Autisme: apprenez le jeu à votre enfant
Jouer n’est pas instinctif pour une majorité d’enfants autistes. Les parents peuvent toutefois les stimuler et les initier au plaisir du jeu au moyen de ces conseils de professionnelles.
Au Canada, 2 % des enfants ou jeunes de 1 à 17 ans avaient reçu un diagnostic d’autisme en 2019, selon l’Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes parue en 2022. L’autisme, qui affecte le développement du cerveau, se manifeste par des difficultés à communiquer et interagir avec les autres, de même que par des intérêts restreints et des comportements répétitifs. L’enfant autiste est généralement peu porté à aller vers les autres, manque d’imaginaire et s’intéresse peu aux jouets.
« Alors que les enfants apprennent et s’intègrent par le jeu, les enfants sur le spectre de l’autisme, eux, ne savent pas jouer », résume Ginette Bernier, directrice clinique du Programme Caribou, un organisme sans but lucratif qui offre des services d’intervention intensive auprès de ces enfants à Montréal. « Le jeu est donc un manque important dans leur développement », confirme celle qui leur apprend à jouer depuis plus de 30 ans.
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Considérer leurs champs d’intérêt
Les thérapeutes utilisent le jeu pour aider les enfants autistes à développer leurs compétences et leurs habiletés sociales. Selon Audrey Duquette, psychoéducatrice, psychodramatiste et psychothérapeute à l’Institut de formation et d’aide communautaire à l’enfant et à la famille, il importe de choisir les jeux en tenant compte de ce qui suscite de l’intérêt chez l’enfant.
« S’il aime les lettres, on embarque dans les lettres. S’il aime les camions, on embarque dans les camions », illustre la coauteure du livre L’enfant autiste : stratégies d’intervention psychoéducatives (Éditions du CHU Sainte-Justine). « Les scientifiques se rendent compte que les enfants ont de très grandes forces dans certains domaines. En tenant compte de leurs intérêts, ils arrivent à faire des choses incroyables par rapport à ça. »
Les parents peuvent aussi contribuer au développement social en misant sur les jeux et les jouets qui attirent la majorité des enfants autistes, c’est-à-dire ceux qui émettent des sons ou de la lumière et qui engagent une « action-réaction ». Les boîtes à surprise qui s’ouvrent lorsqu’on tourne une manivelle en sont un bon exemple.
Même si les enfants ne savent ni lire ni compter, les jeux qui impliquent des chiffres et des lettres ont aussi la cote, selon les spécialistes. Ces derniers remarquent que les enfants autistes aiment reproduire des lettres et des chiffres et qu’ils préfèrent manipuler des blocs portant ces symboles. Ils apprécient aussi les jeux structurés. « Ainsi, assembler un bateau en blocs Lego à partir d’un plan défini sera une activité moins anxiogène pour eux que d’être libre d’utiliser les blocs à leur guise, car ça demande de la créativité », précise Ginette Bernier.
Les activités qui exigent la manipulation d’un ballon présentent aussi un énorme défi pour ces enfants. « Pour eux, c’est complexe. Pour attraper le ballon, il faut d’abord le suivre des yeux. Ensuite, il faut rester à distance, vérifier que l’autre joueur nous regarde avant de lancer, et si ce n’est pas le cas, attirer son attention… C’est trop d’information à gérer en même temps », note Audrey Duquette.
Partager le jeu
Les enfants autistes sont rarement enclins à jouer en groupe et à montrer leurs réalisations aux autres. Pour interagir, ils ont besoin d’encouragements, comme le rappelle la psychoéducatrice. Votre enfant s’amuse seul avec une voiture-jouet? Installez-vous à ses côtés et imitez ses gestes avec une autre voiture afin de capter son attention. Ensuite, ajoutez un élément nouveau : une voiture supplémentaire, une route, une maison…
« Il faut cependant y aller de façon progressive, pour ne pas déranger l’enfant, qui est dans son univers, souligne-t-elle. S’il se fâche, on revient au jeu initial. C’est important de ne pas le bousculer ; il faut qu’il ait du plaisir à jouer avec nous si on veut qu’il ait envie de recommencer. »
Puisqu’ils provoquent de l’anticipation et des rires, les jeux qui invitent à faire des « coucou! », à courir après l’enfant ou encore à le chatouiller constituent une autre façon de favoriser l’interaction. Toutefois, si certains jeunes adorent se faire chatouiller, d’autres détestent ça; les enfants autistes peuvent en effet présenter de l’hypersensibilité ou de l’hyposensibilité sur les plans tactile, gustatif, visuel, auditif, olfactif, vestibulaire (en lien avec l’équilibre) et/ou proprioceptif (qui concerne la perception de la position du corps dans l’espace).
« Il s’agit de tenir compte de leur profil sensoriel dans le jeu si on veut établir un échange et jouer avec eux, explique Audrey Duquette. Si l’enfant est hypersensible au toucher ou au bruit, évitez de le toucher ou d’utiliser des jouets bruyants. S’il est hyposensible sur le plan vestibulaire, il va aimer se balancer ou tourner sur lui-même. »
La psychoéducatrice privilégie également les jeux interactifs dans lesquels l’enfant doit formuler des questions. Par exemple, il tient une carte présentant plusieurs images de chats déguisés. Pour découvrir laquelle de ces images vous avez aussi, il doit vous questionner : « Portes-tu un chapeau? Un collier? etc. » Les rôles peuvent ensuite être inversés, de manière à stimuler l’écoute chez l’enfant.
Une autre activité gagnante : jouer aux quilles à la maison. Pour provoquer des rires, accompagnez la chute des quilles d’un « badaboum! » ou de tout autre son stimulant. Il existe aussi des quilles en plastique qui émettent de la musique en tombant. En plus de travailler la motricité grâce au lancer de la boule, ce jeu oblige l’enfant à attendre son tour, ce qui lui apprend à tenir compte de son entourage. Il est aussi possible de modifier le jeu en faisant tourner les quilles sur elles-mêmes comme des toupies.
Favoriser l’imagination et les interactions
Les enfants autistes manquent généralement de créativité et de flexibilité. « Pour eux, il n’y a qu’une façon de jouer. Une fois que vous leur avez enseigné les règles, ils s’y tiennent », observe Ginette Bernier. Donc, si vous construisez une tour avec votre enfant et que vous placez les blocs rouges en bas et les bleus en haut, il est probable que les prochaines fois, il reproduira ce modèle, sans penser qu’il est possible d’inverser les blocs.
Puisque les enfants autistes affectionnent les jeux répétitifs, la psychoéducatrice Audrey Duquette aime partir d’un jeu de ce type qui correspond à leurs goûts, puis les amener tranquillement vers un jeu un peu plus fonctionnel. « Si l’enfant aligne toutes les lettres de l’alphabet de A à Z, je vais proposer d’écrire un mot, puis je vois s’il me suit là-dedans, expose-t-elle. Je propose des choses aux enfants, mais ce sont eux qui décident s’ils l’imitent ou pas. On fait donc évoluer le jeu, mais toujours en partant de leurs intérêts. »
Les jeux qui impliquent de « faire semblant » s’avèrent aussi très utiles. En incitant les enfants à imiter les adultes, ce qui n’est pas naturel chez eux, de tels jeux contribuent à développer leur imaginaire. À l’aide de déguisements, d’outils de construction ou d’une trousse de médecin, vous pouvez les aider à reproduire des actions connues, comme soigner leur ours en peluche.
Il importe cependant de partir du réel, puis d’ajouter progressivement des éléments imaginaires. Ainsi, lorsqu’un enfant autiste joue avec un service à thé, il est souvent impensable pour lui de « manger » de faux biscuits. « Pour l’aider à imaginer la situation, on doit souvent, au début, mettre de vrais biscuits dans les assiettes. Ensuite, on les remplace par des aliments en plastique ou en pâte à modeler, puis par rien du tout », donne en exemple Ginette Bernier.
« Faire semblant » encourage aussi l’apprentissage des habiletés sociales. En recréant des situations quotidiennes, l’enfant apprend quoi dire quand il veut demander à un camarade de jouer avec lui, ou encore lorsqu’il souhaite répondre à des taquineries. Audrey Duquette aime bien recréer des situations vécues à l’école, à la maison ou au parc au moyen de figurines avec les jeunes enfants, et par l’entremise du jeu de rôle et de mises en situation avec les enfants un peu plus vieux (fin du primaire, adolescence). « On joue les situations avec différentes solutions », indique-t-elle.
Les parents peuvent recourir à la même stratégie pour corriger des comportements. « On amène les enfants à élaborer une conversation et des solutions pour qu’ils puissent réagir correctement la prochaine fois. On les pousse à inventer, ce qui va ensuite leur servir toute leur vie », conclut la psychoéducatrice.
À lire aussi : 20 jouets idéaux pour les enfants autistes et la section Loisirs et famille, qui contient l’évaluation de centaines de jeux de société, de jouets, de robots-jouets et de suggestions de livres pour jeunes.

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