Des pneus chinois contrefaits vendus aux États-Unis!
Consumer Reports, notre homologue américain, a testé des pneus chinois achetés par Internet qui pourraient bien être des contrefaçons. L’enquête de nos collègues pose de sérieuses questions sur ce marché et sur la sécurité des automobilistes.
En commandant des pneus pour les besoins d’un récent test comparatif sur un site Internet basé aux États-Unis, comme pourrait le faire n’importe quel consommateur américain, notre homologue Consumer Reports semble avoir hérité de pneus contrefaits…
>> Consultez notre test de pneus d'hiver et notre test de pneus quatre-saisons
Premier test de pneus chinois
Tout a commencé quand Consumer Reports a décidé d’intégrer pour la première fois, en 2014, les pneus de trois manufacturiers chinois, Geostar, Pegasus, et Sunny, à un test comparatif de pneus quatre saisons. Une décision motivée par le succès grandissant des produits chinois qui sont jusqu’à deux fois moins chers que les meilleurs modèles européens, américains ou coréens.
Les trois ensembles de pneus chinois ont obtenu de mauvais résultats, en grande partie à cause de leurs mauvaises performances en conditions hivernales et pour la faible durabilité de la bande de roulement.
Ce test de pneus aurait pu en rester là si le distributeur et propriétaire de la marque Pegasus aux États-Unis, American Pacific Industries (API), ne s’était pas étonné des résultats du test, les trouvant «très éloignés» de ses propres évaluations. Consumer Reports constatait notamment que les pneus Pegasus Advanta SUV, taille 265/70R17, offraient une mauvaise traction dans la neige et réagissaient mal lors du freinage sur la glace.
Pneus «non autorisés»
Après vérification des numéros de série, API a indiqué qu’il s’agissait de pneus «non autorisés». Selon les codes – E3 3512, 3612 et 5012 –, ces pneus auraient été fabriqués alors que la relation d’American Pacific Industries avec l’usine chinoise avait pris fin depuis un an.
Consumer Reports a poursuivi ses investigations pour savoir s’il s’agissait véritablement de pneus contrefaits et, le cas échéant, quels étaient les recours des consommateurs qui en avaient achetés. En résumé, les protagonistes de cette histoire, API et le site Web www.tires-easy.com notamment, se défendent de toute faute et se renvoient la balle.
Le FBI, l’immigration et les douanes
Consumer Reports a tenté de trouver des réponses auprès des autorités américaines. La National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) s’est contentée de conseiller aux consommateurs de faire preuve de prudence lors de l’achat de pièces d’automobiles sur Internet et a renvoyé Consumer Reports vers d’autres services, notamment le FBI. Au final, le dernier mot est revenu à l’agence de l’immigration et des douanes (ICE), qui a compétence sur les affaires de contrefaçons, laquelle a assuré se montrer vigilante, notamment pour saisir d’éventuelles importations futures.
Mais pour intenter une action en justice, il faudrait qu’API porte plainte pour contrefaçon. La société dit avoir contacté les autorités américaines, mais attend les suites d’une enquête… diligentée en Chine contre l’usine où les pneus «non autorisés» auraient été fabriqués.
Quels risques pour le consommateur?
Bref, pour le moment, difficile de comprendre ce qui s’est vraiment passé et quels sont les risques de se retrouver avec des pneus contrefaits. Ceux qui, comme Consumer Reports, ont acheté les ensembles de pneus litigieux sont un peu dans le brouillard.
Seule certitude: si les pneus testés sont des contrefaçons, il peut y avoir une différence de performance, de fiabilité et de sécurité par rapport aux produits officiels. La NHTSA a indiqué à la fin d’octobre qu’aucune plainte de consommateurs n’avait été enregistrée pour des pneus Pegasus Advanta SUV.
«Ce qui a commencé comme un test de pneus de routine est devenu un voyage à travers un labyrinthe de tromperie, de dénonciations et d’irresponsabilité», résume Consumer Reports. L’enquête n’est d’ailleurs pas parvenue à établir comment ces pneus, que le manufacturier renie, ont pu entrer aux États-Unis sous le nez des douanes américaines!
Québec: faut-il avoir peur des pneus chinois?
Le marché des pneus sur Internet s’est beaucoup développé au Québec depuis quatre ans. Pour Pascal Boutin, PDG de pmctire.com, premier site Web de vente de pneus au Québec et dans l’est du Canada, le cas des pneus achetés par Consumer Reports est isolé. «Nous n’avons jamais vécu ce genre de problème. Notre société travaille exclusivement avec des distributeurs québécois et canadiens. Nos pneus sont les mêmes que ceux des revendeurs», assure-t-il.
Si la société basée à Sherbrooke propose quelques marques chinoises – Sailun et Minerva, notamment –, elle ne traite jamais avec les fabricants directement. «Nous ne sommes pas intéressés, mais, oui, nous sommes souvent sollicités par les fabricants chinois. Nous pourrions également acheter des pneus en Europe», dit Pascal Boutin.
Aucune plainte au Canada
Du côté de Transports Canada, on indique qu’aucune plainte concernant la contrefaçon de pneus n’a été enregistrée. Les nouveaux pneus sont testés dans le cadre du programme de conformité annuel du ministère «afin de s’assurer qu’ils sont conformes à la Loi sur la sécurité automobile».
Transports Canada suggère aux personnes qui suspecteraient la contrefaçon de biens de le signaler à l’entreprise qui possède des droits sur le produit afin qu’elle puisse prendre les mesures qui s’imposent, ou de communiquer avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC) afin de préciser les détails de leur achat.
Enfin, si vous croyez que vos pneus pourraient avoir un défaut lié à la sécurité, signalez-le à la Division des enquêtes sur les défauts et rappels de véhicules de Transports Canada en composant le 1 800 333-0510.
Pour plus de renseignements sur les contrefaçons: Gendarmerie royale du Canada
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