Risquez-vous de survivre à vos économies ?

Emmanuelle Gril | 15 juin 2021, 08h40

Voici pourquoi votre conseiller en services financiers base votre planification de retraite sur un horizon trèèès lointain.

La première fois que j’ai fait affaire avec un planificateur financier, j’ai eu toute une surprise lorsqu’il m’a annoncé que je devais mettre de l’argent de côté en prévision de vivre jusqu’à mes 96 ans. D’accord, je mène une existence relativement saine, mais quelles sont les chances que j’arrive effectivement à cet âge ? Mon conseiller a-t-il une boule de cristal ou bien se base-t-il sur du solide ?

Prévoir de vivre vieux

J’ai découvert que les professionnels du domaine s’appuient généralement sur les Normes d’hypothèses de projection produites par l’Institut québécois de la planification financière (IQPF). Dans cette analyse mise à jour chaque année, on retrouve notamment un tableau illustrant la probabilité de survie de la population.

Ainsi, un homme âgé de 45 ans a actuellement 50 % de chance de vivre au-delà de ses 89 ans (90 ans pour les femmes). Très prudent, l’IQPF recommande aux professionnels du domaine d’utiliser une période de projection où la probabilité de survie n’excède pas 25 %. Dans notre exemple, l’espérance de vie de monsieur passerait donc à 94 ans et celle de madame à 97 ans.

Or, ce qu’on appelle le risque de longévité – c’est-à-dire le risque de survivre à ses économies et de les avoir épuisées avant son décès – n’est pas un concept facile à comprendre, car il demeure très abstrait. Il semblerait d’ailleurs qu’un grand nombre de personnes sous-estiment leur chance de vivre très longtemps. Martin Dupras, fiscaliste, planificateur financier et président de ConFor Financiers, souligne qu’effectivement, ses clients sont souvent très sceptiques quand il leur fait part de ces statistiques. Et pourtant…

Qui plus est, avec les progrès de la médecine, les jeunes d’aujourd’hui peuvent s’attendre à vivre encore plus longtemps que nous. Sachez cependant que certains comportements peuvent peser lourd dans la balance et diminuer l’espérance de vie, notamment la consommation nuisible d’alcool, l’usage du tabac, un niveau de stress élevé, une mauvaise alimentation, etc. Martin Dupras indique que tous ces facteurs combinés peuvent la réduire de 12 ans. C’est particulièrement criant pour le tabac, alors qu’un fumeur vivra en moyenne neuf ans de moins et un non-fumeur cinq ans de plus.

Mais ce n’est pas tout. Il faut également distinguer les années qu’il nous reste à vivre de celles où nous serons en bonne santé, car il y a des coûts importants reliés à une santé déclinante. Pour éclairer la lanterne de ses clients à ce sujet, Martin Dupras leur montre un tableau bâti sur des données de Statistique Canada. Dans celui-ci, on apprend notamment qu’un homme de 65 ans aujourd’hui peut s’attendre à vivre encore 19,2 années (22 pour les femmes) en moyenne, et qu’il passera 25 % de ces années en moins bonne santé (30 % pour les femmes).

La morale de cette histoire ? Mieux vaut prévoir plus que pas assez. Dans le pire des cas, ce sont vos héritiers qui profiteront de votre prévoyance !

Pour en savoir plus sur les Normes d’hypothèses de projection de l’IQPF, vous pouvez télécharger la dernière version ici (pdf).

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