Votre navigateur n'est plus à jour et il se peut que notre site ne s'affiche pas correctement sur celui-ci.

Pour une meilleure expérience web, nous vous invitons à mettre à jour votre navigateur.

Écoblanchiment: un plus grand encadrement réclamé

Par Marie-Eve Shaffer
ecoblanchiment-2 Oleksandr Drypsiak/Shutterstock.com

Les cas d’écoblanchiment se multiplient. Pour endiguer le fléau, le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) réclame un meilleur encadrement des déclarations faites par les entreprises privées dans la foulée de la lutte aux changements climatiques.

L’écoblanchiment est décrit par le Bureau de la concurrence comme étant «des publicités et ⦋des⦌ déclarations environnementales fausses ou trompeuses». Dans son rapport rendu public récemment, le CQDE s’intéresse particulièrement aux affirmations en lien avec le climat, qui consistent essentiellement à véhiculer un objectif de «net zéro», de «carboneutralité» ou d’un «alignement avec les objectifs de l’Accord de Paris».

«Les entreprises ne sont pas obligées de faire ce genre de déclarations. Toutefois, celles qui décident de le faire doivent procéder d’une certaine façon», indique Me Marc Bishai, avocat au CQDE.

Le rapport du CQDE relate des exemples de ce qu’il considère comme de l’écoblanchiment climatique. Il y a, entre autres, le projet de gazoduc entre l’Ontario et le port de Saguenay, envisagé par l’entreprise Gazoduq, annoncé comme carboneutre. Il fait d’ailleurs l’objet d’une plainte au Bureau de la concurrence. Il en est de même pour la RBC Banque Royale, qui affirme proposer des initiatives conformes à l’Accord de Paris, mais qui a investi en 2021 plus de 50 milliards de dollars dans les combustibles fossiles, en plus de consentir des prêts à des entreprises de ce secteur.

Une nouvelle norme

Pour l’organisation de juristes sensibles aux enjeux environnementaux, les autorités publiques devraient adopter «une norme de divulgation pour les déclarations climatiques». Elle aurait l’avantage de donner une marche à suivre aux entreprises qui souhaitent promouvoir leurs initiatives écologiques. Elles sauraient, par exemple, comment présenter de manière judicieuse le calcul de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), leur plan de réduction et leurs projets de compensation.

«Une de nos recommandations, c’est d’éviter d’adopter un nouveau règlement qui implique des nouvelles façons de faire», insiste Me Bishai.

Avec un cadre juridique plus clair, les consommateurs pourraient du même coup mieux discerner les allégations écologiques fondées de celles qui ne le sont pas. «Quand on a un manque du côté de la loi, le public a de la difficulté à évaluer la conformité», ajoute le spécialiste.

Une certification unique

Pour aider les consommateurs à s’y retrouver, le CQDE propose également que des organismes de réglementation soient responsables de délivrer des accréditations aux organisations, à l’image de ce qui est fait avec la certification Canada biologique. Les entreprises qui vendent des aliments bios doivent en effet respecter une série d’exigences (interdiction d’engrais de synthèse, d’arômes, de colorants, d’hormones de croissance, etc.), en plus de demander une certification auprès d’un organisme accrédité par l’Agence canadienne d’inspection des aliments. «C’est tout à fait légitime de penser à un système similaire pour les déclarations relatives au climat», assure Me Marc Bishai.

En plus de la certification, le CQDE recommande d’interdire toutes les allégations floues ou confuses, comme «propre», «durable» et «vert», qui peuvent induire les consommateurs en erreur. La Commission européenne réfléchit d’ailleurs à modifier la Directive sur les pratiques commerciales déloyales en ce sens.

Plus de moyens

Si les règles entourant les déclarations climatiques des entreprises deviennent sans équivoques, il y aura lieu de donner plus de moyens aux autorités publiques chargées de les appliquer. Le Bureau de la concurrence et l’Office de la protection du consommateur devraient ainsi considérer la lutte contre l’écoblanchiment comme une priorité, selon le CQDE. Les deux organisations pourraient en faire mention dans leur plan stratégique, former une équipe spécialisée dans le greenwashing et développer des mécanismes de surveillance.

Carboneutre, une allégation légitime?

Même s’il présente de nombreuses recommandations sur les déclarations climatiques légitimes, le CQDE souligne que ces dernières font l’objet de critiques. Pour certains, elles représentent une «distraction dangereuse et injuste» ou même «le voile pudique qu’on jette sur l’action climatique». Pour d’autres, elles donnent «l’impression que le secteur privé peut résoudre la crise climatique sans aucune forme de changement structurel».

Le CQDE convient que les entreprises auraient avantage à délaisser les objectifs de carboneutralité. «Dans la carboneutralité, il y a cette idée voulant que j’émette une certaine quantité de GES et que je les compense. Et, dans les compensations, il y a plusieurs controverses», souligne Me Bishai.

«Dans un monde idéal, poursuit-il, une organisation qui juge que c’est important de lutter contre les changements climatiques devrait plutôt miser sur la réduction de ses émissions de GES.»

>> À lire aussi: Des logos aux prétentions vertes sous la loupe

  Ajouter un commentaire

L'envoi de commentaires est un privilège réservé à nos abonnés.

Il n'y a pas de commentaires, soyez le premier à commenter.