Se déplacer au Québec va coûter de plus en plus cher

Alain McKenna | 09 mai 2024, 09h52

Quelle que soit l’option choisie, le coût de nos déplacements risque de s’alourdir. À moins d’aller à pied…

En autobus, en métro, en auto électrique ou à essence, tous les éléments s’alignent en ce moment pour faire grimper plus qu’un peu le prix que coûtent les moyens de transport. Cela ne vous concerne pas si vous choisissez la marche, purement et simplement.

Taxe pas taxe, vous allez payer

Du côté des véhicules à essence, la taxe carbone qui fait monter le prix des carburants à la pompe suscite la grogne. Pourtant, ce ne sont pas les taxes qui poussent les pétrolières à hausser le prix de l’essence.

Un exemple? En mai, Shell lance un nouveau carburant. Son nom : V-Power NiTRO+. En 2024, on s’attendrait à voir Shell lancer un nouveau carburant qui réduit les gaz d’échappement des véhicules. Ou qui contient un additif innovant permettant de faire baisser le prix de l’essence ordinaire. Après tout, Shell est une entreprise britannico-néerlandaise dont le siège social est à Londres, qui est sans doute devenue la capitale mondiale de la lutte contre les moteurs polluants.

Mais, non. Le nouveau carburant V-Power NiTRO+ est conçu pour les voitures de performance. Son indice d’octane est de 93. Son prix avoisinera celui de l’essence super, recommandée par les constructeurs d’automobiles pour leurs moteurs turbo, entre autres. Pour rappel, l’essence ordinaire a un indice d’octane de 87, la Super de 91.

Les constructeurs sont nombreux à miser sur la turbocompression pour réduire la taille de leurs moteurs : un 4 cylindres turbo moderne produit plus de puissance que bien des V6… Mais il carbure au super.

Ces plus petits moteurs réduisent de façon parfois négligeable la consommation réelle des véhicules. Mais le super coûte plus cher. L’automobiliste paie donc plus… pour moins.

Et les grandes pétrolières s’en mettent plein les poches. En 2023, trois d’entre elles ont annoncé un profit combiné de 117 milliards $. 

Un sommet. Peut-être que les gouvernements devraient les taxer encore plus…

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Transport en commun : tous pour le REM !

Le transport en commun est, en principe, le moyen le plus économique de se déplacer sur des distances que la marche ou le vélo couvrent mal. Pour les jeunes adultes qui décrochent leur premier emploi professionnel, pour les nouveaux arrivants qui espèrent s’installer durablement au Québec, c’est un moyen plus abordable de s’insérer dans l’économie que d’acheter une voiture pour aller au travail.

Les sociétés de transport québécoises sont déficitaires, on le sait. Et leur offre de service est de plus en plus dépassée. C’est aux municipalités de les dépanner, selon ce qu’a décrété le gouvernement de François Legault. Mais leur pouvoir financier est limité : la taxe foncière est leur principal levier économique.

Pour financer les autobus, devrait-on taxer davantage les propriétaires ? Mais on manque déjà de logements abordables. Les nouveaux travailleurs doivent s’installer de plus en plus loin de leur lieu de travail. Et déjà, on calcule que le prix des immeubles va recommencer à grimper dès 2026, une fois derrière nous la crise que provoque l’inflation. 

Dans le Grand Montréal, à moins d’un changement de cap soudain des autorités, la crise des transports en commun est aggravée par la présence du REM. La raison est simple : le REM a été construit par CDPQ Infra, une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, avec la promesse que tout sera fait pour en rentabiliser le fonctionnement.

Les réseaux publics sont découragés d’entrer en concurrence directe avec le REM. Depuis son entrée en service partielle entre Brossard et Montréal, le nombre d’autobus qui franchissent le fleuve Saint-Laurent à partir de la rive sud a diminué, et il diminuera encore.

Se rendre au centre-ville à partir de la rive sud est plus coûteux et plus lent en 2024 qu’il l’était en 2019.

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Des véhicules plus chers… en attendant

Les autos neuves coûtent aussi toujours plus cher. Il y a cinq ans, on promettait qu’il suffirait d’attendre cinq ans pour que le prix des véhicules électriques (VÉ) baisse et atteigne celui de véhicules à essence comparables. Après ça, adieu les pleins d’essence ruineux et les entretiens saisonniers onéreux!

Cinq ans plus tard, on n’y est pas encore. Le prix moyen payé pour un véhicule neuf à essence au Canada en 2023 était légèrement au-dessus de 67 000 $, selon le site AutoTrader. Le prix moyen d’un véhicule électrique neuf en 2023 était, quant à lui, de 73 000 $.

À voir ces chiffres, on a plutôt l’impression que c’est moins le prix des VÉ qui a baissé que celui des modèles à essence qui a grimpé…

À titre indicatif, le salaire médian au Québec était de 45 000 $ en janvier. À ce salaire, à moins de détenir des bitcoins achetés bien avant le mois de février 2024, vous ne vous imaginez sans doute pas en train de débourser entre 67 000 $ et 73 000 $ pour un véhicule neuf. 

Pour vous, que le gouvernement annonce qu’il va réduire l’aide à l’achat d’un VÉ de 7000 $ à 4000 $ en 2025 ne change probablement pas grand-chose…

Québec réduit son aide à l’achat des VÉ mais ne prévoit pas réduire les pénalités imposées aux constructeurs qui ne vendront pas suffisamment de modèles électriques neufs au Québec à partir de 2027.

Ces pénalités sont élevées. Des constructeurs ont déjà indiqué qu’ils risquent fort de ne pas atteindre les cibles prévues d’ici 2030. Ils pourraient avoir à payer des pénalités de plusieurs dizaines de milliers de dollars. Celles-ci seront ensuite amorties dans le prix des véhicules vendus au Québec, qu’ils soient électriques ou à essence. Qui va payer, en fin de compte?

L’espoir électrique ?

Cela dit, il y a une lueur d’espoir à l’horizon. Elle est mince, mais elle est double. 

Pris dans une tempête boursière après des rumeurs selon lesquelles son projet d’un véhicule à 25 000 $ US était abandonné, Tesla a finalement promis pour 2025 un nouveau véhicule d’entrée de gamme, dont le prix de détail avoisinerait les 30 000 $ US, soit environ 40 000 $ CA. Le PDG de Tesla, Elon Musk, a ajouté il y a deux semaines qu’il fera tout ce qu’il peut pour devancer sa mise en marché « tôt en 2025 ou même peut-être à la fin 2024 ».

Puis, au début mai, Kia a confirmé qu’il devancera la mise en marché d’un nouveau petit VUS tout électrique, le EV3, à la fin 2024. On pensait le voir en 2026 seulement. Ce VUS compact pourrait ne coûter, lui aussi, que 30 000 $ US.

Et ça, c’est sans parler des constructeurs chinois de véhicules électriques qui commencent à lorgner le marché nord-américain avec des modèles vendus autour des 30 000 $ CA ailleurs dans le monde…

Pour profiter de ces véhicules bon marché, il faudra attendre encore au moins un an. Et espérer que le dollar canadien résistera aux pressions exercées par l’économie mondiale et à sa trop grande dépendance à la production pétrolière de l’Ouest canadien.

Sinon, se déplacer n’importe où au pays va continuer de coûter toujours plus cher…

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