L’Ordre des chimistes enquête sur des gels désinfectants douteux
Des gels hydroalcooliques vendus au Québec ne contiendraient pas suffisamment d’alcool pour être efficaces ou seraient fabriqués dans des conditions inadéquates, selon l’Ordre des chimistes du Québec, qui vient d’ouvrir une enquête sur ces désinfectants pour les mains.
À défaut de faire analyser votre gel désinfectant pour les mains dans un laboratoire accrédité, pas facile de savoir s’il est de qualité ou non. C’est en partie pourquoi peu de plaintes ont été déposées auprès de l’Ordre des chimistes du Québec (OCQ). En revanche, l’organisme a reçu beaucoup de questions du public. Est-ce que mon gel est efficace? Comment peut-on savoir si le produit est de qualité? Est-ce qu’il y a des risques pour la santé?
Des pratiques questionnables
On le sait, la pandémie a entraîné en mars une pénurie de gel désinfectant. Pour combler ce manque, de nombreuses entreprises se sont lancées dans la fabrication de désinfectants, profitant d’un assouplissement des règles d’approbation de Santé Canada.
L’arrivée de ces nouveaux joueurs a cependant soulevé des inquiétudes chez des spécialistes en chimie, qui s’interrogent sur leurs recettes, leurs modes de fabrication et la sécurité de leurs installations. Au fait de ces préoccupations, l’OCQ s’est questionné sur les façons de faire de ces nouveaux fabricants de gels hydroalcooliques.
Risques sécuritaires et sanitaires
Mais c’est un reportage de l’émission JE, sur les ondes de TVA, qui a fait éclater l’abcès. Les journalistes démontraient que les «recettes maison» de certains fabricants québécois présentaient des risques pour la santé puisqu’elles ne contenaient pas suffisamment d’alcool.
Les journalistes révélaient également que certains fabricants préparaient le mélange d’alcool dans leur garage, sans précautions particulières pour le transport de l’alcool (sachant que, concentré à 90 %, il est hautement inflammable). D’autres embouteillaient leurs gels à la main, à même la cuve de mélange, avec les risques de contamination que cela présente.
Matières premières contaminées ou dégradées
Pour obtenir un produit de qualité, les matières premières – alcool, peroxyde d’hydrogène (un antibactérien) et glycérine (un lubrifiant) – doivent être de qualité et, par conséquent, analysées. À l’étape de la fabrication, si les matières premières sont mélangées dans des contenants insalubres (pots Mason, barils de 45 gallons, etc.) ou entreposées de façon inadéquate, le produit sera contaminé et se dégradera. Toutes ces situations représentent un risque sanitaire pour l’utilisateur, indique l’Ordre.
Risques de contamination
De plus, pour être efficace contre les virus, un désinfectant pour les mains doit contenir au moins 60 % d’alcool. Il peut s’agir d’éthanol ou d’alcool isopropylique. En deçà de cette concentration, le produit ne peut avoir d’effet désinfectant. L’utilisateur aura un faux sentiment de sécurité et pourrait involontairement se contaminer ou contaminer son entourage.
Au contraire, si le produit contient des pourcentages trop élevés d’alcool (plus de 80 %), il peut y avoir des risques pour la santé tels que l’irritation de la peau, l’hypersensibilité ou une réaction allergique.
>> À lire aussi: Comment choisir son désinfectant pour les mains
Enquête à la grandeur du Québec
Soucieux de connaître l’état de la situation, l’OCQ a décidé d’ouvrir une enquête. Il fait appel à tous – grand public, industrie chimique et professionnels de la santé – pour obtenir des infos sur tout ce qui vise la chaîne d’approvisionnement des gels hydroalcooliques, de la production à l’utilisation, en passant par le transport, l’entreposage et la vente.
Les résultats de cette enquête seront dévoilés en février prochain. D’ici là, lisez l’étiquette sur vos bouteilles de gel ou lavez-vous les mains avec de l’eau et du savon pendant au moins 20 secondes.
Lire l’étiquette
En attendant, comment savoir si votre gel est de qualité? «Vous pouvez regarder sur l’étiquette du produit et prendre en note le NPN [numéro de produit naturel] délivré par Santé Canada pour les désinfectants à base d’alcool ou le DIN [numéro d’identification de médicament] et vérifier si sa vente est autorisée au Canada, explique Michel Alsayegh, président de l’OCQ. À la limite, vous pouvez demander au commerçant la provenance du produit, c’est votre droit de savoir», insiste-t-il.
S’il n’y a pas d’information sur la provenance ou de numéro de produit ou d’identification, n’hésitez pas à communiquer avec Santé Canada ou à écrire à l’OCQ ([email protected]).
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