Les automobilistes qui ont misé sur le faible prix du litre d’essence à la pompe depuis un an pour acheter un véhicule neuf plutôt gourmand risquent de moins apprécier la saison chaude. Les planètes s’alignent pour une hausse durable du coût du plein d’essence dès cet été.
Trois facteurs influencent généralement le prix du litre d’essence à la pompe: l’offre, la demande et les taxes. Or, l’offre de produits pétroliers plafonne ces jours-ci, pour diverses raisons. Les pays pétroliers limitent depuis plusieurs mois leurs exportations, ce qui réduit les réserves mondiales à partir desquelles sont fixés les cours du pétrole.
Au même moment, les raffineries texanes, d’où provient l’essentiel du pétrole consommé dans le nord-est du Canada (y compris le Québec), se remettent très graduellement de turbulences météo qui ont provoqué leur fermeture prolongée, plus tôt cet hiver.
Une économie assoiffée de pétrole
Pendant ce temps, la demande bondit. À l’échelle mondiale, c’est l’Asie qui mène la charge. L’Agence internationale de l’énergie prévoit que la consommation mondiale de pétrole atteindra de nouveaux sommets d’ici 2026 en raison de la demande asiatique.
À l’échelle canadienne et québécoise, la demande en carburant augmentera tout au long de l’année, à mesure que la vaccination contre la COVID-19 se poursuivra. En sortant de la pandémie, le Canada voudra rouvrir ses frontières. Les avions se remettront à décoller plus régulièrement et auront besoin de davantage de kérosène.
Or, indique l’expert canadien du secteur pétrolier Roger McKnight, il existe un lien direct entre la consommation de carburant de l’aviation au pays et le prix de l’essence à la pompe. « Ce que j’ai observé ces 30 dernières années, c’est que plus les avions consomment de carburant, plus l’essence au Canada coûte cher », soutient-il.
L’impact ne sera pas immédiat, étant donné que le secteur de l’aviation est encore largement cloué au sol, mais, s’il se remet en branle au courant de l’été, il fera redécoller les prix à peu près au moment même où les consommateurs canadiens prendront la route pour leurs vacances estivales.
Cette hausse surviendra au moment où les pétrolières haussent leurs prix pour profiter du fait que les vacanciers se déplacent en voiture et consomment davantage de carburant.
Hausse jusqu’en 2030 de la taxe sur les carburants
La taxe carbone que le gouvernement fédéral veut imposer progressivement d’ici 2030 sera aussi appliquée sur le carburant vendu à la pompe. En présentant une révision de cette taxe à la fin de l’an dernier, Ottawa calculait qu’elle ferait augmenter le prix du litre de carburant de près de 10 cents d’ici 2022, et d’environ 28 cents d’ici la fin de la décennie.
Une première application de cette taxe devrait survenir le 1er avril prochain, précise Roger McKnight. Le plein d’essence coûtera donc plus cher dès ce printemps, et on doute que les pétrolières réduisent leur marge bénéficiaire pour compenser cette hausse de taxe prolongée.
En contrepartie, Ottawa offrira des remises fiscales aux contribuables canadiens. Ces dernières seront revues à la hausse et acheminées tous les trois mois, plutôt qu’une fois l’an.
L’objectif du gouvernement fédéral est d’accélérer un virage dans le secteur du transport vers des véhicules moins gourmands et moins polluants. Ceux qui ont déjà fait la transition ne subiront pas d’impact direct de la hausse du prix des carburants. Pour les autres, il faudra se préparer à payer plus cher pour se déplacer en voiture au cours des prochains mois.
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