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Code du bâtiment: une mise à jour mitigée

Par Stéphane Gagné
Code du bâtiment: une mise à jour mitigée

L'ancien Code du bâtiment datait de 1983. Après plusieurs reports, le nouveau est entré en vigueur en août 2012. Il ne fait toutefois pas l'unanimité.

Vous êtes propriétaire d’une maison qui a été érigée en suivant l’ancien Code du bâtiment? Parions que lisolation de vos murs n’est pas optimale, ce qui vous amène à dépenser davantage pour votre chauffage. Les nouveaux acheteurs qui ont signé leur contrat depuis l’adoption du Règlement sur l’efficacité énergétique modifiant le Code de construction devraient être plus chanceux. En théorie, leurs nouvelles résidences consommeront de 20 à 25 % moins d’énergie que celles construites sous l’ancien Code. Or, un meilleur bilan énergétique, ça se paie: le prix d’une maison unifamiliale augmentera d’environ 1 % (près de 3 000 $ en moyenne) et celui d’un duplex et d’un triplex, de 0,6 % (2 200 $). «Un propriétaire d’une unifamiliale amortira ce surcoût en trois à quatre ans grâce aux économies d’énergie réalisées», explique Sylvain Lamothe, porte-parole à la Régie du bâtiment du Québec.

Des modifications importantes...

Le nouveau Code, inspiré en partie par le programme volontaire Novoclimat, doit être appliqué pour tout bâtiment de moins de 600 mètres carrés (6 460 pieds carrés) et de trois étages ou moins. Les maisons québécoises typiques de 180 mètres carrés y sont donc soumises. Entrepreneurs et autoconstructeurs sont tenus de respecter le Code, tant pour les nouvelles habitations que pour les agrandissements et les ajouts d’étages.

Il comporte trois principales modifications:

  • Isolation. Les exigences en matière d’isolation thermique sont rehaussées pour atteindre le niveau Novoclimat, ce qui permettra aux nouvelles maisons de porter l’appellation «écoénergétique».
  • Ventilation. Comme dans Novoclimat, toute nouvelle habitation doit être équipée d’un ventilateur récupérateur de chaleur, afin d’assurer un renouvellement efficace de l’air.
  • Surface vitrée. L’espace vitré, d’où la chaleur a tendance à s’échapper, ne doit pas occuper plus de 30 % de la superficie des murs extérieurs au-dessus du niveau du sol, excluant la porte de garage. Le nouveau Code permet donc une surface vitrée au moins deux fois supérieure à ce qu’exige Novoclimat, selon les calculs de Denis Boyer, ingénieur consultant pour Écohabitation, un organisme qui fait la promotion des maisons écologiques. «Cela peut être avantageux dans la mesure où on installe des fenêtres écoénergétiques (à triple vitrage) au bon endroit, c’est-à-dire surtout au sud pour profiter des gains solaires», dit-il.

… mais insuffisantes pour certains

La principale lacune pointée du doigt: le nouveau Code n’exige aucun test d’infiltrométrie. Essentiel dans le programme Novoclimat, ce test permet de repérer les endroits où l’air s’infiltre et de colmater les fuites avant la fermeture des murs. Il garantit ainsi une bonne étanchéité et élimine les problèmes liés à une imperméabilité déficiente, comme la condensation et la moisissure. «On a imité Novoclimat en matière d’isolation, mais pas au chapitre de l’étanchéité, en conclut Emmanuel Cosgrove, directeur général d’Écohabitation. Si les murs moisissent et que l’air froid pénètre dans la maison, l’économie d’énergie attendue grâce au nouveau règlement ne sera pas au rendez-vous.»

Écohabitation a déposé, avant l’adoption du règlement, un mémoire rédigé en collaboration avec plusieurs groupes, dont l’Union des consommateurs et Équiterre. Les cosignataires demandaient à la Régie du bâtiment qu’un test d’infiltrométrie soit fait, par échantillonnage, sur 10 % de toutes les maisons construites selon les nouvelles règles. Proposition non retenue.

L’architecte André Bourassa, président de l’Ordre des architectes du Québec et membre du conseil d’administration de la Régie, n’est pas con­vaincu du bien-fondé de cette demande. «Avant de rendre ce test obligatoire, il faut d’abord éduquer le milieu de la construction afin qu’il adopte de bonnes pratiques, dit-il. Par exemple, lorsque les électriciens installent leur câblage, ils ont la mauvaise habitude de percer la membrane d’étanchéité (pare-vapeur). En procédant ainsi, la membrane laisse passer l’air et perd de son efficacité.» Les autoconstructeurs et les entrepreneurs soucieux de qualité ou désirant obtenir une certification LEED conservent le pare-vapeur intact. M. Bourassa croit qu’en adoptant largement cette bonne pratique, le test d’infiltrométrie ne serait plus nécessaire. Mais on est encore loin de cet idéal, car cette façon de faire n’est pas enseignée!

Des améliorations souhaitables

Pour André Bourassa, le nouveau règlement demeure tout de même un pas dans la bonne direction, malgré ses imperfections, comme l’exclusion des grandes constructions. Selon lui, limiter à 30 % la surface vitrée des murs est une bonne mesure, car «une surface vitrée est sept fois moins performante qu’un mur bien isolé. Il fallait moderniser le Code, dit-il. On pourra ainsi commencer dès maintenant à construire plus intelligemment. La législation actuelle est une première étape, il faut laisser le temps aux constructeurs de s’ajuster. D’autres étapes suivront et s’appliqueront aux bâtiments multilogements de plus de trois unités».

André Bourassa souhaite que le Code rende éventuellement obligatoire:

  • une plus grande utilisation de matériaux verts;
  • l’emploi de composantes préusinées comme les murs fabriqués en usine, à l’abri de l’humidité et de la formation éventuelle de moisissures;
  • que l’on tienne compte du cycle de vie des matériaux;
  • ainsi que du potentiel du soleil pour chauffer les résidences.

Le Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques laisse entrevoir ce qui s’en vient: on y mentionne l’adoption éventuelle d’une stratégie québécoise du bâtiment durable et la possibilité de mettre en place une cotation obligatoire des bâtiments résidentiels, possiblement sur le modèle de la cote ÉnerGuide. Dans ce programme, plus la cote est élevée, plus le bâtiment est considéré comme écoénergétique.

On peut toutefois se demander quand viendra la prochaine étape, si on se fie au temps qu’il a fallu pour mettre à jour l’ancien Code. Cette révision, dont on parlait depuis 1990, a été annoncée officiellement en 2006, dans le cadre de la Stratégie énergétique du Québec 2006-2015. Le processus a donc été long, exagérément long, selon Écohabitation et plusieurs autres groupes. Le Québec a d’ailleurs été l’une des dernières provinces canadiennes à rehausser ses exigences en matière d’efficacité énergétique dans le bâtiment. Pendant ce temps, des millions de kWh ont été utilisés en pure perte. Et la réforme a perdu des plumes avant même sa mise en vigueur: au départ, elle devait toucher tous les nouveaux bâtiments, ce qui n’est finalement pas le cas.

Prêts, pas prêts, partez!

La Régie du bâtiment du Québec rappelle qu’il est important de confier les mandats de construction à des entrepreneurs dûment licenciés. Or, la formation qui leur est offerte pour assimiler les nouvelles exigences demeure facultative. «Les entrepreneurs sont toutefois tenus de connaître les nouvelles règles et de les appliquer, sans quoi ils s’exposent à des amendes allant de 1 000 à 15 000 $ pour une première offense», explique le porte-parole de la Régie, Sylvain Lamothe.

Les administrateurs des Plans de garantie des maisons neuves (Abritat et Qualité Habitation) ont le mandat de surveiller les chantiers pour s’assurer que les entrepreneurs respectent les nouvelles normes. Les inspecteurs de la Régie du bâtiment se chargent, en collaboration avec les municipalités, de l’inspection des maisons bâties par les autoconstructeurs.

Les consommateurs seront-ils adéquatement protégés par cette surveillance? Certains événements récents, comme l’épisode de la pyrrhotite, soulèvent la question. Cet agrégat présent dans le béton a affecté les fondations de quelque 980 maisons neuves, dans la région de Trois-Rivières, depuis 2009. Les propriétaires ont dû se battre pour faire respecter leur garantie, ce qui a amené le gouvernement, en mai 2012, à annoncer plusieurs modifications au règlement régissant ces plans de garantie. Et cela afin de mieux protéger les propriétaires. Par exemple, d’ici 15 ans, 100 millions de dollars seront versés dans un fonds de garantie mis en place pour indemniser les victimes de sinistres exceptionnels. Ces changements entrent en vigueur en janvier 2013.

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