Été rime pour beaucoup de familles québécoises avec escapades en nature et camps de vacances. Et rien n’égale la beauté de la nature québécoise, excepté peut-être la voracité de ses insectes piqueurs! Je me souviens, enfant, m’être tartiné à répétition les jambes et les bras d’une épaisse couche de calamine pour arriver à oublier un instant les démangeaisons de centaines de piqûres de mouches noires et de maringouins.
Plus tard, j’ai initié mes enfants aux joies du camping, et je me rappelle mon hésitation à enduire mes cocos de produits chimiques pour les protéger des assauts des moustiques. Même en respectant les indications des fabricants, il me restait toujours une petite crainte. Après tout, difficile d’être totalement confiante quand un produit indique: «Évitez tout contact avec les yeux et la bouche, la rayonne, l’acétate, les plantes, le fini des meubles, les matières plastiques et les surfaces peintes»… J’ai donc tout de suite compris l’attrait pour les Mosquito Patches (vendus par The Natural Patch) sur les réseaux sociaux.
Concrètement, il s’agit de petits autocollants de formes amusantes censés créer un bouclier virtuel pour camoufler nos enfants, ce qui empêche les insectes de les repérer (rien de moins!). Le site web du fabricant, en anglais seulement, nous apprend également que le produit est constitué d’ingrédients naturels, non toxiques et non allergènes. Ce serait vraiment merveilleux de pouvoir protéger les tout-petits des insectes en leur mettant tout simplement un autocollant de bonhomme sourire sur le chandail! Malheureusement, après avoir testé la chose, je suis loin d’être convaincue qu’il s’agisse d’une solution intéressante.
Mais de quoi ces patches sont-elles faites?
Sur le produit que j’ai reçu, seule l’huile de citronnelle est inscrite comme ingrédient actif. Sur le site du fabricant, on parle plutôt d’une combinaison d’huile essentielle dont l’odeur empêcherait les moustiques de détecter le CO2 émis par les humains, et donc de les localiser.
Pour Jacques Boisvert, professeur retraité de l’Université du Québec à Trois-Rivières et spécialiste des insectes piqueurs, ce genre de produits n’a jamais fonctionné. «J’en ai testé plusieurs dans ma carrière et je n’ai jamais obtenu de bons résultats. D’abord, même si l’huile de citronnelle peut démontrer une certaine efficacité théorique, il faut que les concentrations soient très importantes, entre 15 % et 20 %. Ensuite, ce ne sont pas toutes les huiles de citronnelle qui sont efficaces. La provenance de l’huile influence sur sa composition chimique et sa teneur en ingrédients actifs. Finalement, le design même du produit est douteux. Si je mets une patch sur mon chandail, même si elle est efficace, il y a peu de chances qu’elle décourage un maringouin de me piquer les chevilles.»
On ne trouve pas d’information sur l’endroit où sont fabriquées les patches, mais la maison mère se situe en Australie. Je dois cependant admettre que j’ai reçu mes patches en une dizaine de jours seulement, soit beaucoup plus rapidement que bien des produits locaux que j’ai commandés dans les derniers mois.
Les chasse-moustiques que vous achetez en magasin portent un numéro d’homologation exigé par la Loi sur les produits antiparasitaires, mais les patches que j’ai reçues n’affichent rien de tel. Il faut dire que la citronnelle n’est plus homologuée comme insectifuge au Canada, ce qui aurait probablement empêché ces patches d’obtenir leur homologation.
Sur l’emballage de mon produit, on peut lire cependant que le produit est «exempt from EPA registration». Aux États-Unis, les chasse-moustiques doivent être approuvés par l’Environmental Protection Agency (EPA), qui confirme que le produit est sans risque et efficace. Or, les produits à base d’huile de citronnelle, de cèdre, de géranium, de menthe ou de soya ne sont pas assujettis à ce règlement. Sur son site web, l’EPA indique que ces ingrédients ne posent pas de risque pour la santé. Cependant, cela implique qu’aucun test d’efficacité n’est mené sur les chasse-moustiques qui utilisent ces ingrédients.
En retournant sur le site web du fabricant, j’ai été surprise des commentaires dithyrambiques laissés par de supposés utilisateurs. Tout le monde donne cinq étoiles et tout le monde a des photos qui semblent un peu trop professionnelles pour ne pas me faire sourciller. Autre signe qui m’a fait douter sérieusement de l’efficacité du produit: la compagnie vend plusieurs autres patches qui utilisent les huiles essentielles pour vous aider, notamment, à vous calmer, à diminuer vos symptômes d’allergies ou à mieux gérer vos envies de sucre. Ça fait beaucoup de patches miracles pour une seule compagnie!
J’avais presque hâte à la première soirée où les bibittes allaient se montrer le bout du nez. Dès que ce jour est arrivé, j’ai sorti mes petits autocollants et j’en ai distribué à toute ma famille ainsi qu’à mes invités. Premier constat, l’odeur des patches est assez prenante et pas particulièrement agréable. Ensuite, mes cinq piqûres supplémentaires en 30 minutes semblent confirmer mes doutes, et mes testeurs étaient plutôt d’accord avec moi. Après une désagréable demi-heure, on s’est décidé à sortir le Thermacell et à jeter les patches à la poubelle.
Cela dit, Jacques Boisvert m’a donné d’autres trucs à essayer quand les insectes piqueurs s’invitent dans nos activités. Porter des vêtements, même légers, empêche les mouches noires, les brûlots et les frappabords de nous atteindre. Malheureusement, les maringouins, avec leur long dard, sont plus habiles à passer entre les mailles du tissu. Cependant, les maringouins sont incapables de voler s’ils sont confrontés à un vent aussi faible que 5 km/h. Un ventilateur, même au réglage le plus doux, est capable d’envoyer les maringouins voler ailleurs.
Pour tout savoir sur les chasse-moustiques qui fonctionnent et les gadgets utiles pour la terrasse, lisez les excellents articles de ma collègue Amélie Cléroux.
Pour de l’information sur d’autres produits aux prétentions intéressantes, vous pouvez également lire mon évaluation des collants sheertex et l’évaluation de ma collègue Marie-Ève pour les Hot Poc. Vous pensez à d’autres produits que vous aimeriez qu’on teste? N’hésitez pas à m’écrire!