Services non rendus en RPA : des aînés obtiennent des remboursements
Le Tribunal administratif du logement a donné en partie raison aux résidents de la RPA Les Jardins Renoir à Laval. Ils réclamaient un remboursement pour des services non rendus au plus fort de la pandémie de COVID-19.
Dans une décision rendue le 2 novembre dernier, le juge Philippe Morisset a accordé un montant de 1 105 $ à quelque 300 aînés qui ont occupé un logement dans cette RPA du groupe Cogir entre les mois de mars 2020 et février 2022. Une vingtaine de personnes âgées ont obtenu une plus petite somme – entre 220 et 900 $ –, puisqu’elles n’étaient pas locataires pendant toute la période.
Ces résidents n’ont pas eu accès à plusieurs infrastructures pendant les multiples confinements entraînés par la pandémie : piscine, salon de billard, salle de quilles, salle d’entraînement, cinéma, bibliothèque, chapelle et jardins. Le tribunal a conclu qu’ils ont vécu « une perte de jouissance ». Dans sa décision d’accorder des diminutions de loyer, le juge a aussi considéré la suspension du service de navette. Il a toutefois écarté toute compensation pour la fermeture de la salle à manger, de la pharmacie, du salon de coiffure et de la salle communautaire.
À l’origine, les demandes des résidents se chiffraient à plus de 4 500 $ par personne. Le juge n’a pas accédé à l’ensemble de leurs demandes puisqu’il a voulu tenir compte des coûts des infrastructures que les RPA doivent assumer.
Une immunité refusée
Pour sa défense, la résidence Les Jardins Renoir arguait qu’elle n’avait fait que respecter les directives de la santé publique pendant l’urgence sanitaire et que, du coup, elle jouissait d’une immunité. Elle justifiait sa position en s’appuyant sur la Loi sur la santé publique. L’une de ses dispositions stipule que « le gouvernement, le ministre ou toute autre personne ne peut être poursuivi en justice pour un acte accompli de bonne foi dans l’exercice ou l’exécution de ses pouvoirs ».
Le juge a rejeté cet argument. « Les personnes investies de l’immunité sont celles qui établissent et celles qui ont autorité pour faire respecter les normes établies et édictées en vertu ⦋de la Loi sur la santé publique⦌, qui ont un lien de préposition avec le gouvernement ou le ministre », écrit-il.
« L’immunité (…) vise à protéger les décideurs contre les poursuites en justice pour les décisions qu’ils prennent de bonne foi », ajoute-t-il dans son jugement.
En appel ?
L’entreprise dispose de 30 jours pour faire appel de la décision devant la Cour du Québec. Cogir n’a pas encore signifié sa décision. « Nous prenons présentement connaissance du jugement et de ses possibles implications auprès de nos équipes. Nous n’avons donc pas de commentaires pour l’instant », a indiqué par courriel Brigitte Pouliot, directrice des communications.
Le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA), qui représente quelque 800 RPA, estime pour sa part que le jugement doit être porté en appel. « Si une décision comme celle-ci reste intacte, la résultante sera un autre nœud d’étranglement financier pour les RPA, alors que plus de 300 RPA ont fermé leurs portes depuis janvier 2021 », a déclaré Marc Fortin, président-directeur général du RQRA.
« Le gouvernement a spécifié dans le décret de la fin de l’urgence sanitaire que nul ne pouvait être poursuivi pour avoir suivi les directives de la santé publique, dit-il encore. ⦋Le ministre de la Santé, Christian⦌ Dubé, en tant que législateur, a clarifié ses intentions dans le salon bleu lors des questions sur le projet de loi finalisant l’urgence sanitaire. »
Pour Me Hélène Guay, avocate spécialisée en droit des aînés, cette décision est importante. « C’est la première fois qu’un tribunal administratif se prononce sur la ⦋disposition de la⦌ Loi sur la santé publique, qui avait fait l’objet de pas mal de commentaires des locateurs ; ⦋ils prétendaient être⦌ à l’abri des poursuites», a-t-elle notamment souligné en entrevue à Radio-Canada.
Le Tribunal administratif du logement est actuellement saisi d’une trentaine d’autres demandes présentées par des aînés qui réclament un remboursement pour des services qu’ils ont payés et qui ne leur ont pas été fournis pendant la pandémie de COVID-19.
>> À lire aussi : Des aînés en résidence font de la résistance et Bail en résidence privée: de l'aide à votre portée
L'envoi de commentaires est un privilège réservé à nos abonnés.
Déjà abonné? Connectez-vous
Il n'y a pas de commentaires, soyez le premier à commenter.