Vous est-il déjà arrivé de faire de l’insomnie en raison de vos finances personnelles ? Moi, oui. La vie de pigiste et l’irrégularité des revenus qu’elle implique ont souvent été pour moi une importante source de stress. Durant mes nuits sans sommeil, je tentais de trouver des solutions pour m’acquitter de mes obligations financières sans me noyer dans l’endettement. Il y a plusieurs années de cela, j’ai même cru faire un malaise cardiaque alors qu’il s’agissait plutôt d’une crise d’anxiété particulièrement intense ! Inutile de préciser qu’après cet avertissement, j’ai adopté des trucs de relaxation pour éviter de me retrouver à nouveau dans pareille situation. Avec le temps, j’ai aussi mis en place des garde-fous financiers qui m’aident à mieux gérer l’incertitude.
Un impact préoccupant
C’est pourquoi je me sens particulièrement interpellée lorsque des sondages se penchent sur la question. Ainsi, en novembre dernier, l’Institut de planification financière publiait une enquête indiquant que le stress financier faisait faire de l’insomnie à 40 % des personnes interrogées. On apprenait aussi que 21 % des répondants empiétaient sur leur temps de travail pour gérer leurs problèmes financiers.
Au printemps 2024, une étude menée par Centraide du Grand Montréal en collaboration avec Léger notait également une augmentation significative du pourcentage de la population ressentant de l’anxiété financière (48 % en avril 2024 comparativement à 42 % en novembre 2022). « Vivre constamment sur la corde raide, où chaque dépense risque de nous faire basculer, compromet non seulement la qualité de vie, mais influence aussi la santé psychologique », commentait alors Christian Bourque, vice-président exécutif de Léger.
Enfin, en avril 2024, l’Observatoire québécois des inégalités rendait publique une analyse dans laquelle on souligne qu’un haut niveau d’endettement est associé à une pression artérielle élevée, à l’obésité, à une mauvaise santé mentale et à un état de santé général médiocre. À cela s’ajoute le risque de développer des maladies cardiovasculaires, des troubles musculosquelettiques, d’avoir un système immunitaire affaibli ou même de subir un accident au travail.
Les ménages qui doivent s’endetter pour leurs dépenses courantes affichent ainsi un moins bon état de santé général. De plus, même si le stress relié à l’endettement atteint un sommet chez les personnes qui ont du mal à rembourser leurs dettes, il est aussi présent chez celles qui n’éprouvent pas de difficulté à effectuer leurs versements mensuels.
Opération réduction des dettes
Autrement dit, qu’il soit maîtrisé ou pas, l’endettement nuit à notre santé globale. Réduire nos dettes et avoir moins recours au crédit semble donc la solution toute trouvée pour améliorer nos chances de vivre longtemps et en bonne forme physique et mentale. Facile à dire, mais pas à faire, en particulier quand on sait que la moitié des Canadiens seraient actuellement à 200 $ ou moins de l’insolvabilité…
Jean-Sébastien Jutras, planificateur financier indépendant, rappelle toutefois quelques mesures simples pour se rapprocher du but. « Quand on vit d’un chèque à l’autre, on peut être obligé de s’endetter pour boucler son budget. Dans ce cas, lorsque cela est possible, on privilégiera plutôt la marge de crédit ou, mieux encore, la marge de crédit hypothécaire, car les taux d’intérêt réclamés sur celles-ci sont moins élevés que ceux des cartes de crédit », explique-t-il. Ces dernières affichent généralement des taux de près de 20 %, alors qu’actuellement, les taux sur les marges de crédit personnelles sont aux alentours de 12 % et ceux sur les marges hypothécaires, de 6 à 7 %. Quand on sait à quel point les intérêts pèsent lourd dans le remboursement des dettes, la bonne stratégie est de transférer son solde de carte de crédit sur sa marge, de se fixer un plan de remboursement strict et, surtout, d’éviter de réutiliser ses cartes.
Fonds d’urgence et budget
Le fonds d’urgence est un autre incontournable. C’est grâce à lui que l’on pourra se passer du crédit en cas de problèmes ou d’imprévus, comme une période de chômage, une maladie, un électroménager qui nous lâche ou un toit qui coule… « Idéalement, on devrait constituer une réserve représentant trois mois de coût de vie. On peut déposer cet argent dans son CELI s’il n’est pas maximisé, ou encore dans un compte d’épargne à intérêt élevé », recommande Jean-Sébastien Jutras.
Oui, mais où trouver l’argent pour alimenter notre cagnotte ? Encore une fois, il faut revenir à la base : le budget. C’est le meilleur moyen de savoir avec précision combien d’argent entre dans nos coffres chaque mois, et surtout combien en sort.
De multiples grilles budgétaires sont disponibles en ligne comme celles d’Option consommateurs ou de l’Autorité des marchés financiers. Les applications et sites des institutions bancaires proposent également des outils pour classer les dépenses par catégories, ce qui simplifie la tenue du budget.
Avec cet outil de gestion en main, on pourra dès lors identifier les sorties d’argent qui pourraient être réduites ou supprimées. Abonnements, télécommunications, assurances, épicerie, transport, loisirs : aucun poste de dépenses ne doit être oublié ! « Même si on ne peut économiser que 20 $ par mois, c’est un bon début. Ça nous motive et ça contribue à réduire le stress parce qu’on est passé à l’action et qu’on a pris les choses en main », assure le planificateur financier.
L’expert ajoute qu’améliorer sa littératie financière est une autre bonne façon de contrer l’anxiété reliée à l’argent. « Savoir, c’est pouvoir », dit le dicton, et dans ce cas, la connaissance vaut son pesant d’or, car elle aide à prendre de meilleures décisions. Par exemple, utiliser les outils de crédit moins coûteux, tirer profit des régimes d’épargne enregistrés, s’informer et négocier des tarifs plus avantageux, etc. Enfin, n’hésitez pas à vous adresser à un conseiller financier pour obtenir des recommandations plus personnalisées.
N’oubliez pas : prendre soin de vos finances, c’est prendre soin de vous…
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