Des galettes végés pour burgers créées par l’IA

C’est officiel : les années 2020 sont celles de l’intelligence artificielle (IA), cette technologie qui fascine autant qu’elle inquiète. On découvre peu à peu ce qu’elle peut − ou ne peut pas − faire, et la réponse évolue vite avec les avancées. Qui peut prédire ce dont elle sera capable dans 5 ou 10 ans? Entre les scénarios catastrophes où les robots dominent l’humanité et les visions idéalisées où ils nous libèrent de toutes les corvées, l’avenir reste flou. Une chose est certaine : rares sont les secteurs qui y échappent.

Malgré tout, j’ai été plutôt surprise quand ma collègue Marie-Ève m’a appris que trois produits de notre test de galettes végétariennes avaient été créés par une intelligence artificielle. Difficile de comprendre, au départ, comment une machine sans papilles est en mesure d’élaborer une recette. Cela m’a rappelé une soirée entre amis durant laquelle on avait demandé à ChatGPT d’inventer des cocktails avec ce qu’on avait sous la main. Après six essais, disons que le résultat était… inégal : certains drinks étaient bons, alors que d’autres ont fini dans l’évier.

NotCo, une jeune pousse qui grandit vite

Fondée en 2015 au Chili, NotCo avait comme objectif de créer des produits à base de plantes savoureux, nutritifs et écologiques. Ce qui la distingue, c’est l’usage de sa propre intelligence artificielle, Giuseppe, pour concevoir ses recettes. En 10 ans, l’entreprise a lancé une mayonnaise (NotMayo), un lait (NotMilk) et plusieurs galettes végétales (NotBurger, NotBurger Smashed et NotChicken Burger; celles que nous avons testées). Elle a aussi collaboré avec Kraft pour offrir des tranches végétales de type « Singles » et un faux Kraft Dinner. De jeune pousse, NotCo est devenue une entreprise de plusieurs centaines d’employés.

Selon NotCo, Giuseppe s’appuie sur une vaste base de données d’ingrédients végétaux pour créer des combinaisons originales, parfois inattendues. Le NotMilk, par exemple, contient de l’ananas et du chou pour recréer la texture et le goût du lait. Cela dit, dans les produits testés, peu d’ingrédients sortaient vraiment de l’ordinaire : une touche de poudre de pêche dans le NotChicken Burger, un peu de cacao dans le NotBurger… Bref, rien de très audacieux.

Jeremy Pinto, scientifique principal à Mila, un institut de recherche en IA établi à Montréal, note que le site web de NotCo, bien qu’il soit soigné, reste très flou sur le fonctionnement précis de Giuseppe. L’idée qu’une IA puisse analyser des milliers de recettes et en créer de nouvelles n’est pas absurde, à condition d’avoir un bon contexte. Bien utilisée, l’IA peut en effet stimuler la créativité humaine. Néanmoins, ce sont encore des humains qui, au bout du compte, devront goûter le produit pour savoir si c’est bon.

Des boulettes grasses et salées

Les résultats de nos tests sont moyens : faible teneur en protéines, trop de gras saturés et beaucoup trop de sodium. Pour ce qui est des additifs, tous les produits contiennent de la méthylcellulose, un ingrédient qui, en excès, peut causer des troubles intestinaux. Les trois galettes NotCo occupent les 31^e, 32^e et 33^e positions de notre palmarès sur un total de 38 produits évalués. « Intelligence artificielle », visiblement, ne rime pas encore avec « meilleur profil nutritionnel ».

Et le goût, dans tout ça?

Notre groupe d’experts n’a goûté que les neuf galettes les mieux classées, donc pas les produits de NotCo. Par curiosité, j’ai tout de même testé les galettes de faux poulet à la maison. Tout le monde a mangé son assiette sans broncher, mais personne ne m’a demandé de racheter ce produit. Le scénario a été le même avec le macaroni au fromage. Ma filleule, fan inconditionnelle de mac and cheese, a été claire à ce sujet : « C’est pas mal, mais jamais aussi bon que l’original. »

Bref, Giuseppe a peut-être du potentiel, mais pour l’instant, il ne risque pas de remplacer Ricardo dans ma cuisine.