Bien planifier pour recevoir le Supplément de revenu garanti
Emmanuelle Gril | 22 octobre 2024, 14h30
À quoi cela sert-il de donner le Supplément de revenu garanti aux personnes à faible revenu si c’est pour le reprendre aussitôt ?
Il y a quelques semaines, un reportage au Téléjournal de Radio-Canada a retenu mon attention. On y voyait un couple de retraités qui, en raison de l’indexation de 6,5 % du Régime de rentes du Québec (RRQ) l’an dernier, a vu son Supplément de revenu garanti (SRG) fondre comme neige au soleil. Un coup dur pour ces Québécois qui ne pouvaient compter que sur leurs rentes de retraite versées par les gouvernements fédéral et provincial. Une situation absurde où ce qui leur est donné d’une main… est repris de l’autre.
Ce couple n’est sûrement pas le seul à avoir eu cette mauvaise surprise. Selon Statistique Canada, 728 514 contribuables sur les 1,8 million de Québécois qui perçoivent la pension de Sécurité de la vieillesse (SV) reçoivent le SRG de manière partielle ou maximum — soit environ 40 % des retraités. Sur le lot, approximativement 61 % des prestataires sont des personnes seules aux yeux du gouvernement, c’est-à-dire célibataires, veuves ou divorcées.
J’ai voulu comprendre quelles sont les conditions à remplir afin de conserver le SRG. Et ce, d’autant que les retraités à faible revenu pourraient connaître d’autres déconvenues, puisque le RRQ est indexé chaque année (4,4 % en 2024).
À lire aussi : Comment planifier votre décaissement à la retraite?
Conditions à remplir
Hadi Ajab, planificateur financier indépendant et conseiller en sécurité financière, représentant en épargne collective rattaché à Services en placements PEAK, rappelle que, pour être admissible au SRG, il faut avoir
- 65 ans et plus
- recevoir la SV
- être un citoyen canadien ou un résident autorisé au Canada
- répondre à des critères de revenu en fonction de son état matrimonial.
« Le montant du SRG est déterminé par le gouvernement chaque trimestre et il ne faut pas dépasser un certain niveau de revenu pour en bénéficier », explique Hadi Ajab.
D’octobre à décembre 2024, par exemple, le maximum du Supplément est fixé à 1 086,88 $ pour une personne seule. Et pour y avoir droit, le revenu annuel net ne devait pas excéder 22 056 $ en 2023.
Le site du gouvernement du Canada fournit tous les détails concernant les fourchettes de revenus applicables aux autres types de ménages selon la situation de l’époux ou du conjoint de fait. Par exemple, lorsque le conjoint reçoit la SV complète, le revenu du ménage ne peut excéder 29 136 $ net par an.
Ce qui est inclus ou exclu dans le calcul du SRG
Certes, 22 056 $ ou 29 136 $ ne sont pas de grosses sommes. Mais il faut savoir que les revenus tirés de la Sécurité de la vieillesse (SV) sont exclus du calcul pour déterminer le SRG — la SV apportant une somme maximale de 727 $ (de 65 à 74 ans) ou de 800 $ par mois (75 ans et plus).
Les retraits d’un CELI ou d’un compte non enregistré ne sont pas non plus considérés dans le calcul de la SRG.
En revanche, le gouvernement tient compte des sommes issues de REER, de FERR, de fonds de pension d’employeur et du Régime des rentes du Québec (RRQ) dans le calcul du revenu annuel qui détermine le droit (ou non) au SRG.
Si elle répond à tous les critères, une personne seule peut recevoir jusqu’à 1 086 $ par mois. En couple, les montants varieront selon la situation du conjoint. Or, un supplément de 13 000 $ par an fait une énorme différence dans le budget pour un contribuable à faible revenu. Une aide très appréciable, et ce, d’autant que ces montants sont indexés chaque année et sont non imposables.
Des revenus qui baissent le SRG selon leur provenance
Raison de plus pour bien comprendre ce qui pourrait les amputer…
« Au-delà de la limite de 22 056 $, une personne seule peut gagner jusqu’à 5 000 $ net de revenu d’emploi dans l’année sans que cela ait un impact sur le montant de SRG qu’elle percevra, indique Hadi Ajab. Toutefois, chaque dollar gagné à partir de 5 000 $ le réduira. »
Par exemple, si vous aviez gagné en 2023 un revenu d’emploi de 6 000 $, le SRG passerait de 1 086 $ par mois à 1 066 $.
La baisse du SRG est bien plus importante si le revenu additionnel provient d’un REER, d’un FERR, d’un fonds de pension ou du RRQ.
Dans ces cas, les premiers 5 000 $ dépassant la limite de 22 056 $ entraîneront une baisse appréciable du SRG qui glissera à environ 817 $ par mois. Ouch !
Vous touchez 1 000 $ de plus, donc 6 000 $ au-delà de la limite des 22 056 $ ? Votre SRG chutera de 63 $ supplémentaires par mois : il n’en restera plus que 754 $ dans vos poches.
Le montant perçu ainsi que sa provenance ont donc de lourdes conséquences sur le SRG, d’où l’importance de bien faire ses calculs.
« Il faut bien réfléchir à quel moment faire sa demande de RRQ notamment, puisque cette rente viendra affecter le montant du SRG », conseille Hadi Ajab.
Il est désormais possible de reporter le RRQ jusqu’à 72 ans. Si on peut se le permettre à la retraite, il serait préférable de le repousser le plus tard possible et pour compenser, d’utiliser de l’argent d’une autre provenance - un CELI ou un compte non enregistré. « Ces retraits n’entrent pas dans le calcul du revenu et n’ont donc pas d’impact sur le SRG », fait valoir Hadi Ajab.
En procédant ainsi, on reçoit non seulement le SRG, mais, grâce au report du RRQ, on bonifie du même coup les rentes qui nous seront versées plus tard par Retraite Québec.
Des stratégies pour conserver des montants du SRG
Si vous avez déjà demandé le RRQ, sachez que vous disposez de six mois à partir du premier versement pour faire machine arrière. Au-delà de ce délai, vous ne pourrez plus changer d’avis.
En revanche, si vous avez moins de 71 ans, que vous avez demandé le RRQ mais que vous disposez encore d’espace de cotisation REER, une bonne idée serait de déposer votre rente de RRQ dans votre REER, ce qui réduira votre revenu net et permettra de préserver le SRG en tout ou partie.
« Autre stratégie : si vous devez effectuer des retraits dans votre FERR et que votre conjoint est plus jeune, il est possible de prendre en compte son âge au lieu du vôtre pour calculer, et donc réduire, le montant du retrait minimum », recommande Hadi Ajab.
L’estimateur des prestations de la Sécurité de la vieillesse du gouvernement fédéral est un précieux outil pour évaluer combien vous recevrez en SV et SRG. Un planificateur financier professionnel peut également vous aider à faire les choix les plus appropriés dans votre situation. Les calculs sont parfois complexes !