Marché immobilier en surchauffe, craintes relatives à la reprise économique et à l’endettement des ménages, taux d’intérêt au plancher… La table était mise pour un resserrement des règles hypothécaires. Et tout le monde s’est mis de la partie!
Le Bureau du surintendant des institutions financières – l’organisme de réglementation national –, le gouvernement fédéral et l’Autorité des marchés financiers (qui chapeaute les institutions financières québécoises, le Mouvement Desjardins pour ne pas le nommer) ont annoncé qu’à partir du 1er juin, les acheteurs devront se soumettre à des simulations de crise plus exigeantes.
Un taux plancher fixe
Ce fameux test de résistance vise à s’assurer qu’en cas de hausse des taux d’intérêt, l’acheteur sera malgré tout en mesure de rembourser son hypothèque. Vous ne passez pas le test? La banque ne vous consentira pas de prêt!
Jusqu’à présent, pour les prêts non assurés, la banque devait utiliser le taux le plus élevé entre celui négocié avec votre prêteur majoré de 2 % et le taux de référence de cinq ans affiché par les grandes banques (4,79 % actuellement). À compter du 1er juin, cette dernière condition sera modifiée et passera à un taux plancher fixe de 5,25 % qui sera révisé périodiquement afin de refléter la conjoncture économique et les conditions du marché.
Pour les prêts qui nécessitent une assurance hypothécaire, c’est-à-dire ceux pour lesquels la mise de fonds sur la propriété est de moins de 20 %, l’institution financière devait prendre le taux le plus élevé entre celui négocié avec le prêteur et le taux de référence de cinq ans. Comme pour les prêts non assurés, le plancher grimpera lui aussi à 5,25 %. Les personnes qui comptent refinancer leur hypothèque seront également concernées par ces modifications, mais pas celles qui ne font que la renouveler.
Concrètement, qu’est-ce que cela va changer? Annie Campoli, vice-présidente associée, spécialiste hypothécaire mobile à la TD, indique qu’en augmentant le taux requis pour se qualifier, on réduit nécessairement la capacité d’emprunt des consommateurs.
Ce petit calcul effectué par Denis Doucet, porte-parole de Multi-Prêts Hypothèques, reflète l’impact financier sur le budget des emprunteurs. Pour un prêt traditionnel sur 25 ans avec un paiement de 1 500 $ par mois, la capacité d’emprunt passerait de 263 292 $ avec un taux de qualification de 4,79 %, à 251 712 $ avec un taux de 5,25 %. Avec un paiement mensuel de 2 000 $, on glisserait de 351 056 à 335 616 $.
Malgré cette diminution, il est fort probable que cela ne suffira pas à calmer la frénésie immobilière. En effet, depuis la mise en place du test de résistance en 2016, les emprunteurs hypothécaires ont déjà été confrontés à des taux de qualification similaires. De l’avis de Denis Doucet, cela contribuera seulement à déplacer le marché, les acheteurs se tournant vers des propriétés situées de plus en plus loin des grands centres, et donc moins chères.
En tout état de cause, voici quelques petits conseils pour mettre toutes les chances de votre côté au moment de demander une préapprobation hypothécaire. L’idéal est d’avoir un emploi stable, un faible niveau d’endettement, mais aussi d’utiliser le crédit de façon raisonnable. Car les institutions financières vous ont à l’œil et scruteront votre dossier de crédit à la loupe. Un consommateur responsable, qui ne dépasse pas 30 % de la limite de sa carte de crédit, sera bien vu des prêteurs.
Attention : l’état de la propriété pourrait aussi faire sourciller la banque quand elle fera réaliser une évaluation de celle-ci. Denis Doucet remarque que, compte tenu de la surenchère actuelle, il est possible que la valeur réelle se situe bien en dessous du prix demandé par le vendeur et que la banque refuse d’octroyer le financement. Dans ce cas, l’acheteur potentiel devra casser sa tirelire et augmenter sa mise de fonds… ou opter pour une demeure moins coûteuse.
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