Entreprise « billionaire » (soit milliardaire) à la bourse il y a 14 mois, Tesla subit plus que tout autre constructeur les effets de la volatilité économique actuelle. Et comme chaque fois qu’un constructeur voit ses finances malmenées, la question peut se poser : quels effets les perturbations boursières peuvent-elles avoir sur ses produits actuels ou à venir ?
Deux dates : 25 janvier et 1er mars
Si la situation de Tesla vous turlupine sérieusement, voici deux dates à encercler dans le calendrier : les 25 janvier et 1er mars prochains.
À la fin de janvier, la société californienne divulguera les résultats financiers de son dernier trimestre pour l’année fiscale 2022. Comme à peu près toutes les autres marques d’automobiles, Tesla a connu un été difficile en raison de la livraison au compte-gouttes des composants destinés à l’assemblage de ses véhicules.
Son PDG, Elon Musk, a promis à la mi-octobre que la situation reviendrait plus ou moins à la normale vers la fin de 2022. Il a dit très clairement ceci : « Nous prévoyons vendre chacun des véhicules que nous pouvons construire, et ça vaut pour aussi loin que nous pouvons prédire l’avenir. »
Le 1er mars 2023 aura lieu la journée annuelle des investisseurs, une conférence que tiennent généralement des sociétés cotées en bourse pour présenter à leurs actionnaires les nouveautés à venir qui assureront leur croissance. À ce moment, Tesla en dira plus sur la prochaine plateforme technologique qu’elle prévoit utiliser pour moderniser un peu plus la Model 3, le modèle le plus vendu de la marque. On en saura plus sur ses avancées du côté des batteries, où l’objectif est de créer une batterie ayant une vie utile d’au moins 1,6 million de kilomètres.
On pourrait aussi voir le bout du nez d’un prototype de voiture électrique à 25 000 $ US, même si Musk a tenté ces derniers mois de calmer les attentes à cet égard. Le prix, dans les autos électriques comme ailleurs, est le nerf de la guerre.
Et Tesla, qui vend ses véhicules à un prix qui la classe dans la catégorie des marques de luxe, pourrait surtout vouloir en découdre avec General Motors, dont les nouveautés électriques au début de 2023 sont sans conteste les plus abordables sur le marché.
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Rien dans tout cela n’envoie le signal que Tesla est financièrement mal en point. Et même si le temps passé par Elon Musk dans les bureaux de Twitter, une autre de ses propriétés, embête les investisseurs, cela ne signifie pas pour autant que Tesla se porte mal. Dans les prochains mois, l’entreprise prévoit toujours commercialiser sa camionnette Cybertruck. Elle a déjà commencé à livrer ses premiers camions commerciaux Semi.
Des voitures avant tout
Par simple curiosité, j’ai demandé au président et porte-parole de l’Association des véhicules électriques du Québec (AVEQ), Simon-Pierre Rioux, ce qui se produirait si Tesla décidait de cesser ses activités.
Est-ce que les propriétaires verraient leur voiture tomber subitement en panne ? « Pas vraiment, répond-il. L’avenir des véhicules n’est pas relié aux mouvements de l’action. » Même que la demande actuelle est suffisante pour passer à travers la récession anticipée en 2023, selon lui.
Cela dit, les voitures connectées sont susceptibles de voir leurs services en ligne disparaître éventuellement, si l’entreprise venait à sombrer. « Mais il y aura toujours un bidouilleur pour trouver un moyen de contourner ces pannes », ajoute Simon-Pierre Rioux, lui-même propriétaire d’une Model 3 depuis 2019. Sinon, il y aura toujours le Wi-Fi une fois à la maison pour mettre à jour des services ou des applications.
De toute façon, conclut-il, le reste de la voiture va continuer à fonctionner : « Après tout, c’est juste une voiture. » Dans le pire des cas, l’entretien et tout le reste pourront toujours être effectués auprès d’un spécialiste indépendant…
Mais avant que tout cela n’arrive, si les finances de Tesla devenaient dramatiques à ce point, la valeur de sa marque pourrait intéresser des rivaux aux poches profondes, désireux d’accélérer leur propre virage électrique. « Quelqu’un voudra racheter la marque ou la technologie, c’est certain, assure Simon-Pierre Rioux. Surtout maintenant que des gouvernements ont imposé des cibles pour réduire les émissions dans le transport. » L’auto électrique va continuer à aller de l’avant, et la marque Tesla, dans ce contexte, est très précieuse.
Une année 2023 difficile ? Oui et non
En novembre 2021, les bourses nord-américaines ont atteint un sommet historique. À peu près tous les indices, tant à New York qu’à Toronto, voguaient sur un surplus d’enthousiasme. Ce n’est pas mêlant, même le bitcoin atteignait des sommets !
Et, bien sûr, Tesla surfait sur la même vague, propulsant son patron Elon Musk en tête du fameux palmarès Forbes des gens les plus fortunés de la planète.
Quatorze mois plus tard, bien des choses ont changé. Pour tout le monde, mais surtout pour Elon Musk et pour Tesla. Depuis son sommet de la fin de 2021, son action a perdu deux fois plus de valeur que l’ensemble de ses rivales, tant du côté de l’automobile que des technologies. Musk a payé trop cher (lui-même l’a admis) pour acquérir Twitter, une maladresse parmi tant d’autres qui ont rapidement inquiété les investisseurs… et certains consommateurs, qui ont ensuite retardé ou annulé leur commande d’un véhicule Tesla.
Toutes ces turbulences font dire aux analystes financiers que l’action de Tesla devrait continuer de souffrir en 2023, peut-être même jusqu’en 2024. Certains prédisent même que Musk quittera la tête de l’entreprise cette année. Voilà pour les spéculateurs.
Pour les consommateurs, les prévisions sont plus positives : Tesla prévoit livrer 50 % plus de véhicules en 2023 qu’en 2022, et promet une autre croissance de 50 % en 2024, par rapport à sa production totale de 2023.
Ça ne sonne pas comme une entreprise qui a des problèmes financiers très importants…