Pour moi, vendre de l’eau en bouteille est une aberration qui ne sert qu’à enrichir des multinationales au détriment d’une ressource qui devrait être accessible à tous. Alors, quand j’ai appris que le gouvernement de l’Ontario voulait imposer aux embouteilleurs d’eau une taxe de 503,71 $ par million de litres d’eau puisée dans les nappes phréatiques de la province – une hausse vertigineuse par rapport aux 3,71 $ demandés actuellement –, je me suis dit: «Bravo! Enfin un gouvernement qui ose tenir tête aux multinationales de l’eau». Mais j’ai vite constaté que les Ontariens s’inspirent de Terre-Neuve-et-Labrador, qui réclame aux embouteilleurs 500 $ par million de litres d’eau. C’est loin des 70 $ facturés par le gouvernement du Québec, qui, je l’espère, suivra le mouvement.
Et si la conséquence est de faire augmenter le prix des bouteilles d’eau, comme l’indique l’Association canadienne des eaux embouteillées, tant mieux. C’est peut-être l’argument qui convaincra les grands consommateurs d’eau en bouteille de traîner une gourde ou une bouteille recyclable.
Pas meilleure
Je vous entends déjà crier pour vanter la qualité de l’eau embouteillée. Mais savez-vous que la plupart des embouteilleurs puisent leur eau dans les mêmes nappes phréatiques que les municipalités? Et que bien souvent, l’eau embouteillée est de l’eau du robinet qui est filtrée et purifiée avant de vous être vendue. Certains diront que le processus peut réduire ou éliminer le chlore, le plomb ou d’autres contaminants chimiques que les usines municipales ne traitent pas, mais encore là, des études ont montré que l’eau embouteillée n’en contient pas toujours moins que l’eau du robinet, surtout dans les pays où la distribution d’eau potable fonctionne correctement, comme ici. De plus, les municipalités sont obligées de publier des rapports annuels sur la qualité de l’eau, ce qui n’est pas le cas des entreprises qui vendent de l’eau.
Cher payée
L’eau embouteillée coûte surtout très cher. Une bouteille d’eau se vend en moyenne 2 $ dans un dépanneur. Si vous en achetez une quotidiennement au travail, vous dépenserez 10 $ par semaine. À la fin de l’année, votre eau vous aura coûté environ 500 $, en plus des taxes que vous payez déjà pour avoir de l’eau potable à domicile.
Ensuite, les bouteilles d’eau sont un désastre pour l’environnement. La plupart ne sont pas recyclées et se retrouvent à la poubelle, quand elles ne traînent pas dans les rues et les parcs. Aussi, lorsqu’elles sont exposées à la lumière et à la chaleur, le plastique des bouteilles peut se dégrader et relâcher des contaminants dans l’eau. La fabrication des bouteilles exige des matériaux et de l’énergie: l’équivalent de 50 millions de barils de pétrole pour toute l’eau embouteillée consommée dans le monde en 2007, selon un article publié en 2009 dans la revue scientifique Environmental Research Letters. À cela, il faut ajouter l’énergie nécessaire pour traiter l’eau, la transporter, la refroidir dans les points de vente puis recycler ou éliminer les bouteilles.
Bref, je ne vois aucune bonne raison de consommer de l’eau en bouteille. Pour ma santé, pour l’environnement et pour l’avenir de la ressource. Parce qu’on a beau dire que l’eau est une ressource renouvelable, viendra peut-être un moment où l’augmentation de la population, nos activités industrielles et les changements climatiques exerceront une telle pression que les nappes phréatiques ne parviendront plus à se remplir. Parlez-en à ceux qui vivent en Californie, où la sécheresse sévit depuis quelques années!
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