au Canada, pourrait se répéter ailleurs au pays, notamment au Québec où le droit a intégré la nouvelle réalité des preuves numériques.

« D’un point de vue juridique, je ne vois pas de différences notables entre le Québec et la Saskatchewan, explique Vincent Gautrais. Les bases sur lesquelles les juges construisent leurs décisions sont globalement les mêmes. Peu importe la province, la notion de signature est associée à deux fonctions principales : l’identification de la personne et la manifestation du consentement. »

S’il est probable qu’une décision similaire soit rendue au Québec, ce l’est moins en Europe, par exemple. « Les juges au Canada sont assez protechnos et reconnaissent davantage son usage qu’en Europe », dit l’avocat.

Dans son jugement, le tribunal de la Saskatchewan a reconnu que les émojis faisaient désormais partie des communications courantes et que les tribunaux doivent tenir compte de cette réalité.

« Cette cour ne peut (ni ne doit) tenter d’endiguer le flot de la technologie et de l’usage courant des émojis qui semblent être la nouvelle réalité de la société canadienne. Les tribunaux devront être prêts à relever les nouveaux défis qui peuvent découler de l’utilisation d’émojis et d’autres éléments similaires », conclut le juge Timothy Keene.

Autant le savoir avant d’envoyer votre prochain texto… ?

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